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I _ La comédie se distingue du genre tragique dans la mesure où elle ne représente plus des être royaux...

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« I _ La comédie se distingue du genre tragique dans la mesure où elle ne représente plus des être royaux ou divins, mais qu’elle s’attache au contraire à la représentation du monde populaire et bourgeois.

Historiquement, les époques fécondes pour le théâtre de comédie correspondent systématiquement à l’émergence de classes bourgeoises : celle d’Aristophane en Grèce, de Goldoni en Italie du nord, de Corneille en France... _ Bien plus, le personnage de comédie par excellence qu’est le valet répond à une problématique d’ascension sociale.

Arlequin, Sganarelle ou Scapin entreprennent au fond un même mouvement au sein de l’univers social modélisé qu’est l’intrigue de comédie : il s’agit d’un personnage plein de ressources mais roturier ; le héros de comédie trouve sa force dans sa capacité à changer de vêtement, en ce que ce dernier est censé désigner la position sociale de celui qui le porte.

Dans Le Barbier de Séville, Figaro excelle ainsi à endosser l’habit du comte Amalviva, et quoiqu’il n’agisse que dans le but de servir son maître, ce faisant il s’approprie un peu de son pouvoir, qui ira jusqu’à se retourner contre la volonté de ce dernier dans Le mariage de Figaro.

Le déguisement établit donc sur scène des rapports qui contournent ceux qu’impose la hiérarchie sociale. _L’acte de travestissement est ainsi porteur d’une réflexion d’abord descriptive qui répond aux habitudes sociales.

Ces dernières exigent de l’individu qu’il adopte des visages différends, qui dans la vie quotidienne n’ont rien d’un jeu, mais doivent devenir la véritable peau de tout un chacun.

La comédie présente le même phénomène, mais sur un mode absolument positif : jamais le valet ne souffre de la transformation de son apparence, qui fait au contraire sa joie.

Au déguisement pesant de la bienséance, la comédie oppose un travestissement joyeux, un plaisir ludique du changement de forme par lequel le transfuge social découvre l’étendue de son pouvoir naissant. II _ Cet enjeu social du déguisement trouve un médium particulièrement fécond dans l’art de la scène, puisqu’il se double alors d’une nécessité à demi formelle : les personnages de théâtre ne sont pas des êtres en soi, mais des fonctions, les pures expressions de rapports de force manifestés par le dispositif scénique.

Ils peuvent donc changer d’apparence et même d’identité sans modifier la structure des situations, et sont bien souvent tenus de le faire, étant donné les moyens financiers du théâtre en général : chaque comédien joue assume plusieurs rôles au sein d’une même pièce.

Le texte luimême réalise la même économie : un même personnage incarne un ensemble de forces, sociales certes, mais aussi psychologiques, morales et plastiques.

La Commedia dell’arte s’avère particulièrement révélatrice de ce processus, puisqu’elle se limite à une douzaine de personnages, toujours les mêmes, présents dans chaque comédie.

Le masque porté réduit (ou élargit) l’identité de l’acteur jusqu’à en faire le représentant d’un caractère ou d’une fonction particulière.

Ainsi la figure du Capitan est reconnaissable à son nez proéminent, sa moustache en bataille, son torse bombé et son accent espagnol.

Chacun de ces traits de déguisement ouvre la personnalité de l’individu sur scène vers des données extrascéniques.

Ainsi, l’accent espagnol évoque les fantassins de l’armée de Charles Quint, présents dans tous les pays d’Europe au XVIe siècle.

A cette fonction réaliste, l’attitude du capitan rattache des données psychologiques que sont l’autosatisfaction, la fanfaronnade et la vanité, sur laquelle vient encore se greffer un jugement moral qu’est l’accusation de ridicule.

Le déguisement n’est jamais indifférent : il désigne, il signifie. _ En ce sens, le travestissement du personnage ne dissimule pas tant l’acteur au public qu’il ne révèle le public à lui-même.

Le propension au déguisement du personnage de comédie apparaît comme nécessaire par rapport à la situation formelle que créé la représentation théâtrale, en ce qu’elle produit un phénomène de théâtre dans le théâtre. Chaque scène déguisée reproduit l’expérience d’Hamlet, puisqu’elle donne à voir au spectateur une situation dans laquelle l’acteur se fait passer pour ce qu’il n’est pas auprès de son interlocuteur immédiat, tout en prenant un.... »

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