L'épargne est-elle toujours nécessaire à la croissance économique? INTRODUCTION !li Accroche Depuis les années soixante-dix, les taux d'épargne ont diminué...
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L'épargne est-elle toujours nécessaire à la croissance économique?
INTRODUCTION
!li Accroche
Depuis les années soixante-dix, les taux d'épargne ont diminué dans les
pays industrialisés parallèlement au ralentissement de la croissance et à l'élé
vation des taux d'intérêts réels à long terme.
Face aux besoins des pays en
développement, aux problèmes soulevés par le financement des retraites dans
les pays développés, l'économie souffre-t-elle d'une pénurie mondiale
d'épargne?
� Définitions et problématique
Définie comme l'augmentation sur une longue période du produit par tête,
la croissance économique dépend de multiples facteurs.
Pour produire plus,
pour mettre en œuvre les innovations, il est nécessaire d'investir, d'accroître
le capital productif.
Comme les investissements doivent être financés, tout le
revenu ne peut être affecté à des dépenses de consommation.
Il est certes
possible de financer les investissements par création monétaire mais ce type
de financement crée un risque inflationniste, au moins à moyen terme.
Différence entre le revenu non consommé ou non distribué, l'épargne semble
bien nécessaire à la réalisation d'une croissance économique équilibrée,
permettant le plein-emploi de la population active et évitant le risque infla
tionniste.
Mais faut-il d'abord épargner pour ensuite investir? Ni les théories,
ni les faits ne permettent de trancher nettement cette question.
Dans la tradi
tion classique et néo-classique, l'épargne est un préalable indispensable à la
croissance et la crise des années quatre-vingt s'explique par une dégradation
de la situation financière des entreprises : moins de profits signifie moins
d'épargne et moins d'investissement.
Pour les keynésiens, le recours à
l'emprunt ou à la création monétaire permet de financer l'investissement :
l'épargne est la conséquence de la croissance et de l'augmentation du revenu.
L'expérience historique montre que les pays à croissance rapide sont souvent
ceux dont le taux d'épargne est élevé.
Pourtant, la décision d'investir n'est pas
uniquement fonction des profits réalisés par les entreprises et l'épargne n'est
pas le seul mode de financement de la croissance.
Bl,11
Annonce du plan
Indispensable au financement de la croissance économique, l'épargne n'est
pas nécessairement une condition préalable à la croissance (I).
Une croissance
équilibrée nécessite un partage adéquat entre consommation et épargne et des
circuits financiers permettant l'ajustement entre les besoins et les capacités de
financement des agents économiques (II).
PARTIE J
Indispensable au financement des investissements (A), l'épargne est néces
saire à la croissance (B) sans en être pour autant un préalable (C).
A.
L'épargne permet de financer les investissements indispensables à la croissance
économique.
La comptabilité nationale française définit l'épargne comme «la partie du
revenu non consommé ou non distribué et disponible pour l'accumulation
d'actifs réels et financiers».
Cette définition permet de mettre en évidence la
double face de l'épargne: l'épargne est un solde qui permet soit d'augmenter
directement le patrimoine (achats de logements, de biens d'équipement) soit
de souscrire des titres (actions, obligations) et des créances (prêts) qui permet
tront à d'autres agents économiques de financer leurs investissements.
Les ménages et les entreprises sont les deux principaux agents qui
épargnent.
Ils peuvent dégager une capacité de financement si leur épargne
est supérieure à leur investissement ou un besoin de financement dans le cas
contraire.
En économie fermée, l'épargne nationale est nécessairement égale à
l'investissement réalisé.
Ceci ne signifie pas pour autant que chaque agent
économique soit obligé de financer ses investissements par de l'épargne
préalable.
Il est possible de transférer l'épargne des agents à capacité de finan
cement vers les agents à besoin de financement.
En économie ouverte, un pays
peut dégager un besoin de financement qui sera comblé par les capacités de
financement des autres pays.
Les déficits des balances courantes des uns
peuvent ainsi être financés par les excédents des autres.
Sauf à financer les investissements par création monétaire, l'épargne
semble bien nécessaire à la croissance.
Certes, après la Seconde Guerre
mondiale, le modèle de Solow montre qu'à long terme, la croissance écono
mique ne dépend que de la croissance de la population et du progrès
technique.
Le taux d'épargne n'aurait pas d'impact sur la croissance.
Mais
Solow n'explique ni l'origine du progrès technique, ni celle de son finance
ment.
Il faut attendre les années soixante-dix et les théories de la croissance
endogène pour que soient à nouveau pris en compte dans la croissance écono
mique les comportements des agents économiques.
Les théoriciens de la crois
sance endogène expliquent la croissance par une grande diversité de facteurs
investissements privés mais aussi efforts en recherche et développement,
investissements publics et formation de la main-d'œuvre.
L'épargne, parce
qu'elle permet de financer l'investissement, l'innovation, la recherche et la
formation est donc une condition nécessaire à la croissance économique.
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B.
Il existe généralement une corrélation positive entre épargne et croissance.
L'histoire économique des pays développés et des pays en développement
permet d'établir une relation souvent positive entre épargne et croissance.
À la fin du xvme siècle et au début du xrx• siècle, le coût du capital est relati
vement faible et un pays comme la Grande-Bretagne finance aisément ses
investissements par l'autofinancement des entreprises, c'est-à-dire par le
réinvestissement d'une partie des profits.
Au cours du siècle, le développe
ment du marché boursier permet aux grandes entreprises de financer des
investissements plus coûteux en émettant des actions ou des obligations.
Des
impôts lourds prélevés sur les paysans permettent à des pays comme le Japon
ou la Russie de pallier l'insuffisance d'épargne spontanée.
Par ailleurs, une
lj circulation internationale de l'épargne se développe à partir de la deuxième
i moitié du XIXe siècle.
Des prêts à long terme, à des taux d'intérêt relativement
lj faibles, sont octroyés par les premiers pays de la Révolution industrielle,
principalement la Grande-Bretagne, aux pays en voie d'industrialisation
comme
les États-Unis, le Canada ou la Russie.
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Au xxe siècle, dans une étude parue en 1980, M.
Feldstein et C.
Horioka
I
montrent que des taux d'épargne nationaux élevés sont associés à des taux
d'investissement forts et à une croissance rapide.
Les transferts d'épargne
i entre pays seraient relativement faibles.
Ainsi, la rapidité de la croissance
japonaise, pendant les années soixante, s'accompagne-t-elle d'un taux
t' d'épargne net (hors amortissement du capital) supérieur à 20% du PIB.
i! De même, l'importance de l'épargne explique, entre autres facteurs, la rapidité
de la croissance dans certains pays asiatiques au cours de la décennie des
années quatre-vingt.
Une étude de YOCDE portant sur vingt pays industria
lisés, entre 1985 et 1995, confirme la relation positive entre épargne et crois
sance : les 14 pays ayant connu la croissance la plus forte et les taux
il d'investissement les plus élevés sont ceux dont l'épargne était supérieure à
25% du PIB.
A contrario, l'insuffisance de l'épargne peut expliquer les difficultés de
!j
•1
démarrage de certains pays en développement où la croissance démographique exige des investissements privés et publics élevés.
De même, la baisse
du taux d'épargne, observable dans les pays développés depuis les années
;, soixante-dix, n'est pas étrangère au ralentissement de la croissance.
Ainsi, en
France, le taux d'épargne brut national est-il passé de 27,5% du PIB dans la
décennie des années soixante à 19,4% dans la première moitié des années
quatre-vingt-dix.
1,
li
!:
Il C.
Les théories économiques analysent l'épargne soit comme un préalable à la
croissance soit comme une conséquence de la croissance.
l1
Si une corrélation positive peut être établie entre épargne et croissance, il
est plus difficile de savoir si l'épargne précède la croissance ou si elle en est la
conséquence.
Traditionnellement, deux conceptions s'affrontent : dans la
tradition classique, l'épargne est une condition préalable à la croissance, dans
la tradition keynésienne, l'épargne est la conséquence de l'augmentation du
revenu.
Pour les classiques, la croissance dépend de l'accumulation du capital et
par conséquent de l'épargne puisque les agents économiques qui épargnent
sont les mêmes que ceux qui investissent.
L'épargne se confond avec les
profits réinvestis.
On retrouve d'ailleurs la même idée chez K.
Marx
l'épargne permet l'accumulation du capital et la formation de la plus-value.
À
terme, pour D.
Ricardo, la réduction des profits des entrepreneurs capitalistes
conduira à un état stationnaire, sans croissance.
Cette conception classique du
rôle de l'épargne dans la croissance est remise à l'honneur au moment des
chocs pétroliers.
L'école libérale, et plus spécialement les économistes de
l'offre, expliquent le ralentissement de la croissance économique ·dans les pays
développés, à partir des années quatre-vingt, par la dégradation des profits
des entreprises: la hausse du coût des consommations intermédiaires ralentit
la croissance de la valeur ajoutée alors que les salaires, indexés sur l'inflation,
continuent à progresser.
Le partage de la valeur ajoutée devient défavorable
aux entreprises ce qui freine l'investissement.
Pour renouer avec la croissance,
il est nécessaire de reconstituer l'épargne des entreprises.
Pour les keynésiens, l'épargne est définie comme la part du revenu qui
reste aux ménages après avoir consommé.
Comme la consommation, selon la
«loi psychologique fondamentale» augmente avec le revenu mais à un rythme
plus faible, l'épargne est une fonction croissante du revenu.
La relation de
causalité établie par les classiques entre épargne et investissement est donc
inversée.
Plus de demande entraîne plus de production, donc plus de revenu
et plus d'épargne.
Comme l'explique G.
Myrdal dans son ouvrage L'Équilibre
monétaire paru en 1930, l'épargne peut être, ex ante, inférieure à l'investisse
ment mais les variations de revenu engendrées par l'investissement vont
permettre d'augmenter le revenu et par conséquent l'épargne.
Ex post, l'inves
tissement est égal à l'épargne.
Dans ces conditions, l'investissement peut être
financé, temporairement, non par l'épargne, mais par création monétaire ou
par emprunt.
Il est difficile d'apprécier empiriquement le sens de la causalité entre
épargne et croissance.
Il est cependant possible de noter, qu'au cours des
Trente Glorieuses, en France, le financement de la croissance est assurée
simultanément par le crédit bancaire, l'autofinancement et la création
monétaire.
Un cercle vertueux s'enclenche : il n'est plus possible de savoir si
l'investissement précède l'épargne ou si l'épargne précède l'investissement.
Par ailleurs, la croissance rapide des pays d'Asie de l'Est semble avoir précédé
de quelques années celle du taux d'épargne et, dans les pays de l'OCDE, le
ralentissement de la croissance à la fin des années soixante-dix a été suivi par
une chute du taux d'épargne.
PARTIE
II
Il ne suffit cependant pas d'épargner pour investir (A), encore faut-il un
partage adéquat entre consommation et épargne (B) et des circuits financiers
efficaces (C).
Ill A.
Il ne suffit pas d'épargner pour investir.
L'existence d'une épargne préalable n'est pas forcément synonyme
d'investissement.
Les entreprises peuvent préférer les placements financiers
aux investissements et les ménages, les liquidités aux emplois longs.
Au niveau des entreprises, une épargne préalable ne suffit pas pour
prendre la décision d'investir.
Il faut tenir compte des taux d'intérêt réels et de
l'efficacité marginale du capital qui dépend des anticipations sur l'évolution
de la demande et du coût de l'investissement.
L'entreprise n'investit que si
l'efficacité marginale du capital est supérieure au taux d'intérêt.
Par consé
quent, une hausse du taux d'intérêt réel et (ou)....
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