Italie 1986-1987: Bras de fer entre socialistes et démocrates-chrétiens Si la crise politique ouverte le 3 mars par la démission...
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Italie 1986-1987: Bras de fer entre socialistes et démocrates-chrétiens
Si la crise politique ouverte le 3 mars par la démission du gouvernement Craxi a
entièrement occupé l'actualité italienne au printemps 1987, ce sont surtout des
problèmes de société qui ont marqué l'année 1986.
Avant même la reprise des attentats terroristes, en février et mars 1987, le
débat entre "garantistes" et "répressifs" était relancé par les libérations de
prisonniers, conséquence des limites imposées par la loi de 1984 à la détention
jusqu'au jugement final (six ans) et par l'utilisation des "repentis" dans les
procès criminels.
Autre sujet de polémique: l'introduction du principe de la
responsabilité civile des magistrats, qui a fait l'objet à la fois d'une demande
de référendum et d'un projet de loi.
Enfin, la mobilisation d'une opinion
publique traumatisée par la catastrophe de Tchernobyl (26 avril 1986) a assuré
le succès des promoteurs des référendums anti-nucléaires (un million de
signatures recueillies en quelques semaines) et des manifestations contre la
construction de nouvelles centrales prévue par le plan énergétique.
L'ampleur de
la protestation a d'ailleurs incité les partis communiste (PCI) et socialiste
(PSI), initialement favorables au renforcement du potentiel nucléaire italien qui ne représente que 2% des ressources énergétiques -, à inverser leur
position.
Climat social agité
En dehors de ces problèmes généraux, des poussées catégorielles dont la classe
moyenne plus que la classe ouvrière a été la protagoniste, ont détérioré le
climat social.
En s'opposant au projet de loi Falcucci-Covatta sur l'autonomie
des universités, lycéens et étudiants ont voulu signifier que dans un pays où le
chômage frappe plus de deux millions de jeunes, toute restriction à l'accès au
savoir était insupportable.
Insupportable aussi, pour les contribuables, le
poids, la complication et l'injustice du système fiscal si l'on en juge par le
succès de la marche antifisc organisée à Turin par le Mouvement pour la
libération fiscale (23 novembre 1986).
Ainsi, en 1986, marches, mouvements de rue, grèves à répétition, généralement
sous l'égide d'organisations spontanées, sont devenus l'expression du
mécontentement de nombreuses catégories de "cols blancs": enseignants, médecins,
officiers, transporteurs routiers etc.
Leur protestation a été motivée par la
diminution parfois importante de leur pouvoir d'achat au cours de quinze années
marquées par l'idéologie égalitariste des syndicats ouvriers, et plus encore par
la dépréciation de leur valeur professionnelle et la crise de leur secteur
d'activité.
Les syndicats ont d'ailleurs compris la nécessité de repenser leur
rôle et leur stratégie en fonction des changements intervenus dans la structure
sociale et économique du pays.
Flexibilité, reconnaissance de la
professionnalité, fin des automatismes - celui de l'ancienneté après celui de
l'échelle mobile - ont été les axes de leur action, facilitée en 1986 par les
bons résultats économiques.
La baisse de l'inflation (-2,7%), la croissance du PNB (+2,7%) et une nette
amélioration des comptes extérieurs grâce à la baisse concomitante du prix du
pétrole et du dollar, témoignent de la réussite de l'Italie qui a dépassé le
Royaume-Uni et est devenue la cinquième puissance industrielle mondiale.
L'augmentation du taux de profit des entreprises et l'internationalisation sont
les aspects les plus importants de cette réussite.
Le cas type est celui de FIAT
qui a doublé ses bénéfices, s'est assuré le contrôle de 54,3% du marché
automobile italien et de 12,7% du marché européen et qui, en 1986, a mené à bien
deux grandes opérations: le rachat de 15% d'actions détenues par la Libye et la
reprise d'Alfa-Romeo.
De plus, les capitaux italiens ont fait une entrée massive
dans les grandes affaires américaines et européennes - en particulier françaises
(Matra, Valeo, Saint-Laurent, Beghin Say, la cinquième chaîne de télévision,
etc.).
Une majorité introuvable
Ces succès économiques contrastent avec les graves perturbations de la vie
politique.
En 1986, les dissensions habituelles d'une majorité hétérogène ont
été considérablement accrues par l'approche du terme de la législature (1988).
Aux désaccords sur les problèmes de fond s'est ajoutée l'exaspération de la
lutte pour le pouvoir entre démocrates-chrétiens (DC) et socialistes.
Parti le
plus puissant de la majorité (33% des suffrages), la DC estimait avoir le droit
naturel d'en assumer la direction.
Elle a d'autant plus mal supporté
l'exceptionnelle longévité du gouvernement Craxi (en place depuis août 1983),
qu'elle a constaté avec inquiétude la popularité croissante du leader socialiste
et la tendance de ce dernier à utiliser son "pouvoir de coalition" pour lier la
permanence de la majorité à celle de la présidence socialiste.
Elle a donc
réclamé avec insistance une alternance à la tête du gouvernement, qui devait lui
permettre d'aborder la période électorale avec un président du Conseil sorti de
ses rangs.
De son côté, Bettino Craxi n'a jamais caché son intention de bouleverser le
système de "bipartisme imparfait" que la présence conjointe d'un parti
catholique et d'un parti communiste, forts chacun d'un tiers des suffrages, a
imposé à l'Italie.
Il lui fallait pour cela, d'une part, assurer à son parti une
liberté d'action aussi large que possible et, d'autre part, obtenir une
affirmation électorale que le pays ne lui avait encore jamais accordée.
Le
premier objectif explique son refus, en mars 1987, d'exécuter l'accord....
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