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HORACE (Jout AU DÉBUT DJ; 1640), • Horace •, pièce « non dérobée »· - Corneille n'avait pas caché ce...

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« HORACE (Jout AU DÉBUT DJ; 1640), • Horace •, pièce « non dérobée »· - Corneille n'avait pas caché ce qu'il devait à Guilhem de Castro.

On ne lui avait pas célé non plus que c'était trop.

Sans doute, au xvne siècle, on ne se fait jamais scrupule d'emprunter.

Tous les sujets sont à tous. Mais Corneille n'avait pas seulement trouvé dans Guilhem de Castro son sujet ou des péripéties.

Il lui avait « dérobé » à peu près exactement tout le détail de son action.

Il voulut donc prouver qu'il était capable d'inventer.

Le sujet d'Horace avait bien été traité par Lope de Vega dans el Hanrado Hermano (le Frère jaloux de sa gloire).

Il est probable que Corneille a ignoré cette pièce.

S'il y a, entre Lope de Vega et Corneille, quelques points communs, ils s'expliquent ou par le hasard ou parce qu'ils les empruntent tous les deux à Tite-Live.

On a cru voir, par exeml;lle, dans les injures de la Julia de Lope de Ve ga à Horace l'origme des imprécations de Camille.

Or Petit de ju lleville a montré qu'elles étaient certainement un souvenir des imprécations de Massinisse dans la Sophonisbe de Mairet. Corneille n'emprunte donc son sujet qu'au récit de Tite­ Live et, peut-être, à celui de Plutarque dans sa Vlè de Tullus Hostilius.

Il leur doit, d'ailleurs, tous les personnages et toutes les péripéties essentielles : les Horaces, les Curiaces, les fian­ çailles de Curiace et de la sœur d'Horace, le combat, le meurtre de Camille, le jugement, les plaidoyers et l'acquittement.

Il n'a inventé que le personnage de Sabine et la fausse nouvelle de la fuite d'Horace par lâcheté.

Mais c'était là, pour un drama­ turge du xvne siècle, ce qu'on appelait inventer. (( Hol'ace•, pièce régulière.

- Que Corneille ait écrit Horace pour être d'accord avec les règles, c'est ce que prouvent, avec la lecture de la pièce, l'Examen de Corneille et le témoignage de l'abbé d'Aubtgnac.

Pour ne plus être en désaccord avec les tt doctes », l i voulut prendre leur avis.

Il lut sa pièce chez Boisro­ bert, à d'Aubignac, Chapelain, Barreau, Charpi, Faret et l'Estoile.

Les doctes firent quelques réserves, dont Corneille, fort têtu, ne tint pas compte, mais qui n'étaient pas essentielles. Plus de romanesque, en effet, dans Horace, plus de Maures, plus de duel, plus de combat singulier, plus de rencontres furtives d'amants que le devoir sépare.

La pièce est bâtie tout entière sur une guerre illustre, un combat et un meurtre que l'histoire attestent.

Sans doute, il y a encore un oracle qui joue sur les mots en prédisant à Camille qu'elle sera unie pour tou­ jours à son Cunacc...

dans le tombeau.

Mais cet oracle est une croyance romaine, et les oracles avec les songes sont restés une tradition et comme un accessoire m!cessaire de la tragédie classique. Surtout, HQTace témoigne d'un respect profond pour les « bienséances » et pour les règles. Presque tous les beaux esprits étaient tombés d'accord pour accuser Chimène de manquer à ces bienséances.

Une fille honnête ne doit pas s'entretenir avec le meurtrier de son père, même s'il est généreux et respectueux.

Elle ne doit pas accepter qu'un roi l'invite à pardonner et laisse entrevoir qu'elle épou­ sera Rodrigue.

Il n'y a pas, dans Horace·, de ces usubmissions » de l'honneur à la passion.

Il n'y a que des héros qui meurent ou qui triomphent.

Camille même, à sa façon, est toute vertu. Car elle n'hésite point entre Rome et son amour ; elle choisit délibérément, farouchement, son amour.

Si l'on estime que le choix est coupable, il est puni, puisqu'elle en meurt.

On ne discuta d'ailleurs ces « bienséances " que sur un r.oint.

Qu'un frère tue sa sœur par colère patriotique, c'est p osstble, et c'était «historique )), Mats il était immoral, contre la bienséance, qu'on mît ce fratricide sur la scène.

Chapelain s'en plaignait et d'Au­ bignac aurait voulu que, dans un mouvement de colère aveugle, Camille se jetât d'elle-même sur l'épée de son frère.

, vers trente ans souvent, où l'on se donne tout à Dieu et aux bonnes œuvres.

Polyeucte était comme un accommodement entre le « divertissement » et la retraite ; on n'aimait pas cet accommodement. « Pofyeucte •, tragédie de la • gr.tce • chrétienne. D'ail­ leurs Polyeucte n'était pas seulement l'histoire édifiante d'un martyr.

C'était, dans une certaine mesure, une tragédie théolo­ gique.

Corneille n'exaltait pas seulement l'héroïsme d'un chré­ tien qui sacrifie joyeusement à son Dieu tous les « attachements - de la chair et du monde n, y compris sa femme et sa vie.

Il y étudiait un problème mystique.

Polyeucte n'est pas chrétien au début de la pièce (il aurait pu l'être) : il le devient.

Et cet homme médiocre, qui ignorait le vrai Dieu, devient, d'un seul coup, plus grand que Sévère et Pauline, qui sont des héros selon le monde.

Comment donc se fait cette conversion ? Comment l'âme peut-elle se hausser si vite de la vie banale au sublime ? Corneille nous en a donné, tout au long de sa pièce, l'explica. tion.

C'est Dieu qui nous envoie sa grâce.

Quand on ne l'a pas, toute sagesse est vaine, toute énergie est stérile dans les « esprits que Dieu n'a pas encore touchés ».

Il envoie cette grâce où il veut et quand il veut : « Ce Dieu touche les cœurs ·lorsque moins on y pense.

» Avec son secours, toute vertu devient au contraire aisée, tout sacrifice joyeux.

Mais elle n'est pas un don perma­ nent et qui nous délivre du mal et de la lutte à tout jamais : sa grâce « ne descend pas toujours avec même efficace ».

Elle peut être (( par mille péchés sans cesse exténuée ».

Aussi bien, elle peut non seulement abandonner les justes, mais saisir et ravir d'un seul coup les plus misérables pécheurs.

Le bas et fourbe Félix deviendra brusquement un chrétien sincère et prêt au martyr comme la noble Pauline. Tout cela, c'était la doctrine chrétienne de la grâce, une des doctrines fondamentales de la religion, et l'une de celles dont on discutait âprement. C'est en effet à la date où Polyeucte fut rep résenté que com­ mence cette dure bataille du jansénisme qui allait, à propos de la grâce, déchirer pendant plus d'un sièc le l'Église franÇaise. L'Augustinus de Ja nsénius , où se précise la doctrine janséniste (164o),est édité en France (à Paris et à Rouen) en 1641.

Il est condamné par le pape la même année .

Il est très certain qu'on discutait un peu partout les problèmes que le livre posait, à la date où Corneille composait.... »

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