]. J . - R0 U S S E A U LA NOUVELLE HÉLOÏSE (p:ntics IV-VI composées de 1756 à...
Extrait du document
«
].
J .
-
R0 U S S E A U
LA NOUVELLE HÉLOÏSE (p:ntics IV-VI composées de 1756 à 1758;
publiées eu 1761).
f:�m.u (livres II et III, composés de 1754 à 176o; publi�s eu 1762).
LA NOUVELLE HÉLOÏSE
Pourquoi Rousseau a écrit son roman.
Rousseau s'était
déclaré, dans des ouvrages retentissants, L'adversaire de la litté
rature.
Or, de tous les genres littéraires ceux qui avaient été
le plus violemment dénoncés comme dangereux, bien avant
Rousseau, c'étaient le théâtre et le roman.
Pour quelle raison
profonde Jean-Jacques Rousseau s'est-il donc contredit en
écrivant un roman qui, dans sa première moitié, est un roman
de passion ?
-
ANALYSE DES PARTIF.S l-Ill.
- U11 fetme t'Oturier, Saint-Preux, est
deuem•, sa11S d'ailleurs qrérénumt, el finit par écrire pou� déclarer sa pass·ion.
L6
mariage est impossible, cM famais M.
d' Étanges 11e donnera sa fille
à wt rnturicr.
julie se lait do1tc, d'abord.
Puis, comme Saiut-Preu.•
menace de se tuer, elle avoue qu'elle l'aime comme elle est «iméc.
Des
da11gers redoutables me•u•cent le11r uuio11.
On soupçonne l'amour et les
rendez-vous.
Le phe tk Julie, d'abord absent au début du roman, est
revenu.
Une amie tk Julie, Claire d'Orbe, • l'inséparable •, obtùnt de
Sailli-Preux qu'il quitte la Suisse et suive son ami, tm Anglais, milord
Édottard.
Sai11J-Preux s'installe à Paris, dont il décrit les mœurs, les
tra:·us el les vices.
Cependa11t i'Yf.
d' Élanges a promis la mai11 de sa
fille tlttn de ses amis, M.
de JVolmar, beaucoup plus âgé qt•'elle.
Malgré
sa rtlsistaucc, Julie doit céder ; ullc sc marie.
Sa·int-Preux désespéré
part faire le tol4r du mo11de.
p
E
C'est une histoire d'amour violente, pathétique, dangereuse.
Mais Rousseau ne l'a pas tout de suite écrite pour le public.
Ce n'était qu'un rêve.
Il avait quitté Paris en 1 7 5 6, renonçant
désormais au monde, au luxe, et, croyait-il, à la gloire.
Il s'était
installé à l'Ermitage, au
milieu des bois C'était le printemps ;
tout fleurissait dans les sentiers.
Et des rêves passionnés s'ébau·
chaient dans son âme.
Il n'avait jamais été vraiment aimé.
Il
avait quarante-quatre ans ; il était trop tard pour qu'il rencon·
trât la réalité de l'amour.
Il voulut goûter du moins ses chi·
meres, et il écrivit pour lui, dans les bois, parmi les soufBes
du printemps, les lettres de Julie et de Saint-Preux.
Seulement,
Je hasard jeta dans sa vie une Julie : Mme d'Houdetot, une amie
de Mme d'Épi nay, fut conduite chez lui par un accident de
voiture.
Il la revtt ; elle n'était pas belle ; mais elle était char
mante et aimable infiniment.
Il se prit pour elle d'une passion
dévorante et sans espoir, car elle en aimait un autre, Je marquis
de Saint-Lambert, fidèlement.
Il lui dit pourtant qu'il l'aimait ;
il s'eqivra de Slt pr�ence et de son amitié compatissante jusqu'au
jour où Mme cl 'Houdetot se lassa, où Mme d'Epinay fut jalouse,
où une querelle retentissante Je chassa de l'Ermitage et le
sépara de sa bien-aimée.
En aimant sans espoir, Jean-Jacques avait tenté de dopner
le change à sa passion.
Il croyait d'ailleurs sincèrement que le
véritable amour est un principe de générosité, de sacrifice et
de vertu.
C'est de vertu qu'il s'entfetint donc llVCC « Sophie »,
avec Mme d'Houdetot.
C'est pour eda que le roman de passion
entre Julie et Saint-Preux s'acheva dans un roman de devoir et
de renoncement.
.
ANALYSE DES PARTIES IV-VI.
- fJuaJre attS ont passé.
Julie marit�
est mtre de deux �nfants
et n'est pas
ncalhettrettse.
M.
de Wolmar est
intellige�rt et bon ; c'est 1111 sage i11dt1/genl et c-lairvoyant.
Cependant
Sai11t-Pretu a achevé le to·ur du monde.
/)'accord avec son mari, Julie,
qui se croit guérie de sa passion, le prie de faire l'éducaJion de ses
enfants.
Il semble à Saint-Prertx qu'il n'éprouve pllls pottr elfe qtt'une
afjecton
i
fraternelle.
Il s'installe au château de Walmar.
Il e11 admire ct
dtcrit longttement la vie sage ct réglée.
Julie et so11 mtJri exploitenJ
eux-mlmes leurs terres ; ils le font avec tm ordre et une botlté q"i asstnt
tre
leur bonheur maUrie/ et moral et celui de leurs getts.
Occttpato11S
i fécoJtdes
ct foies simples de cette vie rustique : vendatzgcs, veillées laboriettses,
fêtes du dima11che ; éd'ltcalion des eujanls réglée sur des pritzci/les toul
11ouvea11x.
Ce�en4aflt Ull ittcide11t rév�le d Jttlie et à Saint-Preu-x que
l'anciemre passiou perd �e rb·erlle''· A u tour; d'u11e promen(lde e11
bateau.
il.< r·isifCIII lrs Jt•thcrs de Meillerie or' Saillt·PP'ettx, ��� pitill
IJi•·er, ilt1it ventJ.
dix lflls plus tdt, '"it•er discspérémeul à cr/le qrlil
aimait ; rme déf11:ss� crue/fr sw git Ifaus leur cœrtr.
Elle se ble s'être
npaistc lorsque Sai11t-Prcux s'éloigua pour accompagner milord Édouard
dans rm voyage e11 Itale.
i Penda11t son absetzce, Julie se jette dans le
m
lac pour sauver tm de ses enfants.
Elle 1neurt d't des châtelains de Wolmar.
Dans ces vendanges,
ces veillées, ces collations de laitage, ces dévouements discrets et
souriants, on respire toujours un parfum d'honnêteté, de sécu
rité, d'harmonie.
C'est de là que nous datons volontiers le retour
de l'âme française à la vie rustique, à la nature, à la simplicité.
Nous nous trompons quelque peu.
Rousseau n'a inventé
ni les beautés de la campagne, ni les grâces des jardins anglais,
ni la sagesse de renoncer aux joies frelatées du monde pour les
tâches aimables de la vie aux champs.
Le goût pour les « agri
culteurs >> (le mot est nouveau) datait déjà d'une dizaine d'an
nées.
Et c'est trois ou quatre ans avant la Nouvelle Héloïse que
se fondent et se multiplient les sociétés d'agriculture.
Le goût
pour les jardins anglais venait d'Angleterre ...
et de Chine.
Ce sont des traités de jardiniers anglais et des récits de mis
sionnaires qui l'avaient créé.
On s'était lassé parfois du jardin
régulier de Le Nôtre dès le début du xvme siècle.
On en est
asse--4 las, de 1750 à 1760, pour ne pas se contenter de discuter ;
on crée des jardins où l'on imite aussi fidèlement les '' caprices
de la nature >> que dans l' >.
C'est ce cœur chimérique, mais sincère, ardent, palpitant,
qui émut les contemporains et les conquit.
En même temps,
il rc&tait dans ces trois dernières parties quelque chose de ce
qui faisait la séduction des trois premières.
La passion, dans la
p remière moitié du roman, >.
Ce n'était plus
les libertinages des romans à la mode, ni l'analyse abstraite de
Marivaux ou de Mlle de Scudéry.
Aimer n'est plus, pour Julie
ou pour Saint-Preux, un incident ou un accident dont on guérit
jusqu'au prochain accident.
C'est toute la raison de vivre, c'est
toute la vie.
Notre destinée ne doit prendre pour guide ni le
plaisir qui corrompt et....
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓