La faute Le Procès de K. pose le problème de la faute : K. est-il cou pable, et de quoi...
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«
La faute
Le Procès de K.
pose le problème de la faute : K.
est-il cou
pable, et de quoi ? Si le texte ne fournit pas d'indications expli
cites sur cette culpabilité, il nous présente en revanche l'image
d'une humanité corrompue.
LA CULPABILITE DE K.
Les charges à l'encontre de K.
sont obscures.
Son arrestation et
son exécution paraissent gratuites.
Nous ne saurons jamais de
quoi est accusé K., mais le roman comporte de nombreux indices
de sa culpabilité.
1 Les aveux indirects
K.
semble en proie à un conflit intérieur, il donne l'impression de
se savoir en faute.
Nombre de ses propos apparaissent comme
des aveux indirects de culpabilité.
Par exemple, il se définit lui
même comme immoral en déclarant à Mme Grubach : « Si vous
voulez tenir la pension propre, il vous faut commencer par me
donner congé » {P.
48).
Cet autre aveu indirect : « Je suis innocent
ou tout au moins beaucoup moins coupable qu'on ne le pensait »
rend Mlle Bürstner « soudain très attentive » (p.
52).
Ainsi s'expli
querait le sentiment de « honte » qui s'empare de lui à la fin du
roman, se laissant exécuter « comme un chien » (p.
280) dans un
geste quasiment suicidaire.
Le film multiplie les indices d'une culpabilité de K.
Apprenant
son arrestation, H ne remet jamais en question la légitimité de
l'intrusion des policiers.
Mlle Bürstner, par ses réactions de défense, le rend suspect.
Le directeur de la banque insinue l'existence
de relations coupables entre K.
et sa cousine.
Son oncle lui
reproche d'avoir laissé sa cousine Irmie
«
à la porte
Les réac-
».
tions de ces personnages sont des ajouts de Welles destinés à
souligner la culpabilité du personnage.
Mais cette culpabilité
s'estompe progressivement.
La fin du film montre au contraire le
sursaut de K., animé d'un sentiment de révolte.
Mais Welles ne
suggère pas non plus son innocence.
Comme nous l'avons vu,
cette question l'intéresse peu
➔ REPÈRES, P.
(➔ PROBLÉMATIQUE
2, p.
58/
47).
1Les ambivalences de K.
Nous avons constaté les clivages de la personnalité de K.
(➔ PROBLÉMATIQUE
3, p.
68).
Ils font apparaître, derrière l'employé
innocent, un double négatif et coupable.
Mimant son arrestation,
en dépit des supplications de Mlle Bürstner (« Comme vous me
tourmentez ! », p.
56), il adopte une seconde personnalité
(« J'allais m'oublier», p.
55), comme si un second moi le poussait à
la faute.
II se met à crier,
de le faire
«
moins fort d'ailleurs qu'il n'avait menacé
(p.
55) : cette correction manifeste le retour du premier
»
moi, celui de l'employé modèle qui se rend compte du caractère
«
blessant
»
(p.
57) de son acte, tout en l'accomplissant quand
même.
Il saisit Mlle Bürstner par le poignet
«
mais, parvenu devant
la porte, il eut un recul comme s'il ne s'était pas attendu à la trouver là ; Mlle Bürstner profita de cet instant pour se libérer
»
(p.
57) :
K.
est écartelé entre un moi conscient de son acte violent, et un
autre moi, surpris par les événements et libérant sa voisine.
A la fin
de l'épisode, après avoir embrassé celle-ci
assoiffé
», «
«
comme un animal
il était satisfait [de sa conduite] mais s'étonnait de ne
pas l'être davantage » (p.
58).
Cette dissociation s'effectue aussi au
contact de la femme de l'huissier, qui
«
«
le tentait vraiment
» :
Machinalement K.
fit un geste dans le vide pour chercher à saisir
la main de la laveuse, mais elle était déjà partie » (p.95).
K.
est donc
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PROBLÉMATIQUES ESSENTIELLES
tiraillé entre un être de réflexion, défenseur des valeurs morales, et
un être de sensation, dont les pulsions sont celles d'un
«
animal
assoiffé».
1La femme, à
l'origine de la faute ?
Ces dissociations ont toujours lieu en présence des femmes.
L'une d'elles semble mettre en cause K.
: Mlle Bürstner.
Devant son
oncle, il évoque d'une façon étrange l'implication de Mlle Bürstner
dans son procès : « Il ne mentionna qu'une seule fois, et de façon
superficielle, le nom de Mlle Bürstner; mais cela n'entamait pas sa
loyauté puisque la jeune fille n'avait rien à voir avec le procès »
(p.
133).
Si la jeune femme
est réellement en-dehors du procès,
pourquoi y faire allusion ici ? Puis il songe que « ses relations avec
Mlle Bürstner semblaient être restées en suspens en même temps
que son litige
»
(p.
163), mettant directement en relation la jeune
femme et le procès.
Enfin, avant son exécution, K.
croit voir
Mlle Bürstner.
Cette vision met un terme à ses résistances (p.
276).
Mlle Bürstner est l'élément déclencheur, qui précipite
K.
vers le
châtimenL
Chez Welles, dans la première séquence, l'inspecteur laisse
supposer qu'il est ici en raison de relations illicites entre K.
et
Mlle Bürstner.
Le lapsus de
K.
concernant le phonographe (« por-
nographe ») peut être interprété comme un symptôme de perversité.
En outre, avec les soupçons d'inceste émis par le directeur
adjoint de la banque, non seulement Welles élargit la faute de K.
à
d'autres femmes, mais cette faute gagne en ampleur, car K.
briserait ainsi l'un des interdits les plus forts de notre société.
La faute de K.
semble donc liée à la femme.
On peut y voir une
allusion biographique : K.
serait un double expiatoire de Kafka visà-vis de Felice incarnée par Mlle Bürstner
(➔ PROBLÉMATIQUE
p.
50).
Ainsi s'expliquerait le fait que l'un des
«
livres de loi
»
1,
des
[K.] doit être jugé » soit « un roman intitulé Tourments que Marguerite eut à souffrir de son mari » (pp.
90-91).
La
« gens par qui
femme est également une figure de la culpabilité dans la mesure
PROBLÉMATIQUES
ESSENTIELLES
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où Kafka s'avère incapable de créer avec celle-ci une famille
(➔ PROBLÉMATIQUE 3, p.
68).
À son oncle qui lui reproche son iso-
lement, K.
répond : « je sais très bien que je dois des comptes à
la famille
»
(p.
128).
Mais on peut aussi voir dans le rôle de la
femme une réminiscence du péché d'Adam : dès le début, K.
s'empare d'une« belle pomme" après s'être jeté sur son lit (p.
31).
La pomme serait une allusion à la tentation d'Ève, le lit....
»
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