France 1996-1997 L'auto-dissolution de la droite Du jamais vu depuis la création de la Ve République en 1958! Jamais en...
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France 1996-1997
L'auto-dissolution de la droite
Du jamais vu depuis la création de la Ve République en 1958! Jamais en effet,
dans ce régime où, lorsqu'il dispose d'une majorité parlementaire, le président
de la République joue un rôle politique de premier plan, celui-ci n'avait
dissous l'Assemblée nationale sans que son camp ne gagne les élections
législatives qui avaient suivi.
Jamais non plus, au demeurant, on n'avait vu le
chef de l'état prononcer une dissolution en dehors de toute crise
institutionnelle et alors qu'il disposait d'une majorité "introuvable" (les
législatives de 1993 avaient donné 484 sièges sur 577 aux droites) et qu'il
venait lui-même d'être élu deux ans plus tôt.
C'est sans doute en partie dans cette élection présidentielle de 1995 qu'il faut
rechercher les raisons profondes tant de la dissolution de l'Assemblée nationale
que de la cuisante défaite de la droite aux élections anticipées.
Jacques Chirac
avait en effet choisi de faire campagne sur des thèmes anti-conservateurs,
fustigeant la "pensée unique", proclamant l'urgente nécessité de réduire la
"fracture sociale", de faire place au changement, de donner priorité à la lutte
contre le chômage.
Cette ligne politique avait de quoi surprendre: le
gouvernement n'était-il pas dirigé depuis avril 1993 par Édouard Balladur, issu
du même mouvement "gaulliste" que lui - le Rassemblement pour la République
(RPR) - et ayant longtemps été son très proche collaborateur.
Attentes cruellement déçues
C'est pourtant ce discours social qui a permis à J.
Chirac d'être élu, une part
de l'électorat, lassée par douze ans de politique de rigueur subie au nom de
lendemains sans cesse différés, ayant préféré donner ses voix à celui qui
semblait avoir changé de discours.
Les attentes suscitées allaient très vite
être cruellement déçues.
La politique de rigueur et le cap de la monnaie unique
européenne - supposant le respect scrupuleux des grands équilibres
macroéconomiques - était confirmés en octobre et le gouvernement d'Alain Juppé
allait s'illustrer par un style technocratique et froid, avec discours dans le
droit fil de la "pensée unique".
Cela n'empêcha pas le Premier ministre de faire
preuve d'une belle détermination dans la mise en oeuvre de ses projets, ne
craignant pas d'affronter une impopularité croissante.
Il en fit la
démonstration à l'automne 1995 lorsqu'une grève de certains services publics notamment des transports ferroviaires - entraîna un fort mouvement d'approbation
de la part de l'opinion publique, dans le contexte de l'annonce d'une ambitieuse
et délicate réforme de la Sécurité sociale.
Les difficultés allaient se multiplier pour le gouvernement, tandis que divers
projets de réformes étaient mis en oeuvre, dont la suppression du service
national et de la conscription au 1er janvier 1997 pour les jeunes nés après le
31 décembre 1978, l'armée devant être professionnalisée.
La principale mesure promise avant les élections pour lutter contre le chômage
et l'exclusion, le Contrat d'initiative-emploi (CIE), entré en vigueur le 1er
juillet 1995, a finalement eu un impact limité sur le nombre total de chômeurs,
malgré son coût financier élevé.
Les autres mesures gouvernementales en matière
d'emploi se sont notamment attachées à réorienter les ressources budgétaires.
Aux mesures spécifiques ciblées sur des publics en difficulté on a ainsi eu
tendance à préférer une logique d'abaissement généralisé du coût de la
main-d'oeuvre - notamment par la réduction des charges pesant sur les bas
salaires - au point qu'on a pu s'interroger: cette politique de l'emploi
était-elle encore au service des demandeurs d'emploi ou bien plutôt au service
des entreprises.
Il est cependant à noter que la loi du 11 juin 1996, dite loi
"Robien", a esquissé une logique différente, consistant à alléger les
cotisations sociales pour les entreprises réorganisant et réduisant
significativement le temps de travail afin de développer ou de préserver
l'emploi.
Cette loi est devenue une référence importante des débats.
L'action du
gouvernement Juppé dans ce domaine aura quoi qu'il en soit souffert de la
persistance d'une faible croissance (1,3 seulement en 1996).
Mouvement civique en faveur des "sans-papiers"
Venant après l'attitude de compréhension manifestée par une large partie de
l'opinion en faveur des grèves de l'automne 1995 - attitude qui avait représenté
une expression collective forte légitimant des exigences face à la crise -, la
sympathie manifestée à l'été 1996 en faveur des manifestations d'étrangers sans
titres de séjour réclamant une régularisation de leur statut a été un autre
signe d'évolution politique.
Dans ce pays où la question de l'immigration a été
depuis longtemps diabolisée, notamment à la suite de l'extrême droite qui a fait
des étrangers des boucs émissaires, les grèves de la faim de "sans-papiers" et
les manifestations de soutien ont accueilli un écho significatif, y compris dans
les médias.
Cela s'est confirmé quelques mois plus tard à propos de la loi Debré relative à
l'immigration.
D'inspiration déjà très répressive, le projet de loi avait été
encore durci par des amendements.
Le 12 février 1997, un appel signé par des
dizaines de cinéastes incitait à la "désobéissance civique", l'article 1 du....
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