Japon (1997-1998): Un navire dans la tourmente Le Japon est souvent comparé, thème à la mode, au Titanic. Il est...
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Japon (1997-1998): Un navire dans la tourmente
Le Japon est souvent comparé, thème à la mode, au Titanic.
Il est vrai que le
Premier ministre Hashimoto Ryutaro dans son rôle de commandant du navire a eu
fort à faire à manœuvrer pour éviter les écueils, parer aux menaces de voies
d'eau dans la coque de l'économie.
Il devait d'autant plus s'activer que des
élections sénatoriales prévues pour juillet 1998 pouvaient remettre en cause son
poste de Premier ministre et de chef du Parti libéral démocrate (PLD).
La réalité était préoccupante, il est vrai.
Entre octobre et décembre 1997, par
exemple, le taux de croissance a été négatif (- 0,7 %).
Pareille situation ne
s'était pas produite depuis 1974, au moment du premier " choc pétrolier ".
La
consommation des ménages a baissé de 5,9 % sur l'année, et les ventes de
logements et celles d'automobiles, qui ont chuté (- 20 % de mars 1997 à mars
1998), sont les plus significatives.
1997 aura enregistré un chiffre record de 71 299 faillites (soit 15 000 de plus
qu'en 1996).
Le plus frappant tient au fait qu'il s'est agi de grandes
entreprises opérant à l'étranger et cotées en Bourse.
La chaîne de supermarché
Yaohan, avec ses 450 magasins dans quinze pays, qui prévoyait d'ouvrir 1 000
supermarchés en Chine d'ici 2005, a été déclarée en faillite le 18 septembre
1997.
Jamais un réseau de distribution d'une telle taille n'avait été en
faillite depuis la guerre.
Le 3 novembre, la maison de titres Sanyo (septième du
Japon) déposait son bilan.
Ses dettes s'élevaient à 373,6 milliards de yens.
Le
17 novembre, c'était au tour de la banque du Hokkaido Takushoku de déposer son
bilan, puis, le 24 novembre, au tour de Yamaichi, la quatrième maison de titres
fondée en 1897.
Avec l'aide de la Banque du Japon, cette dernière a dû
rembourser à ses clients plus de 470 milliards de yens.
Trois des anciens
présidents de Yamaichi ont été arrêtés pour avoir déclaré de faux bilans.
On
sait pourtant que le ministère des Finances, dès la fin 1991, avait autorisé de
telles pratiques.
Le 26 novembre 1997, la banque commerciale régionale de Sendaï, Tokuyo, était à
son tour en faillite.
La liste est longue et les résultats de 1998 alourdiront
vraisemblablement ce bilan : les banques Fuji (quatrième) et Sakura (sixième)
sont apparues avoir de sérieux problèmes.
Pour survivre, bien des banques
allaient devoir rapidement fusionner.
Comment en est-on arrivé là ? L'éclatement
de la bulle financière au début des années quatre-vingt-dix n'en finit pas de
secouer le pays de soubresauts, comme une longue maladie dont il n'arriverait
pas à se relever.
L'indice Nikkel cotait moins de 15 000 points en décembre 1997
(39 000 en 1989), soit une perte supérieure à 60 % de sa valeur par rapport aux
années quatre-vingt-dix.
Perquisitions, dénonciations, arrestations, suicides...
Au-delà de la crise économique mondiale et qui rattrape peu à peu le Japon, on
dénonce cependant aussi les pratiques japonaises de collusion entre le monde de
la haute administration, celui des affaires, de la politique et de la pègre
(yakuzas).
Au premier trimestre 1998, le Premier ministre Hashimoto Ryutaro a
fait voter par le Parlement un plan de relance de l'économie de 1 600 milliards
de yens comprenant des commandes de grands travaux, d'importants budgets de
recherche, des réductions d'impôt sur les ménages pour relancer la consommation
(moins 72 500 yens pour une famille de quatre personnes), un soutien accru aux
économies défaillantes d'Asie du Sud-Est.
Par ailleurs, il a été prévu
d'introduire en Bourse davantage de fonds de réserve provenant des épargnes
déposées à la poste.
La crise financière qui s'est poursuivie tout au long de 1997 et jusqu'au
printemps 1998 s'est faite sur fond de perquisitions, de dénonciations,
d'arrestations et de suicides.
Le 18 janvier 1997, trois anciens hauts
fonctionnaires devenus responsables de la société des autoroutes étaient arrêtés
pour avoir communiqué des informations confidentielles à Nomura Securities au
moment d'appels d'offres.
Le 26 janvier 1997, Miyakawa Koichi et Taniuchi
Toshimi, tous deux hauts fonctionnaires du ministère des Finances, étaient
arrêtés pour avoir informé des banques d'une inspection imminente en échange de
pots-de-vin et de " récompenses ".
Cette tendance des administrations à abuser
de l'argent des contribuables a été dénoncée également à la préfecture d'Osaka
en décembre 1997, où 1,33 milliard de yens étaient partis en cadeaux et fausses
factures de taxi.
Le 28 janvier, deux hauts fonctionnaires du ministère des
Finances étaient encore arrêtés pour avoir communiqué des informations
confidentielles à des banques.
Le ministre des Finances, Mitsuzuka Hiroshi,
était obligé de démissionner.
Le 20 février 1998, l'un des leaders du PLD, Araï
Shoki, était retrouvé pendu dans une chambre d'hôtel.
Ce proche du Premier
ministre s'était vu accusé d'avoir reçu plus de 40 millions de yens en
placements illicites à Nikko Securities.
Araï, un ex-résident coréen au Japon,
avait acquis la nationalité japonaise à l'âge de seize ans et avait fait une
belle carrière politique.
Mais le plus grand scandale de l'année aura sans doute été celui causé par Koike
Ryuichi dont le métier était d'extorquer des fonds (sokaiya) en menaçant les
banques de divulguer des dispositions confidentielles et souvent illicites lors
de l'assemblée des actionnaires.
En échange de son silence, il recevait des
sommes appréciables (ayant plaidé coupable, il a déclaré avoir reçu plus de 12
milliards de yens en cadeaux).
Des banques comme la Dai-Ichi Kangyo ou des
maisons de titres comme Nomura Securities ou la défunte Yamaichi Securities
furent ses victimes.
Le 29 juin 1997, le président de la Dai-Ichi Kangyo,
Miyazaki Junichi, démissionnait et se suicidait.
La relance de l'économie nippone : le big bang
Pour Hashimoto Ruytaro, la préoccupation était de relancer la consommation,
d'assainir le système financier et de crédibiliser à nouveau Tokyo comme grande
place boursière auprès des investisseurs étrangers.
Le gouvernement a lancé le
1er avril 1998 une vaste dérégulation du système financier surnommée le " big
bang ".
Il est difficile de mesurer l'efficacité d'une telle politique mais l'un
des développements politiques possibles poursuivis par Hashimoto pouvait être de
dessiner les contours d'une zone économique yen en Asie.
Il était encore moins
sûr que les Chinois, ceux du Continent comme ceux de la diaspora, dont le poids
économique est prépondérant dans de nombreux pays d'Asie, l'acceptent.
Mais le
Japon, dont les réserves sont importantes, peut conditionner ses prêts aux pays
asiatiques en difficulté par l'obligation qu'une part croissante de leurs
transactions....
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