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Introduction : Lorsque les Cahiers de la Télévision publièrent leur premier numéro au début de 1963, le directeur de la...

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« Introduction : Lorsque les Cahiers de la Télévision publièrent leur premier numéro au début de 1963, le directeur de la Radio-Télévision Française déclara au cours d'une interview accordée à cette revue : « La Télévision doit être populaire et audacieuse — le contraire d'un art bourgeois.

» De fait, la télévision s'adresse — uniquement en France — à plus de douze millions de téléspectateurs ; il existe en France plus de trois millions et demi de téléviseurs, contre dix millions en Angleterre, et près de dix fois plus aux EtatsUnis d'Amérique.

C'est donc un phénomène d'une importance sociale considérable, que l'on ne saurait surestimer : c'est le premier des modes d'information ; mais, à la manière de la langue d'Esope, et si l'on se réfère à l'échelle chronologique, ne pourrait-on pas dire aussi qu'elle est la dernière des techniques informatives (la dernière en date en tout cas) ? Le problème se pose de savoir si, en définitive, la télévision comporte plus d'inconvénients que d'avantages, ou si il ne serait pas préférable, par une sorte de décret, de diktat ou d'ukase, de détruire entièrement tous les postes de télévision sans aucune exception. I.

La télévision, moyen idéal d'informer le monde. 1.

La T.V.

comme «mol oreiller».

« Il faut suivre sa pente...

Or le défaut naturel de l'esprit humain, c'est la paresse il ne faut pas s'étonner si le succès de la télévision l'emporte de beaucoup sur celui des journaux, sur la radio-diffusion, sut les actualités cinématographiques, bref, sur toutes les autre techniques informatives, puisqu'il suffit de rester chez soi au coin du feu, et d'ouvrir les yeux, pour être informé, sans se déplacer, sans se fatiguer, sans le moindre effort.

La primauté de la télévision, c'est d'abord et avant tout la loi du moindre effort et la priorité de la commodité pratique. 2.

La T.V., journal éclair de l'homme moderne.

Source d'information permanente, le journal télévisé nous offre non pas à la minute même, mais avec un décalage d'une demi-journée, des nouvelles beaucoup plus fraîches que les actualités filmées, puisque ces dernières datent toujours au moins d'une semaine ; même le journal imprimé ne peut nous donner des nouvelles qu'avec environ vingt-quatre heures de décalage (au mieux, nous aurons douze heures d'attente).

En revanche, on peut arrêter une émission de télévision pour intercaler une nouvelle de grande importance et d'une brûlante actualité. 3, La T.V.

comme mode d'information universel.

Tandis que chaque radio nationale, nous offre des émissions dans une langue particulière qui ne sera par définition comprise Que par un groupe ethnique bien déterminé, la télévision, elle, est comme l'espéranto, l'ido et le volapuc, une langue universelle nécessairement comprise par tous les individus appartenant à tous les pays possibles et imaginables.

On peut ne pas comprendre un texte, une phrase, une parole, mais l'on comprend toujours et nécessairement une image ; or, l'information télévisée ne consiste-t-elle pas essentiellement dans une émission d'images dont le niveau est parfois trop élémentaire, mais à qui l'on ne saurait reprocher la moindre difficulté de compréhension ? II.

La télévision comme « maîtresse d'erreurs et de fausseté ». 1.

Information ou propagande? Ce qu'on peut reprocher avant tout à la T.V., particulièrement à la T.V.

française, c'est d'être un mode d'information gouvernemental. Etant entre les mains d'un gouvernement, ce mode d'information ne dispose plus de la liberté nécessaire au journaliste indépendant.

L'objectivité est liée à la liberté : pourtant on ne peut guère s'attendre à ce qu'un Etat laisse dire du mal de soi-même sur les antennes de ses propres émetteurs.

Mais aussi, à partir du moment où l'on veut prouver que l'on a raison, on perd le sens de cette « liberté de blâmer », sans laquelle « il n'est pas d'éloge flatteur », comme nous le rappelle fort opportunément tel quotidien du matin, après Beaumarchais. 2 Démocratie et démagogie.

Etant donné le public de masse de la télévision, les organisateurs de programmes et les « donneurs de nouvelles » se trouvent obligés d'abaisser de plus en plus le niveau de l'information au point de déformer la vérité en la grossissant pour la rendre intelligible à ceux qui ne l'entendraient pas dans son authenticité pure.

D'où les entorses faites à une information honnête et rigoureuse au profit d'une démagogie progressive tendant à privilégier le règne des images par rapport à des communiqués écrits, nécessairement plus abstraits.

De flash en flash, le journal télévisé descend vers le dessin animé au lieu de se maintenir au niveau d'un quotidien soucieux de sa dignité. 3.

Information partiale ou politique partisane ? Le parti au pouvoir use et» abuse d'une télévision dont Pierre Lazareff a dit que son « énorme force de frappe » la rendait omnipotente dans le pays qui s'en sert.

On peut réunir tous les organes de presse, mobiliser toutes les radios, grouper les meilleurs journalistes pour essayer de leur faire exprimer la vérité absolue — si la télévision intervient, seule contre tous les autres modes d'information, elle est d'avance certaine de triompher.

Il est à redouter que cet effrayant pouvoir ne soit largement utilisé par les gouvernements pour façonner les esprits, manigancer les âmes, fabriquer une opinion publique sur mesure.

Les sujets d'un 'Etat sont devenus des objets passifs, des « moutons de Panurge » prêts à avaler sans difficulté tout ce qu'on veut leur faire ingurgiter : 'leur sujétion à l'endroit du Pouvoir est telle qu'ils renoncent à la fois à leur liberté individuelle, à une vérité générale et à.... »

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