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Japon )1993-1994): Un séisme politique équivoque L'événement de l'année 1993 aura été la chute du gouvernement de Miyazawa Kiichi, le...

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« Japon )1993-1994): Un séisme politique équivoque L'événement de l'année 1993 aura été la chute du gouvernement de Miyazawa Kiichi, le 18 juin, dans un contexte de corruption politique paroxystique, et le complet bouleversement du paysage politique nippon.

Après trente-huit ans d'hégémonie du Parti libéral-démocrate (PLD, conservateur), une nouvelle majorité est arrivée au pouvoir à l'issue des élections législatives du 18 juillet 1993, ce qui a pu être perçu comme un séisme politique.

Le clan conservateur n'a toutefois pas subi de déroute.

Le Parti du renouveau (Shinseito) formé par les transfuges du PLD, dirigé par Ozawa Ichiro et son homme lige Hata Tsutomu (qui avaient "coulé" le gouvernement Miyazawa en lui retirant leur confiance), a en effet intégré la nouvelle équipe ministérielle (5 portefeuilles sur 21); de même que les néo-conservateurs du Nouveau parti du Japon (NPJ) et du Nouveau parti des précurseurs (Shinto-Sakigake) - eux aussi dissidents du PLD - qui ont également intégré le gouvernement.

Le NPJ a fourni le Premier ministre, Hosokawa Morihiro (nommé le 6 août), à la coalition.

La presse japonaise n'a pas manqué de souligner que les voix conservatrices et néo-conservatrices, à l'issue du scrutin pesaient pour près de 65% et que le Parti socialiste japonais (PSJ, 6 portefeuilles ministériels), qui comptait 136 représentants au Parlement, n'en avait plus que 70 au soir du 18 juillet. Un homme, en particulier, avait joué son va-tout lors de ce renouvellement du pouvoir: Ozawa Ichiro.

Il n'est autre que l'un des trois membres, avec Kanemaru Shin et Takeshita Noboru, du triumvirat qui a dominé la politique japonaise des années quatre-vingt, à savoir l'époque de la spéculation foncière, des opérations financières douteuses et des placements très personnels.

La fin de ces "années de casino", comme on les a nommées, a été marquée par la révélation de multiples scandales au cours desquels les noms des trois hommes ont souvent été cités.

Ozawa Ichiro avait fréquemment été donné comme premier ministrable; il était le disciple d'un ancien chef du gouvernement mêlé à de nombreux scandales, Tanaka Kakuei (1972-1974), décédé en décembre 1993.

Homme décidé, voire manoeuvrier, au franc parler, il a souvent connu des altercations avec la presse.

Nombre d'adversaires - et même des alliés - voudraient envoyer en prison cette personnalité puissante, mais très controversée. Son "coup d'État" (dépôt d'une motion de censure contre le gouvernement Miyazawa et par là même sa propre majorité) tenait justement au fait qu'il n'avait pas réussi à obtenir le pouvoir au sein de son parti.

Mais Ozawa Ichiro n'a cependant pas obtenu l'accord des autres partis de cette coalition nouvelle, et surtout du Parti socialiste, pour devenir Premier ministre à l'issue des élections du 18 juillet. Un front commun anti-PLD Une étrange "coalition patchwork", allant des socialistes proches du Parti communiste japonais (PCJ), en passant par les bouddhistes du Komeito jusqu'aux néo-conservateurs précités tenant des positions opposées à celles du PSJ, aura ainsi pris en main le destin politique du Japon.

Ces hommes, hier adversaires, n'ayant pas grand-chose en commun, s'étaient ligués avant tout dans le but de constituer un "front anti-PLD". Hosokawa Morihiro a obtenu un soutien sans précédent de la population (plus de 72% entre août et décembre 1993).

Cette popularité montrait bien que les Japonais attendaient du neuf de la part de ce leader inconnu.

Sur le sujet de ce qui devait changer, on a pu observer une certaine incompréhension entre la classe politique et le "monde du travail", car il est une valeur suprême sur laquelle aucun leader politique ne peut transiger: l'emploi.

Les Japonais, face aux bouleversements économiques dans le monde et en particulier en Asie, ont véritablement eu peur de la récession. La presse et la télévision se sont largement fait l'écho, pendant l'année, de licenciements de cadres, de la remise en cause des principes de l'"emploi à vie", de l'arrivée massive de travailleurs immigrés chinois souvent clandestins, de cas de grandes entreprises licenciant et délocalisant leur production dans les pays d'Asie du Sud-Est à la recherche de coûts de production plus compétitifs, du "chômage" des jeunes diplômés... Tout en se disant conscient des problèmes d'emploi, Hosokawa Morihiro s'est toutefois surtout attaché à prendre des mesures relativement éloignées de la première préoccupation nippone.

A la vérité, il n'a réalisé qu'une seule réforme: celle de la loi électorale, sujet inépuisable et fort complexe de débats au Parlement depuis 1988, lié à la corruption endémique du système politique.

Cette réforme lui a attiré bien des critiques. La nouvelle législation votée fin janvier 1994 prévoit l'élection de 200 représentants à la proportionnelle et de 300 députés selon un scrutin uninominal à un tour: un seul élu par circonscription afin de limiter les luttes fratricides et fort coûteuses de l'ancien système au sein duquel s'affrontaient plusieurs candidats d'un même parti, briguant chacun l'un des trois ou quatre postes en jeu. Le bilan du "semestre" Hosokawa Dès son arrivée au pouvoir, Hosokawa Morihiro s'est heurté à l'un des trois grands piliers du pouvoir conservateur: les bureaucrates de l'administration publique.

Au Japon, en effet, une certaine vacance du pouvoir politique n'empêche nullement le pays de "tourner": avec le monde des affaires, ce sont les bureaucrates qui, via force directives et règlements ministériels (on en comptait un total de 11 400 en mars 1993), dirigent le Japon.

Le Premier ministre, en s'attaquant à la bureaucratie, a paru avoir de vieux comptes à apurer.

Il a affirmé sa volonté de "déréguler". Il ne semble pas qu'il soit sorti vainqueur de ce combat avec ces hommes, solidaires entre eux, maîtres dans leur ministère, connaissant bien les dossiers et liés structurellement au PLD.

L'action de Hosokawa Morihiro aura cependant eu le mérite de mettre davantage en lumière la véritable nature de ce pouvoir. Le Premier ministre, petit-fils du prince Konoé, lié à la famille de l'empereur, était apparu à l'opinion publique comme un "homme propre" jusqu'à ce que la presse révèle, en mars 1994, qu'il avait lui aussi reçu plus de 100 millions de yens de l'entreprise de transport "corruptrice" Sagawa Kyubin et que des placements illégaux avaient été effectués.

Hosokawa Morihiro a ainsi rejoint le banc très encombré des hommes politiques convaincus de corruption qu'il dénonçait peu de temps avant.

Après quelques piètres tentatives de défense, il a brusquement quitté le pouvoir le 8 avril 1994. Le bref tour de piste de Hata Tsutomu La succession était revenue à Hata Tsutomu, ancien ministre des Affaires étrangères du cabinet Hosokawa et ami de Ozawa Ichiro, nommé le 25 avril 1994. Mais l'annonce quelques heures plus tard de la fusion du NPJ et du Parti du renouveau en une formation nommée "Réforme" (Kaishin) a fâché les socialistes qui ont refusé d'entrer dans le gouvernement Hata.

Le nouveau cabinet, "minoritaire", paraissait d'une grande fragilité, les socialistes pouvant à tout moment joindre leur vote à celui du PLD et le faire tomber.

Coup de théâtre en juin 1994: le PSJ a manifesté sa volonté de réintégrer l'équipe ministérielle. Le nouveau Premier ministre avait exprimé sa détermination à poursuivre le train de réformes proposé par son prédécesseur, notamment celle concernant la TVA (taxe à la valeur ajoutée) visant à la faire passer progressivement de 3% à 7%, puis à 10%.

Mais les résistances sont apparues grandes dans la population. Le gouvernement Hata n'aura tenu que cinquante-neuf jours.

Pour éviter d'être mis en minorité à la Chambre basse par un vote de défiance.... »

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