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La femme On considère souvent que le Romantisme a idéalisé la femme, qu'il en a fait une figure d'amour idéal,...

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« La femme On considère souvent que le Romantisme a idéalisé la femme, qu'il en a fait une figure d'amour idéal, de douceur angélique, désincarnée et un peu fade.

Cette image du féminin chez les Romantiques est au moins très insuffi­ sante; la femme, dans le drame romantique.

est autre­ ment complexe.

Secondaire en apparence, son rôle est enrichi par son ambiguïté et par les particularités de sa condition. UN RÔLE SECONDAIRE? Des personnages en nombre restreint Il suffit d'observer la liste des personnages des drames romantiques pour constater que les _femmes y sont nette­ ment moins nombreuses que les hommes.

Si l'on se li­ mite aux personnages principaux, on n'y trouve souvent qu'un seul rôle féminin (dofia Sol dans Hernani, la reine dans Ruy Blas, Marianne dans Les Caprices de Marianne). Quantitativement parlant au moins, le drame romantique est surtout un théâtre d'hommes. La femme: un enjeu de l'action Peu nombreux, les personnages féminins semblent en outre plus passifs qu'actifs.

La femme est plus fréquem­ ment l'enjeu que le moteur de l'action dramatique.

Ainsi dans' Hernani, dofia Sol est convoitée par les trois princi­ paux personnages masculins.

Elle passe du pouvoir de l'un au pouvoir de l'autre, et ce ballottement rythme les diverses péripéties de l'intrigue.

La belle Louise Strozzi, dans�� Lorenzaccio, est convoitée et insultée par un courtisan du · duc (1, 2 et 5), vengée par son frère (Il, 5), puis empoison­ née par le duc (Ill, 7).

Même quand elle est au centre de l'action, la femme a rarement l'initiative1. Thèmes féminins: la beauté et l'amour Dans le drame romantique, la femme c'est d'abordJa beauté féminine.

La plupart des femmes y sont jeunes et belles.

Dona Sol a « Les yeux noirs les plus beaux» (H, 11, 1, v.

431 ).

Et la Florence de Lorenzaccio est peuplée de jolies femmes, dont les personnages masculins détaillent les charmes.

La jeune Gabrielle a « deux grands yeux languis-:, sants» (1, 1).; Louise Strozzi et la marquise Cibo ont « une jolie jambe» (1, 2 et 111, 6); Catherine Ginori est une. «Vénus», dont les bras sont si beaux qu'ils passent toute expression (Il, 4), La femme introduit ainsi dans le drame une atmosphère de beauté physique; plus ou moins forte­ ment érotisée. Car la femme, c'est surtout l'amour.

La plupart des femmes sont objet d'amour, ou au moins de désir.

Elles­ mêmes sont essentiellement des amoureuses.

La reine de Ruy Blas admet ,qu'elle ne peut tout simplement pas vivre sans aimer et être aimée (Il, 2; 111, 3).

Dans Lorenzaccio, une seule femme, la marquise Cibo, mène une action politique.

Mais cette action est intimement liée à l'amour, qu'elle éprouve ou croit éprouver pour le duc (Il, 3; 111, 6). Quant aux femmes plus âgées, elles sont souvent animées par l'amour maternel.

C'est le cas de Marie Soderini, la mère de Lorenzaccio, et d'Hermia, la mère de Cœlio (Les Caprices de Marianne). On pourrait donc croire que le drame romantique n'attri­ bue à la femme qu'un rôle secondaire.�t conven,tionnel, là 1.

Néanmoins, il ne faut pas généraliser outre mesure cette'passi­ vité féminine.

On va voir que si les personnages féminins sont ra-, rement à l'origine de l'action, leurs initiatives peuvent être parfois• déterminantes, au moins à certains égards.

Et dans d'autres drames romantiques, l'action est dominée par une femme· (ainsi ,,. Lucrèce Borgia et Marie Tudor de Victor Hugo). ,. femme «décorative» et exclusivement née pour l'amour. Néanmoins, on peut remarquer que dans ce théâtre qui va­ lorise l'amour, considérer la femme comme une amoureuse née, c'est la valoriser.

Chez Hugo surtout, la femme paraît plus directement proche que l'homme de cette valeur clef de l'existence.

En outre, la femme est pourvue dans ces drames d'une «nature» complexe, ambiguë à bien des égards. AMBIGUÏTÉ DE LA FEMME La femme dans Lorenzaccio: pureté ou impureté 7 Chez Musset, et surtout dans Lorenzaccio, le monde est décrit comme l'arène d'un combat entre la pureté et l'im­ pureté 1• Or la femme est au cœur de ce combat. Le mal qui habite Florence est avant tout représenté par la' débauche et la prostitution.

Le mal dont le héros lui­ même est atteint réside surtout dans son rôle de proxé­ nète au service du duc.

Inversement, à ses yeux, les seuls restes de pureté, dans le monde et dans sa propre exis­ tence; sont deux femmes, Marie et Catherine, sa mère et sa tante.

«Je vous estime, leur dit-il.

Hors de là, le monde me fait horreur» (Il, 4). · La femme est pourvue ·dans ce drame d'une multitude d'attributs négatifs qui la prédisposent à la corruption. La femme est vaniteuse: la jeune Gabrielle accepte de se livrer au duc pour avoir.

un brillant collier (1, ·1) et porter « une robe comme n'en a pas l'impératrice» (1, 6) ..

La femme est cynique et accepte en riant sa dépravation: ·«j'aurais pleuré avec la première fille que j'ai séduite, dit Lorenzaccio, si elle ne s'était mise· à rire» (Ill, 3).

·Enfin, la nature de la femme est une nature sensuelle aux passions impures.

Lorenzaccio est passé maître· dans l'art de révéler cette nature vicieuse: 1.

Voir en particulier « Un théâtre moral?» (p.

92, 93). étudier, ensemencer, infiltrer paternellement le filon mystérieux du vice [ ...

] ! Cela va plus vite qu'on ne pense;.

le vrai mérite est de frapper juste. (1, 1) Pourtant la femme, dans Lorenzaccio, c'est aussi la pujeur hautaine et énergique de Louise Strozzi, qui ne daigne pas répondre au compliment grossier de Salviati (1,2). Et la bonne nature, celle de l'enfance pure et sans tache, est placée sous le signe du féminin.

Quand Lorenzaccio songe à son enfance heureuse et calme, le souvenir de la nature et de la féminité s'associent: Que de journées j'ai passées, moi, assis sous les arbres! Ah! quelle tranquillité! quel horizon à Cafaggiuolo 1 ! Jeannette était jolie, la petite fille du concierge, en faisant séchei.sa lessive. (IV, 9) L'ambiguïté de_ la femme en fait ainsi le symbole du combat entre la pureté et l'impureté ..

Un personnage surtout, Catheri_ne Ginori, est de ce point de vue essentiel. A_ certains égards la décision prise par Lorenzaccio de supprimer le duc, est déterminée par sa hantise de voir cette femme, dernier refuge de pureté, basculer dans l'impureté2.

En effet, convoitée par le duc, Catherine pourrait ne pas être.

insensible à ses avances.

Pour Lorenzaccio, tuer le duc semble alors nécessaire, pour qu'il y ait un jour « peut-être [ ...

] une goutte de latt pur tombée du sein de Catherine, et qui aura nourri d'honnêtes enfants» (IV, 5). Cet avenir possible de bonheur et de pureté s'avère d'ailleurs le seul élément positif du drame. La femme chez Hugo: ~ force ou faiblesse ? Les héroïnes des drames hugoliens sont étrangemèAt . faibles êt fortes à .la fois.

Ainsi, dans Ruy Blas, la reine éprouve devant don Salluste une crainte que n'empêche pas sa fonction royale.

« Devant cet homme-là je ne suis 1.

Nom du domaine campagnard dans lequel Lorenzaccio a passé son enfance. 2.

Voir aussi « Un théâtre de l'amour», (p.

76, 77). qu'une femme», (Il,' 1, v.

610).

Malgré cette faiblesse «féminine», elle a pourtant eu le courage d'exiger sa dis­ grâce (1, 1), donc de s'en faire un dangereux ennemi. Dans Hernani,,la tendre dofia Sol est pourvue d'un cou­ rage, d'une-détermination et d'une énergie remarquables chez une si jeune femme.

Elle ne craint à aucun moment d'affronter les dangers qu'elle devra partager avec son amant, le héros hors-la-loi (1, 2).

A plusieurs reprises, elle dit violemment son fait au roi d'Espagne («Altesse, tu n'as pas le cœur d'un Espagnol! »,.111, 6, v.

1212).

Quand celui­ ci tente de l'enlever, elle résiste physiquement.

Dans la lutte, elle lui dérobe son poignard, et l'en menace (Il, 2).

Elle justifie hautainement sa résistance par sa noblesse, mais plus simplement encore par sa féminité: «je pourrais», lance-t-elle au roi, «Vous montrer que je suis dame, et que ,. je suis femme! » (v.

503-506). Pourtant, au moment décisif, toute cette force s'ef­ fondre.

Quand au dernier acte, don Ruy Gomez, jaloux du bonheur des épouxr vient réclamer la mort •d'Hernani au nom d'un serment que celui-ci lui a fait, dofia Sol com­ mence par se révolter.

Contre ce vieillard, son oncle, elle brandit à nouveau le poignard dérobé aû roi.

Elle l'en me-· nace férocement, se comparant elle-même à une tigresse N, 6, v.

2067-2068).

Mais cette révolte retombe vite: au lieu de frapper, doi'ia Sol se jette suppliante aux pieds de Ruy Gomez.

Elle justifie alors cette faiblesse par sa fémi­ nité: «Grâce! Hélas! monseigneur, je ne suis qu'une femme / Je suis faiblé.» (v.

2079-2080).

On pourrait voir ici un retour du cliché de la «faible femme».

Ce n'est sans doute pas tout à fait faux.

Mais il convient de remarquer que la femme, chez Hugo, partage ce curieux mélange de force et de faiblesse, de puissance et d'impuissance, avec .:·· le héros lui-même1. Cependant la femme possède souvent, davantage que les héros masculins; une force particulière et paradoxale. La force de la.... »

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