I Tout roman est initiatique _Le roman est en soi narration, c’est-à-dire qu’il est le récit créé par le regard...
Extrait du document
«
I Tout roman est initiatique
_Le roman est en soi narration, c’est-à-dire qu’il est le récit créé par le regard d’un
personnage, assimilable ou non à l’auteur, porté sur un monde réel ou fictif.
De ce point
de vue, l’aspect conflictuel du personnage avec les choses et les hommes s’avère être une
véritable nécessité.
L’Education sentimentale de Flaubert représente de ce point de vue un
cas limite, puisque la particularité de son héros, Frédéric Moreau, est se trouver
systématiquement extérieur aux conflits qui mènent le roman (la révolution de 1848) et
de ne jamais prendre part à une action qui se trouve dès lors décrite par des simples
détails, et existe dans une sorte de hors-texte.
Mais la position de retrait de Frédéric est
elle-même réaction à une situation de conflit.
_L’idée de « perspective » développée par Alain apparaît plus indispensable encore à la
forme romanesque que cette dichotomie entre énonciateur et énoncé, puisqu’elle décrit
une propriété apparemment indispensable de l’écriture : la progression linéaire.
Quand
bien même un auteur aurait le projet de composer son roman à la manière d’un tableau,
dont tous les éléments seraient perceptibles d’un même coup d’œil, la forme même des
règles d’écriture le forcerait à faire apparaître sa fresque dans une logique de progression,
de dévoilement.
Toute narration se construit bien « à mesure qu’elle avance ».
_Etant donnée cette structure, la vertu la plus immédiate et la plus incontestable du roman
tient à sa fonction initiatique, au sein de laquelle narrateur, auteur et lecteur participent à
une expérience de découverte, que chacun mène sur le plan auquel il appartient (plan
fictionnel, plan de l’écriture, plan réel) tout en se nourrissant des expériences acquises par
les deux autres.
C’est sur un tel principe que l’écrivain Hermann Hesse construit l’ensemble
de son œuvre, dont l’enjeu est l’accession du personnage décrit, mais aussi de lui-même
et du lecteur, à un mode d’existence dans lequel le conflit entre percepteur et chose perçue
perd sa raison d’être.
II Le roman, un système libre
_A sa naissance, le roman (œuvre de langue « romane ») est bien le récit d’une figure
héroïque en conflit avec une situation littéraire, mais les avatars du conflit sont si variables
qu’il semble difficile de réduire le phénomène romanesque à une intrigue du base, qui
serait la lutte d’un individu contre un univers qui lui résisterait.
Ainsi, les premiers textes
« romans », tels que La Mort le roi Artus (roman anonyme) sont des récits sans héros
principal, sans unité d’action ni de point de vue.
La narration saute librement d’un
personnage, d’une action, d’une idée à l’autre.
Le premier élément d’une définition du
genre romanesque est sa très grande liberté formelle.
_Dès lors, de quel droit le critique littéraire se peut-il choisir un type d’intrigue, pour en
faire le modèle de tout roman ? Ici, la pensée d’Alain se clarifie si on la met en perspective
de celle de James Joyce, telle qu’il la met en pratique dans Ulysse.
La structure d’un roman
ne tient pas aux avatars décrits (tel héros plutôt que tel autre), mais à leur manière d’agir
au sein du récit.
il est ainsi possible de réduire les éléments qui composent le roman à
quelques fonction, toutes articulées autour de la quête du héros.
La critique formaliste
obtient ainsi un petit nombre de situation-types, dont chacune peut se rattacher à une
configuration de l’affrontement entre le narrateur et la chose décrite, quand bien même
cet affrontement ne prend pas la forme d’un conflit.
_Le roman est un mouvement qui peut se définir comme celui d’une échappée volontaire
hors de ses propres....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓