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États-Unis 1983-1984 Une reprise fragile Si on s'en tient aux chiffres, 1983 a été aux États-Unis l'année de la reprise:...

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« États-Unis 1983-1984 Une reprise fragile Si on s'en tient aux chiffres, 1983 a été aux États-Unis l'année de la reprise: après la récession de 198082, la croissance du PNB a atteint 3,3%, et les résultats des premiers mois de 1984 laissaient augurer une croissance annuelle du même ordre.

Le chômage à deux chiffres à la fin de 1982 a fléchi en 1983, et a diminué encore en 1984.

L'inflation, qui avait atteint les 12% en 1980, est tombée à 6,2% en 1982, puis à 4% en 1983, remontant légèrement en 1984. Quant à la productivité, elle était, jusqu'en 1982, l'un des plus graves sujets d'inquiétude des milieux d'affaires.

L'Amérique traînait derrière ses principaux concurrents: dans les années soixante-dix, la productivité n'avait augmenté aux États-Unis que de 20%, contre 145% au Japon, 77% en France et 75% en RFA.

En 1983, c'était à nouveau la confiance.

De nombreux éléments étaient rassemblés pour le redémarrage des gains de productivité: un net accroissement des dépenses de recherche et développement, une force de travail mieux formée (avec néanmoins une fragilité relative de la formation des 16-24 ans), un investissement en capital en augmentation pour chaque poste de travail.

La progression de la productivité horaire du travail a été de 3,6% en 1983.

Il s'agit d'un phénomène courant en période de reprise, mais les experts espéraient une croissance annuelle de 3% au cours de la décennie. La reprise était néanmoins irrégulière, reflétant la fragmentation des industries.

Dans les industries traditionnelles - l'automobile en particulier - c'était l'optimisme prudent: l'augmentation de la production en 1983 (+30%) n'a été possible, malgré le fort taux de pénétration des importations étrangères (25% du marché), que grâce à de nouveaux sacrifices de la part des travailleurs.

Chimie: l'austérité a également été le fondement de la reprise.

Ressources naturelles: la croissance a été faible dans le secteur de l'énergie, moyenne en agriculture, et forte dans les produits forestiers.

Technologies nouvelles: l'accélération des ventes et des profits s'est poursuivie dans l'industrie des médicaments, en électronique (avec le développement de l'ordinateur individuel), en informatique et en télécommunications.

L'irrégularité réapparaissait dans le secteur des loisirs et des soins personnels: développement de la télévision au détriment du cinéma ; des aliments préconditionnés aux dépens des articles de santé, etc. La roulette américaine Reprise incontestable, donc.

Pourtant, nombreux sont ceux qui s'attendaient à une sérieuse dégradation de l'économie après les élections présidentielles de novembre 1984.

La raison en est simple: la reprise s'est effectuée sur fond de désordre national et international.

Les Américains jouent à la roulette russe avec leur économie.

Et ce n'est pas en 1984 - année électorale - que l'on pouvait s'attendre à une politique qui s'attaque aux fondements du déséquilibre: déficit budgétaire, instabilité du marché financier international, anarchie dans les politiques de restructuration industrielle, décomposition du tissu social américain. La plupart des économistes s'inquiétaient du déficit budgétaire: de 150 à 200 milliards de dollars, chaque année, d'ici à 1988, selon les prévisions officielles.

Beaucoup craignaient en effet que ces déficits élevés (financés par ponction sur le marché des capitaux) ne réduisent le flux de capitaux allant à l'investissement privé et ne favorisent une nouvelle flambée des taux d'intérêt.

Cela pourrait ralentir considérablement la construction de logements, l'achat d'automobiles et d'autres biens de consommation durables, la formation de stocks.

Mais la réduction du déficit (par augmentation des impôts ou réduction des dépenses de l'État) amputerait aussi la demande finale. Les autres conséquences du déficit budgétaire - dénoncées dès le sommet de Versailles, par le président Mitterrand, dans le scepticisme le plus général - inquiétaient les milieux d'affaires américains.

Sur le plan national, les taux d'intérêt élevés compromettaient la poursuite de la reprise, et la surévaluation du dollar (de l'ordre de 30%) rendait les produits américains peu compétitifs à l'exportation.

Sur le plan international, ces deux facteurs contribuaient à accroître le désordre du système monétaire.

Ils file:///F/dissertations_pdf/0/451034.txt[15/09/2020 14:08:40] renforçaient également, grâce à l'afflux des capitaux étrangers aux États-Unis, le processus de désinvestissement, notamment en Europe.

Après avoir financé l'inflation américaine liée à la guerre du Vietnam, l'ensemble du monde finançait le redéploiement industriel américain. Mais au-delà, l'aggravation du déficit de la balance des paiements américaine posait le problème de la dette fédérale: 280 milliards de dollars en 1960, 500 milliards en 1975, 4 200 milliards en 1984.

En 1984, le pays le plus riche du monde devait consacrer 165 milliards de dollars - soit 4% de son PNB - au service de la dette.

Si on accepte le scénario de la récession en 1985, sans changement de politique, le déficit risque de s'accroître de 20 ou 30% - portant le service de la dette aux 2/3 ou aux 3/4 de l'ensemble des capitaux levés aux États-Unis! Un autre facteur d'inquiétude était la décomposition du tissu social accompagnant la reprise.

Un élément de cette dégradation était la politique de "désindustrialisation" sauvage, menée depuis la fin des années soixante-dix, qui a conduit la fermeture d'usines dans l'Est et le Nord des États-Unis, sans effort de recyclage des personnels licenciés.

Il s'en est suivi un exode vers le Sud, le Sud-Ouest, et surtout l'Ouest, rappelant les mouvements de population des campagnes vers les villes lors de la première révolution industrielle et ceux du Sud vers le Nord à l'occasion de la seconde révolution industrielle.

Dans un premier temps, la dégradation n'a été visible qu'à l'Est et au Nord.

Plus récemment, les effets pervers de la troisième révolution technologique se sont fait sentir, également, dans les nouvelles régions industrialisées de l'Ouest, y compris dans la "vallée du silicium" (Californie), où l'infrastructure urbaine (école, habitat, transports en commun, etc.) n'a pas suivi le développement économique. Les méfaits de la désindustrialisation s'ajoutent aux effets non contrôlés des mutations technologiques dans les régions où se sont développées les industries nouvelles.

Et partout se retrouvent les mêmes tendances: appauvrissement des services publics (au point que les routes et les ponts ne sont plus réparés), dégradation de l'enseignement (dont témoignent les rapports publiés au cours des deux dernières années), réduction de la surface des appartements, accroissement du nombre d'hommes et de femmes vivant seuls. L'illusoire "révolution conservatrice" La reprise s'expliquerait-elle - même dans sa fragilité - par la fameuse "révolution conservatrice" qu'on oppose au modèle socialiste et/ou social-démocrate français et/ou européen? Même pas! Que sont en effet devenus, à l'épreuve du pouvoir, les fondements de la "sagesse" reaganienne ou thatcherienne? On se souvient des quatre idées-forces du candidat Reagan: 1) austérité et équilibre budgétaire ; 2) réduction des impôts ; 3) ralentissement de la masse monétaire ; 4) "déréglementation" et repli de l'État. L'austérité n'a certes pas affecté les dépenses militaires (elles ont représenté un tiers de l'augmentation des dépenses fédérales entre 1981 et 1983), mais, fait plus surprenant, elle n'a pas affecté autant que prévu les dépenses sociales de l'État: celles-ci sont même passées de 248 milliards de dollars en 1980 (soit 9,43% du PNB) a 358 milliards en 1983 (10,82% du PNB).

C'est que, malgré les nombreuses coupes opérées dans les budgets d'aide sociale aux chômeurs et aux défavorisés, l'effet de ces restrictions a été plus que compensé par l'augmentation du nombre des bénéficiaires.

Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que la part des dépenses de l'État dans le PNB ait très nettement augmenté, passant de 20,3% en 1979 à 23,7% en 1983, au prix d'un déficit budgétaire accru.

Ce "dérapage" par rapport aux objectifs initiaux explique que les prévisions budgétaires pour la période 1984-1988 fassent état d'une baisse de 15% des dépenses sociales (contre une hausse de 13% pour les dépenses militaires!). La réduction des impôts a en revanche eu lieu, mais ses effets ont été négatifs et en partie contraires aux prévisions: transfert fiscal en faveur des riches dans un système de "désimposition" ne tenant pas compte des différences de revenus ; et surtout décélération de l'épargne privée qui est tombée de 6,8% du PNB (années cinquante), à 6,7% (années soixante), puis à 4,8% avec la "révolution conservatrice".

Même les experts de Fortune considéraient que des impôts nouveaux étaient inévitables en 1985. Troisième pilier du reaganisme, le "monétarisme" n'a pas été appliqué avec rigueur, au grand dam des friedmaniens.

En 1981, la progression de la masse monétaire.... »

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