Japon (1992-1993): Rejet de la corruption, crépuscule d'un régime En mars 1993, Kanemaru Shin, le "parrain" de la politique japonaise...
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Japon (1992-1993): Rejet de la corruption, crépuscule d'un régime
En mars 1993, Kanemaru Shin, le "parrain" de la politique japonaise et l'un des
piliers du Parti libéral-démocrate (PLD), au pouvoir, est tombé.
Incarcéré du 6
au 29 mars, il a ensuite été libéré contre une caution d'environ 300 millions de
yens.
Ainsi a été confirmée l'idée selon laquelle la corruption politique était
devenue la maladie chronique de la démocratie japonaise.
Les politiciens,
intermédiaires obligés entre le monde des affaires et l'administration,
monnaient contre argent leurs "services", dont les bénéfices vont, la plupart du
temps, dans les caisses de leur faction.
Mais avec l'affaire Kanemaru qui a
dépassé en ampleur le scandale Sagawa survenu un an plus tôt, les enquêteurs
obstinés, et bien informés sans doute, ont, après plusieurs mois de travail,
découvert que le couple Kanemaru avait discrètement amassé des sommes
colossales, qu'il avait soigneusement cachées au fisc, à partir de 1984.
Repenser le système électoral
L'affaire Kanemaru, par sa dimension, par ses ramifications tant avec le monde
des affaires, qu'avec la pègre, et par son usage très particulier du pouvoir
politique a créé un précédent.
En avril 1993, une enquête révélait que les
Japonais éprouvaient un profond dégoût pour les hommes politiques.
"Il y a deux
catégories de Japonais: ceux qui paient honnêtement leurs impôts et ceux qui ne
le font pas" dénonçait un éditorial du quotidien Asahi Shimbun un mois plus tôt.
La plupart des lecteurs contribuables s'accordaient à reconnaître qu'avec
l'affaire Kanemaru cet état de fait avait atteint son paroxysme et que le temps
était largement venu de repenser totalement le système électoral et le
financement des partis politiques.
Le Premier ministre Miyazawa Kiichi, qui avait formé un nouveau gouvernement en
décembre 1992, avait déclaré en avril 1993: "Si nous ne faisons pas cette
réforme maintenant, nous le regretterons pour cent ans." Rien n'était encore
arrêté, mais les propositions avancées tant par les journaux que par certains
hommes politiques reposaient, entre autres, sur le projet de faire financer les
campagnes électorales par un fonds spécial alimenté par un impôt supplémentaire,
d'interdire tout transfert d'argent d'une faction à un homme politique,
d'interdire ou de plafonner les dons à un parti politique et de suspendre pour
cinq ans tout élu qui contreviendrait à ces règles.
La cote de Miyazawa était,
par ailleurs, très basse.
On lui reprochait d'être trop indécis et de ne pas
savoir ou pouvoir résoudre les crises successives affectant l'État lui-même.
Par-delà les volumineuses prévarications de Kanemaru Shin, les hommes politiques
ont encore augmenté les budgets consacrés aux campagnes électorales, le système
de scrutin plurinominal à un tour obligeant des candidats du même parti à
s'affronter pour pouvoir élire en moyenne trois à cinq députés par
circonscription.
Le Parti libéral-démocrate (PLD), conservateur et les partis
d'opposition ont donc présenté des plans de réforme électorale, sensiblement
différents.
Les conservateurs ont proposé de redessiner la carte électorale et
de passer des actuelles 130 circonscriptions à 500; le nombre des députés
baisserait de 512 à 500 et chaque parti ne présenterait donc plus qu'un seul
candidat par siège.
Les partis d'opposition comme le Parti socialiste et le
Komeito ont, quant à eux, imaginé un système de 200 circonscriptions, élisant
chacune un député, les 300 autres députés se faisant élire à la proportionnelle.
L'importance de l'enjeu était évidente car une telle réforme semblait pouvoir
conduire, pour les élections législatives prévues au début de l'année 1994, à
élire, peut-être pour la première fois depuis la guerre, une autre majorité
durable.
A la suite du scandale Kanemaru, la faction Takeshita s'est scindée en
deux groupes, celui de Obuchi Keizo (66 membres) et celui de Hata Tsutomu (44
membres), l'homme fort de ce dernier groupe étant Ozawa Ichiro que l'on
présentait jusqu'alors comme l'héritier naturel de la faction Takeshita.
La chute du gouvernement Miyazawa
Tandis que la presse révélait les progrès de la justice dans la découverte des
affaires de pot-de-vin et que l'on s'attendait à de nouvelles inculpations,
l'homme lige de Ozawa Ichiro, Hata Tsutomu, "faisait le forcing" pour certains,
il tentait de faire diversion pour obliger la majorité conservatrice à adopter
les réformes.
Faute d'y être parvenu, la faction Hata/Ozawa a déposé une motion
de censure contre sa propre majorité: celle-ci est passée par 255 voix contre
220 et le gouvernement Miyazawa est tombé le 18 juin 1993; il a appelé à élire
une nouvelle Chambre, un mois plus tard, le 18 juillet.
Les 36 dissidents
composant la faction Hata/Ozawa ont formé un nouveau parti, le Shinseito (Parti
du Renouveau) qui a remporté 55 sièges le 18 juillet.
Deux partis
néo-conservateurs, le Nihon Shinto (Nouveau parti du Japon) et le Sakigake, tous
deux anciens "dissidents" du PLD, ont obtenu respectivement 35 et 13 sièges.
Au
lendemain des élections, ils ont fusionné, créant le Shinto Sakigake.
Les deux partis pivots de la vie politique japonaise depuis des décennies, le
Parti libéral-démocrate et le parti socialiste (PSJ) ont essuyé une relative
défaite pour le premier et une déroute historique pour le second: le PLD n'a
remporté que 223 sièges, ce qui est insuffisant pour gouverner, mais il est
resté le premier parti du pays et son nombre de sièges se rapprochait le plus
des 256 requis pour former un gouvernement.
Le Parti socialiste a régressé de
136 à 70 sièges.
Les bouddhistes du Komeito ont augmenté leur représentation (55
sièges pour 45 auparavant), les sociaux-démocrates également, passant de 13 à 15
élus, le Shaminren a conservé ses 4 députés.
Le parti communiste, quant à lui,
éternel exclu de toutes les formes possibles de gouvernement de coalition, a vu
son groupe passer de 16 à 15.
Au lendemain des élections tous les scénarios de coalition gouvernementale
semblaient possibles: soit le PLD, prenant résolument un réformateur à sa tête,
se trouvait des alliés pour faire l'appoint majoritaire, y compris chez ceux qui
l'avaient dénoncé pendant la campagne électorale, soit une majorité composite
allant du Parti socialiste aux néo-conservateurs proposait un gouvernement
nouveau.
Si les sondages et les voeux des électeurs semblaient incliner pour ce
second scénario, il avait pour obstacle que l'aile gauche du Parti socialiste,
proche des communistes, n'a pas grand-chose en commun avec les néo-conservateurs
du Shinto-Sakigake, Hosokawa Morihiro et Takemura Masayoshi.
Les milieux
d'affaires finançant le PLD ne souhaitaient, quant à eux, guère voir arriver au
gouvernement des socialistes.
Des liens puissants, quasi organiques existent
entre les trois pôles du pouvoir japonais que sont les milieux d'affaires, le
PLD et la haute administration.
Certains ont mis en avant le fait que la mise en
péril, même pour un temps court, de ces liens traditionnels pouvait être très
préjudiciable au Japon au moment où celui-ci devait faire face à la menace d'une
récession.
Hosokawa Morihiro (NPJ) a été élu Premier ministre le 6 août et Doi
Takako (ancienne présidente du Parti socialiste) présidente du Parlement.
Sur
les 21 portefeuilles du nouveau gouvernement formé le 9 août, 6 sont allés au
PSJ, 5 au Shinseito, 4 au NPJ et 4 aux bouddhistes.
Au sein du Parti socialiste, son président Tanabe Makoto, chef de la plus
importante faction (Suiyokai) et grand ami personnel de Kanemaru Shin, a été
fort critiqué.
Il a démissionné à la fin de 1992.
Un jeune député de 44 ans,
proche de Tanabe Makoto, Akamatsu Hirotaka, est devenu secrétaire général tandis
que Sadao Yamahana accéda à la présidence.
La nomination du premier "baby
boomer" a surpris l'establishment socialiste.
Certaines de ses prises de
position vis-à-vis du GATT - Accord général sur les tarifs douaniers et le
commerce - (importations de riz), vis-à-vis du nucléaire civil et du
retraitement du plutonium, ont engendré beaucoup de tensions à l'intérieur même
du PSJ, mais en même temps, elles ont témoigné de la volonté qu'avait ce dernier
d'adopter des positions capables de le présenter aux yeux des électeurs comme un
challenger possible de la majorité conservatrice.
En vue des élections initialement prévues pour début 1994, il avait cherché à
organiser autour de lui une "possible" nouvelle majorité.
Ses déclarations en
faveur....
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