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La lecture analytique Texte Louise Labé,« Las! Que me sert... ,., Sonnets (1555), XXIII. ➔ SÉQUENCE 1, TEXTE 1 •...

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« La lecture analytique Texte Louise Labé,« Las! Que me sert...

,., Sonnets (1555), XXIII. ➔ SÉQUENCE 1, TEXTE 1 • OBJET D'ÊfUDE : LA POÉSIE r !s 10 Las1 ! �e me sert que si parfaitement Louas jadis et ma tresse dorée, Et de mes yeux la beauté comparée2 A deux soleils, dont l'Amour finement'! Tira les traits, causes de ton tourment? Où êtes-vous, pleurs de si peu de durée? Et Mort par qui devait être honorée Ta ferme Amour et itéré4 serment? Donques c'était le but de ta malice De m'asservir sous ombre5 de service? Pardonne-moi, ami, à cette fois, Etant outrée et de dépit et d'ire6 ; Mais je m'assure7, quelque part que tu sois, Q,iautant que moi tu souffres de martyre. 1.

Las: hélas! 2.

La beauté comparée : que tu comparais. 3.

Finement : perfidement. 4.

Itéré : réitéré. 5.

Sous ombre. 6.

fre : colère. 7.

Je m'assure : je m'assure que. Question Comment la structure du poème exprime-t-elle la douleur de la poétesse? LA PRÉPARATION EN SALLE D'EXAMEN (30 MINUTES) Le candidat dispose de 30 minutes pour répondre à la question posée.

Il doit optimiser ce temps en se concentrant au maximum. Il est recommandé de se munir de stabilos pour baliser et faciliter ainsi le repérage des passages à citer au cours de l'exposé.

Le candidat se présente devant l'examinateur avec son plan détaillé au brouillon. 1Lire attentivement le texte et la question L'élève commence par lire attentivement le texte et la question posée.

Il relira celle-ci plusieurs fois si nécessaire, en s'assurant qu'aucun mot du vocabulaire ne lui manque et qu'il comprend la signification de chaque terme utilisé.

La lecture du texte permet de repérer les éléments du paratexte (titre, éditeur, notes éventuelles). 1Comprendre et analyser la question !:analyse de la question est fondamentale, parce qu'elle permet au candidat de comprendre la nature et les enjeux du sujet, et de construire sa réflexion en se gardant bien de réciter par cœur l'explication faite par le professeur de français.

II est tentant de plaquer le plan proposé en cours, mais le candidat doit absolument se garder de cet écueil, au risque de tomber dans le hors-sujet Pour éviter cet écueil, l'élève doit se poser quatre questions préliminaires. Quelles connaissances faut-il mobiliser pour répondre à cette question? Des connaissances sur le contexte culturel et littéraire du xv,e siècle.

Le XVl8 siècle voit l'avènement du sonnet français qui va devenir la forme noble par excellence de la poésie française. L'élève doit être capable de définir un sonnet.

Inspiré de la poésie provençale et italienne du xvie siècle, le sonnet se définit comme une forme fIXe de quatorze vers, composée de deux quatrains et deux tercets qui se répondent souvent comme par un effet de miroir.

Le nom serait d'origine provençale, senh ou sonet désignant une pièce accompagnée de musique.

Le sonnet définit un espace clos qui met en valeur le dernier vers, sous forme de ~hute ou de pointe. : La structure du poème de Louise Labé est la suivante : les rimes sont embrassées et semblables dans les deux quatrains (abba abba).

Dans les tercets, trois rimes nouvelles apparaissent, selon le schéma ccd ede. Ce poème est composé de décasyllabes, ce qui le situe avant les poèmes de la Pléiade souvent écrits en alexandrins. J La structure d'ensemble du sonnet se prête à une double thématique, avec un premier thème évoqué dans les quatrains Qci, l'expression de la douleur de la poétesse) et un second dans les tercets Qci, le désir de vengeance d'une femme outragée qui ne veut pas subir son chagrin, thème qui n'intervient qu'au second tercet).

Le dernier vers constitue la chute ou pointe, souvent appelée concetto par les poètes pétrarquistes, particulièrement travaillée et créant un effet inattendu.

Dans ce poème, la surprise vient de l'affirmation de soi : la poétesse refuse d'être une victime et se met sur le même plan que son amant, d'où son revirement au vers 11. L"élève doit connaître quelques éléments d'histoire littéraire qui :lui permettront d'établir le lien entre le pétrarquisme et les poètes lyonnais.

Avec le Canzoniere, Pétrarque (1304-1374) lègue un 1 lrecueil de sonnets et de chansons qui relève de la poésie lyrique en rapportant l'histoire de sa passion pour Laure.

Les motifs pétrarquistes qui y sont développés, comme l'idéalisation de l'aimée, les tensions entre le désir et la souffrance, l'amour terrestre et l'amour mystique, la rhétorique amoureuse (métaphores, analogies, hyperboles, antithèses) seront repris aussi bien en Italie qu'en France (Délie de Scève, les Amours de Ronsard).

Le poème de Louise Labé s'ancre dans la tradition pétrarquiste. Des connaissances sur l'auteur.

En effet, à l'instar de sa consoeur Pernette du Guillet, Louise Labé (1526-1565) est issue d'un modeste milieu lyonnais de cordiers, ce qui lui valut son surnom de cc Belle Cordière ».

Elle appartient au cénacle des poètes lyonnais comme Pontus de Tyard, Olivier de Magny, Maurice Scève.

Très cultivée, elle est reconnue dans cet univers d'hommes et son œuvre témoigne d'un engagement féminin et féministe avant l'heure.

Dans la préface des Sonnets (1555), dont le poème est extrait, elle vante le mérite« des dames vertueuses », ses contemporaines qui ont la force de caractère de cc regarder un peu au-dessus de leurs quenouilles et de leurs fuseaux ».

Elle contribue à faire connaître et à imiter les poètes pétrarquistes. Attention! L'élève devra éviter de replacer toutes ses connaissances sur l'humanisme, sur le pétrarquisme et sur les poètes lyonnais, ou même sur la vie de Louise Labé et sur ses hypothétiques amours avec Olivier de Magny.

Il ne faut pas confondre le cc je » fictionnel, qui apparaît dans le poème, et le « je » personnel de l'auteur. Des connaissances sur l'extrait.

Le poème est sans titre et porte le numéro XXIII, au sein d'un recueil qui comporte vingt-quatre poèmes.

Ainsi, le poème dresse un bilan amer de l'amour dont Louise Labé vantait l'enchantement parfait au début du recueil, et dont elle constate à présE;int l'impossibilité de l'existence, liée ici à la trahison de l'amant. Quelles informations cette question donne-t-elle sur le texte? La question posée sur le texte de Louise Labé associe une forme, la structure du poème qu'il convient de déterminer, et un fond, qui correspond au thème de ce poème.

Le candidat doit reconnaître la forme du sonnet, composé de deux quatrains et de deux tercets, qui obéissent au schéma suivant abba abba ccd ede.

L'expression de la première personne souligne le registre lyrique utilisé par la poétesse qui exprime une douleur, celle d'une séparation qu'elle n'a pas voulue avec son amant jugé infidèle et qui constitue le thème principal de ce poème. Quelle est la démarche méthodologique induite par la question? La lecture analytique d'un texte se déroule en plusieurs étapes : - repérage des notions-clés induites par l'analyse de la question posée; - identification et analyse des procédés qui vont permettre de comprendre les enjeux du texte. La réponse à la question ne saurait être exclusivement descriptive, elle doit, comme tout travail d'analyse, déboucher sur une interprétation. L'élève commence par observer attentivement la formulation de la question car elle est essentielle : « Comment la structure du poème exprime-t-elle la douleur de la poétesse?» L'adverbe interrogatif « comment » invite le candidat à étudier les procédés poétiques utilisés par Louise Labé.

L'élève sera attentif au jeu des rimes, aux enjambements (v.

4-5}, aux assonances et allitérations.

Mais le candidat peut remarquer que le sonnet est construit sur une antithèse, définie comme la figure de style qui fait apparaître le caractère contradictoire, opposé du sens de deux mots que l'on rapproche.

Les quatrains s'opposent aux tercets, comme les champs lexicaux de l'amour et de la beauté s'opposent à ceux de douleur et de la vengeance.

L'analyse de ces procédés va permettre de comprendre les enjeux de l'antithèse.

Il convient ensuite de déboucher sur une interprétation. Quelles sont les limites imposées par la question? La question invite à se garder d'un écueil majeur : séparer le fond de la forme.

Il ne s'agit pas d'étudier dans un premier temps les caractéristiques formelles du sonnet, puis d'envisager dans un second temps la douleur de la poétesse.

Chaque procédé d'écriture fait sens, et la figure même de l'antithèse permet une interprétation du poème, en illustrant les sentiments contraires et la colère d'une femme outragée. La réponse à la question posée n'épuisera pas toute l'étude du texte.

N'oubliez pas que c'est le texte et la question qui priment. 1Comprendre et analyser le texte En principe, le texte a été lu et relu par l'élève de nombreuses fois au cours de l'année et pendant la période de révisions, ce qui lui permet de naviguer plus rapidement entre les lignes ou les vers. L'élève peut maintenant procéder à une lecture analytique du texte.

Dans un poème, il est conseillé d'analyser chaque vers. Toutefois le sens de certaines constructions poétiques induit souvent le regroupement de plusieurs vers. Vera 1 : il débute sur le mot « Las ». Cet adverbe traduit l'expression stéréotypée d'un sentiment lyrique qui place le poème sous le signe de la tristesse amoureuse.

La poétesse semble exprimer le regret d'un temps révolu, celui où son amant vantait sa beauté et l'aimait d'un amour sincère.

Pourtant, l'adverbe « parfaitement » placé ainsi en fin de vers semble introduire une première fausse note, car il montre que la perfection rhétorique déployée dans les poèmes de l'amant n'est pas la garantie de la perfection de ses sentiments. Vera 2 et vers 3 : le verbe « louas » utilisé sans pronom personnel indique que l'amant est en quelque sorte absent du discours qu'il adresse à sa dame, comme si ses mots n'étaient pas le reflet de sa propre pensée.

D'ailleurs, le lexique utilisé rend la femme aimée abstraite.

Seules les métaphores pétrarquistes, topoi1 de la poésie amoureuse, sont utilisées pour caractériser le discours de l'amant : « ma tresse », métaphore des cheveux relevée par l'épithète « dorée », poncif courtois, et les « deux yeux ».

La rhétorique amoureuse est mise en avant au vers 3 qui compare par une hyperbole les yeux à deux soleils.

Au lieu d'avoir, comme c'est le cas dans la poésie pétrarquiste traditionnelle, une simple métaphore in absentia (c'est-à-dire sans l'adverbe comparatif « comme »), la comparaison est rendue explicite, comme si on avait voulu l'accentuer pour pouvoir en souligner la l'artifice.

Cette rhétorique est dénoncée comme une tromperie, puisque « finement » (v.

4), qui veut dire « perfidement », rime avec « parfaitement » (v.

1).

En fait, ce premier quatrain s'apparente à une parodie du pétrarquisme, puisque Louise Labé reprend les topoi pétrarquistes en les attribuant à un amant qui n'est pas sincère et les dénonce avec amertume et ironie. Vers 4 et vers 5: l'enjambement« finement/tira les traits», créant une continuité entre le premier et le second quatrain, constitue une rupture dans la structure rythmique et strophique traditionnelle du sonnet.

L'adverbe « finement » (v.

4) évoque à la fois l'amour courtois, le Fin' Amour, et la perfidie.

L'image des flèches renvoie à une tradition littéraire illustrée notamment dans le Roman de la rose, celle où l'amour qui naît de la blessure est figuré par des flèches allant des yeux de la dame au cœur de l'amant.

Mais ici l'image est détournée, notamment par l'emploi du substantif« tourment » (v.

5), terme violent, synonyme ici de « torture », et l'accentuation négative de l'expression« tira les traits» (v.

5), marqué par l'allitération en« t » et en « r » qui crée un effet discordant.

Louise Labé a recours à un jeu de mots autour des notions pétrarquistes.

Deux images se superposent : d'une part, celle des « traits » (rayons) que lance le soleil, et d'autre part, les traits (flèches) que l'Amour lance dans les 1.

Topoi : pluriel du mot grec topos, lieu commun. yeux, et à partir de là, dans le cœur de l'homme qu'il veut rendre amoureux, toutes ces images désignant les regards de la dame qui percent le cœur de l'amant. Vers 6 à 8 : dans la suite du second quatrain, l'abstraction est de plus en plus forte.

L:amant et la dame disparaissent derrière les pleurs.

II ne reste finalement que la Mort, évoquée au vers 7.

Celleci est ridiculisée par la poétesse, utilisant la forme interrogative pour tourner en dérision le discours de l'amant.

Les reproches vont croissant : après les compliments fallacieux de l'aimée et le tourment de la blessure amoureuse, Louise Labé fustige les serments de l'amant, dénoncés par une consolation rapide et le fait que, malgré son serment d'en mourir, il survit à sa trahison. C'est le topos de l'amant qui souhaite se tuer, victime de la cruauté de sa dame, ou qui jure de se tuer si un jour il venait à trahir cet amour, qui est ici détourné. Premier tercet : contrairement à la structure traditionnelle du sonnet, le premier tercet ne constitue pas une rupture avec les deux quatrains précédents, mais une continuité logique, amorcée par le connecteur « donques » (v.

9).

On assiste encore à une entorse à la règle du sonnet, puisque ne changent ni la modalité du discours ni le thème.

On retrouve le reproche à l'amant lié au mensonge (« malice », v.

9; « sous ombre de », v.

10).

Le topos pétrarquiste concernant le rapport de vassalité de l'amant à sa dame est détourné.

Le « service » que rend celui-ci tend à soumettre la femme à son désir.

C'est la rancune indignée de la femme trahie qui domine, comme il se doit devant une trahison imméritée et l'idée d'un amour si mal récompensé.

La désolation du vers 1 (« Que me sert.•• »} devant l'inutilité du passé et la vanité des assurances données par l'amant laisse place à la disparition de toute illusion; la logique triomphe sur le sentiment déçu.

Cette logique vise à montrer les calculs de l'amant et ramène la courtoisie à une ruse pour conquérir le cœur d'une femme, renforcée par la rime riche « malice/service en [s] prolongée sur deux vers. », et par l'assonance Vers 11 à 14: ces vers, en marquant un effet de rupture dans la structure du sonnet, constituent le troisième mouvement du poème.

On assiste à un véritable revirement.

Le style change radicalement, le discours passe de la modalité interrogative à la modalité assertive et s'adresse directement à l'amant, avec l'impératif, syntagme « « Pardonne-moi à cette fois » » et l'invocation « ami », alors que le (v.

11) semble vouloir mette en cause tous les reproches à l'amant explicités dans les vers précédents. C'est un effet de rupture qui scande bien les mouvements du cœur, renforcé par l'enjambement entre le premier et le second tercet.

On s'attendrait à des supplications pour reconquérir le cœur de l'aimé, là où la poétesse nous offre des excuses au vers 11, vraies ou feintes d'ailleurs, curieuse façon de mettre sur le compte du dépit et de l'ire tous les reproches précédents, certitude, comme par un juste retour des choses de n'être pas seule à souffrir.

Le sens de ce revirement reste obscur : Louise Labé veut-elle reprendre possession d'elle-même? Estime-t-elle être suffisamment vengée parce que son amant doit lui-même souffrir pour l'avoir quittée? Souffre-t-il avec une autre femme? Toujours est-il que le « je » de la poétesse s'affirme avec force en soulignant l'intensité de ses sentiments : « Etant outrée et de dépit et d'ire » (v.

12), soulignée par l'allitération en « t » et par l'assonance en « i ». ' Aux doutes et aux questions du second quatrain et du premier tercet fait place la certitude, avec la modalité.... »

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