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François-René de CHATEAUBRIAND. (Mémoires d'outre-tombe) [En 1792, l'armée royaliste à laquelle appartient Chateaubriand assiège les troupes révolutionnaires à Thionville.] L'attaque...

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« François-René de CHATEAUBRIAND.

(Mémoires d'outre-tombe) [En 1792, l'armée royaliste à laquelle appartient Chateaubriand assiège les troupes révolutionnaires à Thionville.] L'attaque devint plus vive de notre côté.

C'était un beau spectacle la nuit : des pots-à-feu illuminaient les ouvrages de la place, couverts de soldats; des lueurs subites frappaient les nuages ou le zénith bleu, lorsqu'on mettait le feu aux canons, et les bombes, se croisant en l'air, décrivaient une parabole de lumière. Dans les intervalles des détonations, on entendait des roulements de tambour, des éclats de musique militaire, et la voix des factionnaires sur les remparts de Thionville et à nos postes ; malheureusement, ils criaient en français dans les deux camps : « Sentinelles, prenez garde à vous ! » Si les combats avaient lieu à l'aube, il arrivait que l'hymne de l'alouette succédait au bruit de la mousqueterie tandis que les canons qui ne tiraient plus, nous regardaient bouche béante silencieusement par les embrasures.

Le chant de l'oiseau, en rappelant les souvenirs de la vie pastorale, semblait faire un reproche aux hommes.

Il en était de même lorsque je rencontrais quelques tués parmi des champs de luzerne en fleurs, ou au bord d'un courant d'eau qui baignait la chevelure de ces morts.

Dans les bois, à quelques pas des violences de la guerre, je trouvais de petites statues des saints et de la Vierge.

Un chevrier, un pâtre, un mendiant portant besace, agenouillés devant ces pacificateurs, disaient leur chapelet au bruit lointain du canon. 1.

Pots-à-feu : récipients contenant des substances inflammables, destinés à l'éclairage. 2 Factionnaires : sentinelles. 3.

Mousqueterie : décharge d'armes à feu. Introduction - F.-R.

de Chateaubriand, qui dans ses Mémoires d'outre-tombe retrace les nombreux conflits politiques de son époque, de 1789 à 1848, fut particulièrement frappé par la guerre civile qui opposa les Français durant la Révolution.

Il participa ainsi en 1792 au siège de Thionville, en Moselle, car il avait rejoint l'armée des émigrés désireux de rétablir la monarchie. - Cet engagement politique n'aveugle cependant pas l'auteur sur les cruautés de la guerre.

En effet, sa description des combats montre que, sensible à la beauté qujoffre le spectacle des canonnades, il n'oublie pas celle de la nature où le conflit se déroule.

Et ce contraste provoque en lui une méditation désabusée. D'où les axes de réflexion suivants : I.

La beauté de la guerre et de la nature II.

Leur confrontation par une série de contrastes conduit à un jugement désabusé sur la guerre I.

La beauté de la guerre et de la nature A.

La beauté de la guerre 1.

« Un beau spectacle » - Cette expression introduit la description des combats nocturnes.

L'admiration de l'auteur peut surprendre, d'autant plus qu'il vient de préciser que le moment choisi se situe au plus fort de la violence : « L'attaque devint plus vive de notre côté.

» Soldat parmi les autres, Chateaubriand, au milieu de la peur et de l'horreur, reste un artiste sensible à l'esthétique ; il admire surtout les lumières et les bruits. 2.

Les lumières » Le contraste entre l'obscurité nocturne et les lumières du combat séduit l'auteur, dont le regard se porte de la terre au ciel, en suivant l'ordre chronologique des mises à feu : - la seconde phrase du texte se compose en effet de trois propositions indépendantes, juxtaposées ou coordonnées par « et ».

La première décrit les préparatifs sur la place, la seconde le départ des bombes, la troisième leur voyage dans le ciel ; - trois lumières différentes correspondent à ces étapes : l'éclairage constant des pots-àfeu sur la place, les « lueurs subites » de la mise à feu, les sillages entrecroisés des projectiles.

Ces lumières se détachent sur des fonds variés : la place remplie d'hommes, dont on devine les couleurs chaudes, les nuages ou le zénith allant du noir au bleu en passant par le blanc.

Chateaubriand assiste à un véritable feu d'artifice.

Les verbes « illuminaient » (l.

2), « frappaient » (l.

3), « se croisant » (l.

5), « décrivaient » (l.

5) montrent la variété du spectacle.

« Frappaient » et « se croisant » établissent une correspondance entre les lumières et le combat.

« Illuminaient », « décrivaient » insistent davantage sur la vision esthétique, car ces mots appartiennent aussi au vocabulaire de l'art. - Le rythme ternaire de cette phrase n'est pas un hasard.

Depuis l'Antiquité, les auteurs l'emploient parce qu'il symbolise l'équilibre, et permet une description ample qui rassemble des éléments différents ou traduit une progression. 3.

Les bruits - Ils sont eux aussi variés : « détonations », « roulements de tambour», «éclats» des autres instruments dont jouent les soldats chargés de stimuler leurs compagnons par la musique militaire (trompettes, cors...), voix des sentinelles. - Ils forment un orchestre symphonique : la détonation plus forte des bombes couvre par moments les autres mélodies.

Aux bruits d'un camp répondent ceux de l'autre camp. - Le rythme ternaire réapparaît avec les compléments du verbe « entendait » : aux trois lumières correspondent trois bruits, les roulements, les éclats et les voix (l.

6). B.

La beauté de la nature Il s'agit d'un paysage champêtre, où les hommes vivent et travaillent en harmonie avec la nature. 1.

Le paysage - On y retrouve les deux éléments précédents : La vision : en quelques mots, l'auteur peint un tableau coloré, avec le bleu des luzernes en fleurs (l.

17) et de la rivière (l.

18), les verts du « bois » (l.

19). Les bruits : « l'hymne de l'alouette » (l.

11), mentionné aussi comme « le chant de l'oiseau ».

Comme les bombes, ce volatile monte très haut dans le ciel puis redescend très vite, tout en chantant. - Souvent associée au matin, l'alouette a une valeur symbolique forte : elle est l'image du travailleur, et en particulier du laboureur, mais son vol particulier évoque aussi la joie, la prière pure qui s'élève vers Dieu. 2.

Les êtres humains I ,e chevrier, le pâtre, le.... »

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