Japon (1989-1990): La valse des premiers ministres Trois premiers ministres se sont succédé en 1989. Cet événement ne trouve son...
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Japon (1989-1990): La valse des premiers ministres
Trois premiers ministres se sont succédé en 1989.
Cet événement ne trouve son
pendant qu'en 1948, durant l'occupation américaine lorsque des oppositions
politiques entre la gauche et la droite avaient accéléré la rotation des chefs
de gouvernement.
Mais cette fois, les raisons ont été bien différentes: ce
n'étaient plus des alternances de partis, ni même des rivalités entre les
diverses factions du puissant parti conservateur au pouvoir (PLD, Parti libéral
démocrate) qui ont été en cause, mais plus simplement le mal chronique de la
politique (japonaise), l'argent, indispensable à tout élu, s'il veut pouvoir
"tenir la route" jusqu'aux élections suivantes.
Au Japon, comme ailleurs, le
financement des partis politiques implique des dons intéressés de la part des
entreprises qui, en contrepartie, demandent aux hommes du gouvernement des
facilités pour se développer.
Le scandale Recruit, du nom de l'entreprise "numéro un" des petites annonces
pour les étudiants et du travail temporaire, a conduit son patron Ezoe Hiromasa
sous les verrous.
Ce dernier en offrant, avant cotation, des actions qui
allaient presque doubler après leur entrée sur le marché s'était concilié les
bonnes grâces d'un grand nombre de leaders politiques conservateurs.
En échange,
il ne fait guère de doute qu'il a pu bénéficier de l'aide de membres du
gouvernement, au plus haut niveau, comme les deux Premiers ministres Nakasone
Yasuhiro et Takeshita Noboru pour entrer en force sur le marché des banques de
données et acquérir à bas prix des ordinateurs étrangers de grande puissance.
Il
escomptait bien également devenir sénateur pour le camp conservateur.
Après la
publication de preuves et les révélations de la presse, le 27 mai 1989,
Takeshita Noboru dut céder son poste à son ministre des Affaires étrangères.
Uno
Sosuke.
Les barons du PLD attendaient de ce dernier qu'il reste à ce poste au
moins pendant la durée "médiatique" du scandale et qu'il le "réserve" pour une
"personnalité" (ils pensaient vraisemblablement à Abe Shintaro) qui soit à la
tête d'une faction.
La voix des femmes
S'il pouvait passer pour irréprochable au plan financier, ce Monsieur Propre
allait cependant rapidement être au centre d'un autre scandale: l'une de ses
maîtresses, une geisha, en révélant jusque dans leur intimité les relations
qu'elle avait entretenues avec le nouveau Premier ministre, allait contribuer à
aliéner le vote féminin au parti conservateur lors des élections sénatoriales du
23 juillet 1989.
Le lendemain, Uno Sosuke démissionnait et un autre "second
couteau" du monde politique, Kaifu Toshiki, était choisi.
Une situation
intérieure difficile l'attendait: outre la gronde des femmes, entretenue par Doi
Takako, première femme leader d'un parti au Japon, et qui plus est, du plus
grand de l'opposition, le Parti socialiste, le nouveau Premier ministre allait
affronter les revendications des citoyens qui exigeaient la suppression de la
réforme sur la taxe à la consommation de 3%.
De plus, pendant une grande partie
de l'année 1989, les partis de l'opposition allaient réclamer des élections
générales.
Le PLD s'y est résolu le plus tard possible.
Faute d'un réel programme d'alternance constructif, les électeurs ont redonné
une confortable majorité au PLD le 18 février 1990, avec 275 sièges sur 512 (il
en avait 300) que compte la Chambre (les indépendants pro-PLD enlevant pour leur
part 15 sièges).
Si le Parti socialiste a bondi de 85 sièges à 136 (24% des
votants), il a surtout contribué à laminer ses partenaires qui ont été les
grands perdants: le Parti bouddhiste (Komeito) est passé de 56 à 45 sièges, le
Parti démocrate socialiste (Minshato) de 26 à 16.
Le Parti communiste a subi,
quant à lui, les conséquences de la faillite des régimes socialistes des pays de
l'Est et a regressé de 26 sièges à 16.
Bien qu'il ait permis au PLD de remporter
une victoire, Kaifu Toshiki, faute d'être à la tête d'une faction, allait
vraisemblablement devoir laisser le poste sinon à l'automne 1990 du moins
probablement au début de l'année 1991.
Néanmoins, un phénomène est à noter, que l'on peut qualifier à la fois de
politique et de société et qui est lié à la montée des femmes sur la scène
politique japonaise, montée dont la figure emblématique est Doi Takako, avocate
et leader du Parti socialiste.
Les affaires d'alcôve du Premier ministre Uno ont
servi de détonateur à l'expression d'une profonde frustration féminine,
ressentie à la fois dans le vécu familial et professionnel.
Les femmes veulent,
à qualités égales, tenir des rôles équivalents à ceux des hommes quand elles
estiment leurs ambitions fondées.
Au moment des élections sénatoriales, elles
ont rappelé au parti au pouvoir qu'elles représentent 46,7 millions de voix,
alors que les hommes n'en comptabilisent que 43,9.
La pénurie de main-d'oeuvre
sert d'ailleurs les revendications des femmes.
On préfère quand même, pour un
emploi, une Japonaise parlant la langue et diplômée, à un étranger sans
formation linguistique et n'ayant qu'une scolarité moyenne.
Il est certain que
des femmes qui auparavant votaient conservateur ont choisi cette fois de voter
socialiste parce que c'était une femme qui incarnait ce parti.
Dépréciation du yen
Mais plus encore que par la vie politique, cette période a été marquée par la
forte dépréciation du yen (plus de 20% par rapport au franc français).
Le dollar
s'échangeait à 122 yens au début de 1989, contre 160 en avril 1990, son taux le
plus bas depuis trois ans.
L'indice Nikkei de la Bourse a chuté de 22% entre
janvier et avril 1990.
Le 21 février, il a perdu 3,1% en un seul jour, puis
encore 4,5% le 26.
Le Japon doit donc payer plus cher sa facture pétrolière mais
il espère compenser cela en exportant davantage, ce qui crée toujours de grandes....
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