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Le style Une langue simple, une écriture alerte et variée, une verve comique et burlesque, telles sont les caractéristiques essen­...

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« Le style Une langue simple, une écriture alerte et variée, une verve comique et burlesque, telles sont les caractéristiques essen­ tielles du style de Candide.

Voltaire ne s'appesantit jamais, il procède au contraire par coupures et ellipses, échappant ainsi aux dangers de l'éloquence et de l'enflure verbale.

L'inco­ hérence du monde et la candeur aveugle de l'optimisme apparaîtront de façon d'autant plus nette dans un climat de sécheresse et de dérision qui ne laisse aucune place à l'attendrissement.

Quelques échappées exotiques et merveil­ leuses rythment le récit, conférant au conte sa tonalité orientale fort appréciée à l'époque.

Mais cet orientalisme n'est jamais gratuit.

Voltaire l'exploite habilement à des fins philosophiques: le paradis n'existe pas, si ce n'est dans les spéculations théoriques et les rêveries idéalistes. UN TEMPO RAPIDE Un rythme rapide entraîne le lecteur dans un tempo vif et alerte qui ne lui laisse guère le temps de reprendre haleine : à peine une scène s'achève-t-elle qu'une autre commence. Candide est chassé du château pour se retrouver quelques lignes plus loin enrôlé dans l'armée des Bulgares.

Au chapitre 5, les héros marchent vers Lisbonne : « A peine ont­ ils mis le pied dans la ville (...) qu'ils sentent la terre trembler sous leurs pas.

» Aucun temps mort dans ce récit, où les faits sont parfois même concomitants.

Ainsi Candide, après avoir été malmené par les Inquisiteurs (chap.

6), « s'en retournait.

se soutenant à peine (...), lorsqu'une vieille l'aborda ».

Les indicateurs temporels jalonnent la narration pour en précipiter le rythme - le lendemain : « Candide, tout transi, se traîna le lendemain vers la ville voisine » (chap.

2) ; 1a - déjà...

quand: « Il avait déjà un peu de peau, et pouvait marcher, quand le roi des Bulgares livra bataille au roi des Abares » (chap.

2) ; - bientôt: « La vieille reparut bientôt » (chap.

7) ; - aussitôt: « Aussitôt Candide selle les trois chevaux » (chap.

9); - sans perdre de temps : « On envoya sans perdre de temps un vaisseau à leur poursuite» (chap.

13) ; - sur-le-champ : « Le sergent alla sur-le-champ rendre compte de ce discours au commandant» (chap.14) ; - en un clin d'ail: « Tout cela se fit en un clin d'œil » (chap. 15), etc. L'abondance des verbes et le recours fréquent au passé simple et au présent de narration permettent à Voltaire de renforcer l'impression de rapidité, par exemple, dans le récit de Cunégonde (chap.

8) : Ils égorgèrent mon père et mon frère, et coupèrent ma mère par morceaux.

Un grand Bulgare, haut de six pieds, voyant qu'à ce spectacle j'avais perdu connaissance, se mit à me violer ; cela me fit revenir, je repris mes sens, je criai, je me débattis, je mordis, j'égratignai, je voulais arracher les yeux... Cette célérité donne au texte une gaieté macabre : les calamités se succèdent sans fin, constamment ponctuées par l'énoncé d'une proposition optimiste qui les considère dignes du meilleur des mondes possibles, ce qui est manifestement absurde. l{ ,~, \ SOBRIÉTÉ DE L'ÉCRITURE Le style se caractérise par une large économie de moyens, avec une syntaxe simple et l'art de la touche juste. On notera dans tout le texte la simplicité des phrases juxtaposées ou coordonnées par «et».

Voici, par exemple, la description du tremblement de terre (chap.

5) : Des tourbillons de flammes et de cendres couvrent les rues et les places publiques : les maisons s'écroulent, les toits sont renversés sur les fondements', et les 1.

Les fondations. 1 7'1 fondements se dispersent ; trente mille habitants de tout âge et de tout sexe sont écrasés sous des ruines. Les subordonnées sont rares, réduites à quelques relatives ou complétives.

et, moins souvent encore, des circonstancielles.

Cette syntaxe épurée contribue à la neutralité du ton voulue par Voltaire : les faits sont cités tels quels et nullement interprétés par l'auteur.

En effet, l'emploi d'une circonstancielle dans un texte introduit souvent une nuance de subjectivité, ou un jugement implicite.

Voltaire laisse au lecteur le soin de tirer ses propres conclusions. Cette sobriété n'empêche pas l'auteur d'en dire beaucoup en quelques mots, par un art consommé de la touche juste, qu'il s'agisse de décrire un personnage (« Cunégonde, âgée de dix-sept ans, était haute en couleur, fraîche, grasse, appétissante», chap.

1), d'exprimer des circonstances extérieures (« L'air s'obscurcit, les vents soufflèrent des quatre coins du monde, et le vaisseau fut assailli de la plus horrible tempête à la vue du port de Lisbonne».

chap.

4), de planter un décor (la vieille « mène Candide, par un escalier dérobé, dans un cabinet doré, le laisse sur un canapé de brocart, referme la porte, et s'en va», chap.

7), ou d'évoquer un état d'âme (« Candide, chassé du paradis terrestre, marcha longtemps sans savoir où, pleurant, levant les yeux au ciel, les tournant souvent vers le plus beau des châteaux qui renfermait la plus belle des baronnettes », chap.

2). LES JEUX DU LANGAGE La concision n'empêche pas les surprises et les jeux verbaux, où sous la transparence apparente se glisse tantôt une remarque psychologique très fine, tantôt l'intention critique, d'autant plus efficace qu'elle est plus discrète. Partout, et surtout dans les dialogues, les phrases de Voltaire s'amusent.

La grammaire est violée, comme Cunégonde, « une fois, mais sa vertu s'en affermit» (chap.

8): « Enfin mon Juif, intimidé, conclut un marché, par lequel la maison et moi leur appartiendraient à tous deux en commun.

» Normalement.

la première personne l'emporte sur la troisième pour l'accord du verbe; ici, non.

Cunégonde est considérée comme un objet. Ailleurs.

les passés simples participent ironiquement à la drôlerie : « Je vous dirai tout cela, répliqua la dame ; mais il 72 ~ r 1 faut auparavant que vous m'appreniez tout ce qui vous est arrivé depuis le baiser innocent que vous me donnâtes et les coups de pied que vous reçûtes» (chap.

7). Et toujours la dénonciation satirique demeure au premier plan, quelle que soit la vitesse de la phrase.

L'unité du conte est constamment présente: « Il s'en retournait se soutenant à peine, prêché, fessé, absous et béni » (chap.

6).

Ce sont maintenant les participes qui sont à la fête, et la présence des coups au milieu des actions religieuses constitue une charge contre l'intolérance et la cruauté hypocrites de l'inquisition. Souvent aussi, les relatives ou les circonstancielles, tout en énonçant des faits, ridiculisent divers adversaires de l'auteur, sans que rien ne laisse prévoir ces pointes d'ironie sur la prétention nobiliaire par exemple (la sœur du baron ne voulut jamais épouser l'honnête gentilhomme qui était le père de Candide, « parce qu'il n'avait pu prouver que soixante et onze quartiers» , chap.

1), ou sur les mauvais poètes (« Et toute l'Italie fit pour moi des sonnets dont il n'y eut pas un seul de passable.», chap..... »

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