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« L'encre, c'est de la bile noire. La mélancolie, à travers les liges, gnide et inspire !'écrivain. Qu'on la considère...

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« « L'encre, c'est de la bile noire.

La mélancolie, à travers les liges, gnide et inspire !'écrivain.

Qu'on la considère comme une maladie -une folie même-un péché ou une volupté, elle accompagne toujours Je réflexe d'écrire.» Votre expérience de la littérature vous incite-t-elle à souscrire à cette opinion? Sans vous limiter à une période donnée, vous exposerez votre point de we dans un développement ordonné appuyé sur des_exemples précis. Source Le texte cité a été publié, sans signature, dans le« Magazine Littéraire i- Guillet/aoOt 1987). ANALYSE DU SUJET/ RECHERCHE D'IDÉES « Le soleil noir de la mélancolie» (Nerval) « Les plus désespérés sont les chantsîes plus beaux Et j'en sais d'immortels qui sont de purs sanglots» (Musset) On n'en fmirait pas d'aligner les citations d'auteurs mettant au premier plan de la création littéraire et poétique la tristesse, l'angoisse, le désespoir, le spleen, le «blues», etc. On vous demande de donner votre point de we(terme assez large), étayé sur des exemples précis, sur une opinion.

Laquelle? L'activité d'écriture (il s'agit des écrivains, bien entendu) aurait pour source d'inspiration, à toutes les · époques, la mélancolie, terme peu explicité par la citation.

L'une des tâches du devoir sera d'ailleurs de préciser les formes ou modalités diverses que la mélancolie a pu prendre selon les époques (voir l'énumération des termes ci-dessus).

Noter que la« bile noire» est précisément I'« humeur» (c'est-à­ dire la sécrétion) à laquelle on attribuait les·accès de mélancolie, dans l'an­ cienne médecine (voir Molière...

). Noter aussi que la mélancolie est envisagée dans des aspects positifs (volupté: « ...

le bonheur d'être triste», Hugo; penser à la« délectation morose»). Le sujet' pose un rapport entre une activité artistique (écrire) et un état psychologique (la mélancolie).

Rapport de quelle nature? Nous trouvons les mots guide, inspire, accompagne : les deux premiers indiqueraient un rapport de cause à effet, le troisième i,me simple corrélation. Quoi qu'il en soit, il est bon de réfléchir sur les modalités de ce rapport en fonction de quelques exemples, sur la validité ou la fonction de ce rapport, autrement dit sur le comment et sur le pourquoi. Mai& il faudra bien aussi se poser la question de la fatalité de ce rapport, inscrite dans le mot toujours et dans l'équivalence encre/bile noire. - Notre premier mouvement serait de distinguer deux grandes sortes de mélan­ colies: les ponctuelles (ou circonstancielles) et les fondamentales (ou essentielles), De nombreuses œuvres ont en effet pour origine des déceptions, chagrins, deuils subis par leurs auteurs en un moment particulier de leur vie : Victor Hugo perd sa fille aînée Léopoldine et l'expérience de cette douleur nourrira les poèmes des Contemplations; Alfred de Musset écrit La nuit de mafaprès sa rupture avec George Sand; la traversée de la guerre (14-18 ou 39-45) a suscité bien des textes• noirs», de Cendrars à Céline, etc.

Il faudrait, pour ces sentiments fondés sur des événements précis et circonscrits, recourir à des termes comme chagrin, tristesse, désespoir, et voir, dans l'écriture qui s'y trouve liée, une tentative d'expression, de dépassement, voire de délivrance. Augoisse, spleen, mal de vivre, vague des passions sont des termes qui renvoient à un état d'esprit plus diffus, plus continu, plus essentiel. Contentons-nous de quelques exemples. Chez.

certains auteurs romantiques, la •mélancolie» est l'expression d'un culte systématique de l'émotion et de la subjectivité, opposé au triomphe de la raison et de la conscience morale des auteurs classiques.

• Ah ! frappe-toi le cœur, c'est là qu'est le génie», écrit Musset.

Et dans ce cœur, on trouve: amours contrariées, aspirations non adaptées au siècle, émotions contenues, etc. _ Le •spleen• baudelairien est une variation sur l'ennui quasi métaphysique qui gagne le poète au spectacle de son temps.

Il s'articule à la quête de l'Idéal, à jamais perdu,aux thèmes du NeverMore(• Jamais plus•: cf.

E.

Poe), de la Vie Antérieure et de L'invitation au voyage. Le pessimisme fondamental de maints romanciers s'alimente de la vision de rapports sociaux conflictuels et corrompus (Maupassant et la France del880, Raymond Chandler et la Californie des années 1930-40). Dans tous les cas, la mélancolie a donné naissance à des formes et même à des genres littéraires : élégie, romannoir américain, théâtre de l'absurde (Beckett, • farces tragiques • de Ionesco). Tout ceci ne va_pas, parfois, sans humour (noir, bien entendu) et jubilation. Boris Vian (L'Ecume desjours) est incontestablement un auteur très drôle et très désespéré.

Cioran se délecte à composer de sinistres aphorismes rassem­ blés dans des livres ayant pour titre De l'inconvénient d'être néou Précis de décomposition ...

Le dandysme, dont Baudelaire est le plus illustre représen­ tant, mêle étroitement le pessimisme et l'ironie.

La: littérature prend alors l'allure.... »

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