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Italie (1981-1982): La fin de l'après guerre L'année 1981 ne semble pas très différente des précédentes. L'euphorie liée à la...

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« Italie (1981-1982): La fin de l'après guerre L'année 1981 ne semble pas très différente des précédentes.

L'euphorie liée à la victoire des socialistes français a rapidement disparu, étouffée par la somnolence et le climat menaçant, caractéristique de la vie nationale. L'arrogance du pouvoir - le "Palais", comme l'appellent les éditorialistes en vue - se manifeste toujours: les pires scandales n'arrivent même pas à effleurer les équilibres de pouvoir et les mafias consolidées au sein des structures économiques et politiques. Contrairement à l'année précédente cependant, 1981 ne pourra pas profiter des vagues d'émotion et des sursauts de solidarité nationale sur le thème de la patrie en danger.

Cette unité patriotique était traditionnellement obtenue par l'exploitation habile des cataclysmes naturels désormais classiques qui, par le passé, ont sauvé nombre de gouvernements et enrichi notables et mafiosi. La vie politique Une année "laïque", qui aura vu, en juin, la nomination de Giovanni Spadolini, secrétaire du Parti républicain, à la Présidence du Conseil, en mai, la défaite des catholiques intransigeants dans le référendum sur l'avortement et, le 21 juin, un net succès du PSI aux élections administratives (la Démocratie-chrétienne perd un peu partout, le PCI reste stable).

Globalement, les partis "laïques" (PSI, PSDI, PRI, PLI) obtiennent 26,4% des voix, le PCI, 27,4% et la DC, 35,5%. 1981 aura été l'année de l'irrésistible ascension du Parti socialiste et de son dynamique secrétaire, Bettino Craxi.

Chez les communistes: brouilles de famille. Querelles sur l'affaire polonaise entre pro-soviétiques (comme Cossutta) et "autonomistes".

La polémique prendra ses accents les plus dramatiques en janvier 1982, quand le Parti communiste d'Union soviétique (PCUS) décrétera que les dirigeants du Parti italien ne sont plus communistes.

Vives réactions à la base. Culture nationale En avril, l'affaire de la loge maçonnique secrète - dite P2 - devient si importante que le terrorisme passe au second plan.

Même si elle prend une importance particulière en 1981, cette affaire n'est pas un produit typique de l'année.

Elle a son origine, sur le plan judiciaire, dans les scandales et les mystérieux assassinats qui ont eu lieu les années précédentes.

En avril donc, de longues listes comprenant des centaines de noms (plus de huit cents, dit-on) de diverses personnalités appartenant au monde de la haute finance, de la magistrature, du gouvernement, des forces armées et de l'industrie privée et d'État, commencent à circuler entre les mains des magistrats chargés de l'enquête.

Licio Gelli, individu jusqu'alors inconnu de l'opinion publique, se révèle être celui qui tire les ficelles de ce qui sera nommé le "plus puissant centre de pouvoir occulte italien".

Ce personnage que l'on découvre extrêmement puissant, se trouve, depuis 1971, au centre d'obscurs complots, d'étranges jeux de pouvoir et histoires de chantage.

Lui, qui caressait des projets de "restructuration constitutionnelle" pour transformer la république parlementaire en une sorte de république présidentielle inventée par lui-même, était mêlé comme témoin à l'enquête sur le massacre fasciste provoqué par la bombe sur le train Italicus à Bologne en août 1974.

Il a cependant réussi à échapper à cette enquête grâce à la complicité d'un magistrat (chargé de l'enquête), mari de sa fille. L'enquête établira des liens précis entre les plus grands scandales de l'année et ceux des années précédentes (l'affaire Pecorelli, l'escroquerie sur les importations de pétrole dont le responsable est un général du corps des Finances, la banqueroute de Michele Sindona, etc.) et l'affaire P2.

Au point qu'on ne parlera plus qu'en termes généraux de "P2" pour se référer à l'ensemble des autres scandales.

Les plus grands dirigeants politiques y sont de fait mêlés, dont Andreotti et Fanfani qui ont fait plus qu'il ne fallait pour sauver leur ami Sindona, tout le staff dirigeant de la super-escroquerie sur les pétroles (plusieurs milliers de milliards de lires), un nombre invraisemblable de parlementaires, de professeurs universitaires, de journalistes éditeurs de journaux, sans oublier une belle brochette de militaires.

Dans la seule arme des carabiniers, étaient impliqués 17 capitaines, 3 majors, 23 colonels et 9 généraux dont un fameux: Carlo Alberto Dalla Chiesa, champion de la lutte contre le terrorisme, qui affirmera être entré dans la P2 pour espionner les autres.

Il faut encore citer 17 généraux d'armée, 4 du corps des Finances, 4 de l'armée de l'air et 8 amiraux.

Tous, ou presque, resteront à leurs postes. Mais la chose devient particulièrement piquante quand, apparaît d'abord discrètement, le nom de Roberto Calvi.

Ce dernier sera arrêté le 20 mai pour exportation clandestine de capitaux.

A ce moment seulement, l'opinion publique découvrira que cet homme très puissant a fait en dix ans une carrière extrêmement rapide grâce à certains de ses amis, comme le sicilien Michele Sindona et les "frères" de la loge P2.

1975 est son année décisive: il a réussi alors à survivre à la banqueroute boursière et à la disparition du sicilien et remplace ce dernier dans ses rapports avec l'Institut des œuvres de la Religion (IOR), dirigé par le dynamique Paul Marcinkus, le monseigneur de Chicago responsable des finances vaticanes.

Faits pour s'entendre, les deux hommes commencent à lancer des opérations sur le marché financier international. Leur activité ne se limitait cependant pas à de mystérieuses et audacieuses opérations financières.

Citons un seul exemple: la presse d'information.

Au début mai, Bruno Tassan Din, directeur général de la Rizzoli (l'un des plus grands empires éditoriaux italiens), conclut une opération qui, selon lui, a coûté trois ans de travail: faire acheter 40% du Corriere della Sera (le plus prestigieux quotidien italien) par Roberto Calvi.

L'opération terminée, il reçoit les applaudissements unanimes de toute la classe politique, le président Pertini en tête et la direction du PCI inclue. Cette opération d'"assainissement" du titre milanais semble donc être menée à bien lorsque Calvi est mis en prison et qu'on découvre que Tassan Din, Angelo Rizzoli (le patron), et trois directeurs des journaux du groupe (dont Di Bella, directeur du Corriere della Sera) sont depuis longtemps membres actifs de la P2. Il ne faut toutefois pas s'alarmer.

Le seul à en essuyer une quelconque retombée sera Di Bella qui se voit obligé de démissionner de l'assemblée des rédacteurs du journal.

Après avoir été condamné à quatre ans de prison, Calvi sera, lui, mis en liberté (surveillée?) après une étrange tentative de suicide et pourra ainsi réintégrer son poste immédiatement. Chronique du terrorisme Le sens du ridicule et un trait d'ironie envers soi-même ont toujours été les principales caractéristiques de l'Italien qui se veut intelligent.

Sans se laisser enfermer dans la bouffonnerie ou la bêtise, sans devenir une forme caricaturale d'une méditerranéité disparue comme culture et restituée comme folklore, l'Italien intelligent évite de se prendre pour ce qu'il n'est pas, tout en cherchant la voie de nouveaux comportements.

Ce n'est évidemment pas le cas de la classe politique italienne et de tous ces dirigeants - qu'ils soient au pouvoir ou dans l'opposition - qui rêvent de construire le énième "État fort". Ainsi, au début de l'année 1981, le débat grotesque sur négocier ou non avec les Brigades rouges, sur la signification de la vie humaine opposée à la dignité de l'État et, du côté "terroriste", sur se prendre au sérieux (c'est-à-dire comment être capables d'exercer des formes réelles, et non seulement formelles, de chantage), a une fois encore, un air sinistre qui, peu à peu, se transforme en farce tragique à la fin de l'année. Les Brigades Rouges (BR) commencent cette année décisive avec une action d'éclat: l'enlèvement du juge Giovanni d'Urso, principal responsable de la gestion du transfert de prisonniers dans les pénitenciers de la péninsule.

Une victoire partielle: la fermeture de la prison spéciale d'Asinara (que les autorités affirmeront avoir programmée depuis longtemps) et, le 15 janvier, la libération surprise du magistrat séquestré depuis 33 jours.

Le juge, condamné à mort par les BR, sera libéré grâce à plusieurs facteurs: l'action du journal Messaggero de Rome, le seul qui ait osé rompre le silence de la presse, la frénétique activité du Parti radical et la position en faveur de la libération du juge adoptée par les détenus des prisons spéciales de Palmi et de Trani. C'est Bruno Tassan Din de la P2 qui exigera des journaux du groupe Rizzoli un black-out complet sur le terrorisme.

Le premier à accepter cette injonction est Di Bella, du Corriere della Sera, dont l'exemple sera rapidement imité par presque tous les journaux de la péninsule.

Comme à l'époque de l'enlèvement d'Aldo Moro, le pays se divise en faucons et colombes, ou, pour citer Bettino Craxi, le dirigeant toujours plus dynamique du Parti socialiste, en colombes et faucons empaillés, "capitaines courageux avec la peau des autres".

La classe politique continuera en définitive à donner d'elle-même son image habituelle de stupidité.... »

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