Iran 1994-1995 Recomposition politique du régime L'année 1994-1995 a été dominée par la mort de que...
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Iran 1994-1995
Recomposition politique du régime
L'année 1994-1995 a été dominée par la mort de quelques figures éminentes du
régime, du clergé et de l'élite intellectuelle.
Ces disparitions ont été autant
d'opportunités d'une recomposition implicite des équilibres constitutifs de
l'État, seize ans après la révolution islamique.
Le 29 novembre 1994, est décédé l'ayatollah Mohammad Ali Araki, dernière grande
"source d'imitation" (mardja), reconnue par la haute hiérarchie chiite
iranienne.
Le "guide de la Révolution", Ali Khamenei, a été désigné comme l'un
de ses successeurs mais cette promotion n'a pas pour autant assuré sa primauté
absolue sur le champ religieux; sur la scène officielle il est flanqué de six
autres sources d'imitation, toutes sont issues de courants cléricaux ne
participant pas aux jeux du pouvoir.
A.
Khamenei n'a d'ailleurs pas accédé au
rang le plus éminent de la dignité théologique, celui d'aslah, et sa désignation
visait surtout à garantir la prééminence de l'Iran sur la communauté des
croyants chiites à l'étranger.
Ce renouvellement de la haute hiérarchie cléricale avait ainsi trait au rôle
international de la République islamique, mais également à son évolution
interne.
D'une part, les modalités de la désignation d'Ali Khamenei ont consacré
la dissociation des champs du religieux et du politique, d'autre part, elles ont
eu pour enjeu - non négligeable - le contrôle des flux financiers que canalisent
les principales autorités religieuses et les grands sanctuaires.
Ces péripéties n'ont pas confirmé l'hypothèse souvent avancée d'une rivalité
impitoyable entre A.
Khamenei et Hashemi Rafsandjani, le président de la
République, ou celle de la perte d'influence de ce dernier.
En réalité, le
pouvoir demeure partagé entre plusieurs réseaux potentiellement concurrents,
notamment dans le domaine économique, mais qui sont profondément solidaires.
La
diversité des centres de pouvoir s'est trouvée illustrée par le vote, le 25
décembre 1994, d'une loi interdisant les antennes paraboliques à l'initiative
d'Ali Becharati, le ministre de l'Intérieur.
Cette mesure, jugée
anticonstitutionnelle, a été dans un premier temps annulée par le Conseil de la
surveillance, avant d'être finalement approuvée, le 11 janvier 1995.
Mais son
application promettait d'être délicate du fait, entre autres, de l'inviolabilité
des domiciles privés dans la société iranienne.
La polémique qui s'en est
ensuivie dans les journaux a montré les contradictions et les limites du
contrôle social qu'implique la lutte contre l'"agression culturelle" de
l'Occident.
La recomposition progressive du régime s'est vue accélérée par la mort, le 20
janvier 1995, du leader du Mouvement national de libération (fondé en 1961),
Mehdi Bazargan, dont les funérailles ont donné lieu à des manifestations en
faveur d'une plus grande liberté.
De même, la condamnation de l'écrivain Saidi
Sirdjani a incité 134 intellectuels à défendre les droits de leur profession
sous la forme d'une lettre ouverte (Saidi Sirdjani mourra en résidence
surveillée le 27 novembre 1994).
Et en septembre 1994, le général Amir
Amir-Rahimi, condamnant les exécutions sommaires, a demandé la constitution
d'"un gouvernement d'union nationale".
Ces revendications rejoignaient de
nombreuses initiatives du même ordre, mais plus discrètes, dont rend compte
régulièrement une presse passablement diversifiée.
Face à ce bouillonnement
intellectuel et culturel, le pouvoir est apparu hésiter entre dialogue et
répression.
En revanche, la mort, en mars 1995, d'Ahmad Khomeyni, le fils de l'imam Ruhollah
Khomeyni - lui-même décédé en 1989 -, qui pouvait se targuer d'un certain
monopole de l'interprétation de la pensée de celui-ci, a semblé avoir tourné une
page de l'histoire de la République islamique en privant le courant populiste de
son principal symbole.
La ferveur populaire qui a entouré ses funérailles a
montré que le souvenir de la Révolution ne s'était pas complètement évanoui.
Mais l'opinion publique semblait se préoccuper davantage de la dégradation des
conditions de vie.
Dès lors, il est apparu que la préparation des élections
présidentielles de 1996, auxquelles Hashemi Rafsandjani ne pourra pas se
représenter, serait vraisemblablement dominée par la rivalité entre les
conservateurs, menés par le président du Parlement, Ahmad Nategh Nouri, et les
"gestionnaires", dont Gholam-Hossein Karbastchi, le maire de Téhéran, Ali Akbar
Velayati, le ministre des Affaires étrangères, Hassan Rohani, le responsable de
la Sécurité nationale, ou encore Mostafa Mir-Salim, le ministre de la Culture et
de la Guidance islamique, pourraient être le porte-parole.
Les équilibres factionnels ne peuvent être séparés d'évolutions sociales plus
profondes.
Le régime traverse....
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