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La quête chevaleresque : une double exigence Avec l'aventure et l'errance, la quête est une notion clé des romans arthuriens...

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« La quête chevaleresque : une double exigence Avec l'aventure et l'errance, la quête est une notion clé des romans arthuriens de Chrétien de Troyes.

Au seuil du récit, le héros quitte la cour; il s'engage tantôt sur la voie de l'errance, au hasard des aventures, tantôt sur la voie de la quête, c'est-à-dire d'une recherche orientée vers un but pré­ cis.

Dans Le Chevalier de la charrette, la quête de Lancelot est bien définie : le chevalier recherche la reine Guenièvre qui a été enlevée par Méléagant. La quête chevaleresque de Lancelot repose sur la prouesse en l'honneur de la dame.

Elle rassemble ainsi dans une double exigence amour et chevalerie.

Nous tenterons donc de défi­ nir les rapports complexes qui régissent les lois de l'amour et des armes dans le roman.

Nous présenterons en premier lieu les deux orientations de la quête du héros.

Puis nous montrerons dans quelle mesure l'amour exalte la valeur che­ valeresque, en soulignant le caractère conflictuel des rapports entre amour et chevalerie dans Le Chevalier de la charrette. UNE DOUBLE QUÊTE La quête de la reine La finalité première de la quête du héros est de retrouver la reine.

Le roi Bademagu n'en doute pas, qui dit à Lancelot: Je m'en vais aisément deviner l'objet que poursuit votre quête. La reine, je crois, est celle que vous cherchez. (v.

3343-3345). La réponse du chevalier souligne clairement la motivation essentielle qui l'anime: Sire, fait-il, vous devinez juste, aucune autre tâche ne m'amène ici. (v. 3346-3347). Le récit ne cesse de rappeler que c'est l'amour qui guide Lancelot tout au long de sa quête.

Bien plus, le narrateur en fait une donnée évidente, qui semble même préexister à l'aventure.

En effet, lorsque Méléagant enlève la reine, après avoir lancé son défi à la cour du roi Arthur, Lancelot est absent; il va surgir de manière inexpliquée sur la route empruntée par Gauvain et les chevaliers du roi, partis précisément à la recherche de la reine.

Le texte est alors très ambigu : tout se passe comme si Lancelot était déjà mystérieusement parti en quête de la reine, avant même de savoir qu'elle a été enlevée.

La mission «libératrice» de Lancelot- qui doit arracher la reine des mains de Méléagantsemble presque secondaire. La quête des prisonniers Toutefois la quête de Lancelot est double.

Le récit tisse des liens étroits entre la quête de la reine et celle des prisonniers.

Le contenu du défi lancé par Méléagant associe déjà les deux.

Les habitants du royaume de Logres, qui sont retenus captifs au pays de Méléagant, seront libérés à une condition: la reine doit en quelque sorte jouer le rôle d'otage. Si l'un des chevaliers arthuriens réussit à vaincre le ravisseur (Méléagant) il délivrera à la fois la reine Guenièvre et tous les prisonniers.

En combattant pour Guenièvre, Lancelot lutte également pour les captifs.

Ainsi, à l'issue du premier combat mené contre Méléagant, la reine et les prisonniers retrouvent leur liberté (v.

3489 et suivants). Mais la quête de la reine l'emporte de loin sur celle des prisonniers, cette seconde quête venant se greffer à la première comme par accident.

La quête trouve son accomplissement dans la nuit d'amour plus que dans la libération des sujets du roi Arthur.

La joie que manifeste la foule envers son sauveur (v.

3904 et suivants) est sans commune mesure avec la joie parfaite (v.

4676 à 4686) que connaissent Lancelot et Guenièvre. L'amour est tout puissant.

Il est le moteur des prouesses chevaleresques accomplies par Lancelot; il est le signe de la valeur du chevalier, mû par la force invincible du désir1• AMOUR ET ÉMULATION l:amour, motif et récompense de l'honneur chevaleresque Le code chevaleresque et courtois instaure un lien étroit entre amour et chevalerie.

L'amant parfait est aussi un chevalier parfait; en ce sens, amour et prouesse accroissent mutuellement leurs valeurs.

L'écrivain normand Wace pose le premier, dans son Roman de Brut (1155), la fameuse équation courtoise selon laquelle les chevaliers accomplissent des exploits pour et à cause des dames qu'ils aiment.

Dans cette perspective, l'amour stimule et exalte la prouesse chevaleresque dont il est la récompense suprême.

Les romans de Chrétien de Troyes associent également amour et action chevaleresque. Dans un premier temps, les exploits que Lancelot réalise,,,. pour la reine répondent tout à fait aux règles de l'éthique courtoise que l'on vient d'énoncer.

Dans de nombreuses scènes, Guenièvre a un rôle d'émulation.

Lancelot est rendu invincible par la présence ou la pensée de la dame. La terrible épreuve du Pont de l'Épée est ainsi surmontée grâce à la force de l'amour.

A la vue du pont menaçant et de l'eau traîtresse, les deux compagnons du chevalier jugent l'épreuve impossible et tentent de dissuader Lancelot de l'entreprendre.

Il va pourtant« courir l'aventure» (v.

3088), en chevalier courageux.

Le narrateur décrit alors le martyre de Lancelot, blessé aux mains, aux genoux et aux pieds, et le miracle de l'amour qui adoucit sa souffrance et lui permet de réussir l'épreuve (v.

3112-3114).

La passion amoureuse est la source de la prouesse et du courage chevaleresques. Le premier combat victorieux contre Méléagant s'explique de la même manière.

Rappelons-en les principales étapes. 1.

Voir le chapitre 11, consacré à l'amour courtois. Après avoir franchi le Pont de l'Épée, Lancelot va affronter Méléagant.

La reine, placée à une fenêtre, assiste au combat sans que le chevalier soit averti de sa présence.

L'affrontement débute et Lancelot, affaibli par ses blessures, est en train de perdre.

C'est alors qu'une jeune fille avisée lui montre, pour lui redonner force et courage, la reine assise aux loges de la tour.

Après un moment d'extase, où Lancelot se fige sous le regard de la dame, la vue de la femme aimée va redoubler son ardeur.

L'amour le rend alors terrible et indomptable grâce à celle [.

..

] qui a mis en lui cette flamme d'où lui vient tant de constance à la regarder, cette flamme qui lui donnait si grande ardeur contre Méléagant qu'il le menait partout à sa guise (v.

3750-3754). L'amour attise la prouesse du chevalier, en faisant de lui le meilleur chevalier du monde.

Mais il arrive dans le roman que l'alliance de la prouesse et de l'amour ne produise pas l'effet attendu. Les éclipses de la prouesse Le héros connaît parfois des éclipses de la prouesse, c'està-dire des moments de défaillance et de fléchissement.

Par deux fois, Lancelot est amené à nier les valeurs chevaleresques de gloire et d'honneur, en raison de sa soumission à la reine.

Le service d'amour le conduit à des situations déshonorantes.

C'est ainsi qu'il monte sur la charrette d'infamie, attiré par le nain qui lui promet des nouvelles de Guenièvre.

Son geste n'est pas digne d'un chevalier, puisque la charrette est réservée aux traîtres et.... »

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