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L'épreuve comprend deux parties 1. Vous ferez d'abord de ce texte, à votre gré, un résumé (en suivant le fil...

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« L'épreuve comprend deux parties 1.

Vous ferez d'abord de ce texte, à votre gré, un résumé (en suivant le fil du texte) ou une analyse (en reconstituant la structure logique de la pen­ sée, c'est-à-dire en mettant en relief l'idée principale et les rapports qu'entretiennent avec elle les idées secondaires).

Vous indiquerez nette­ ment votre choix au début de la copie. 2.

Dans une seconde partie, que vous intitulerez discussion, vous déga­ gerez du texte un problème qui offre une réelle consistance et qui vous aura intéressé.

Vous en préciserez les éléments et vous exposerez vos vues personnelles sous la forme d'une argumentation ordonnée, étayée sur des faits et menant à une conclusion. LA VALEUR ÉDUCATIVE DE L'ENSEIGNEMENT DES LETTRES Savoir parler procure un plaisir, ce que je pourrais appeler le bonheur de l'expression.

Ce bonheur est fait pour l'essentiel d'un sentiment d'aisance, c'est-à-dire de liberté.

Affranchi des limitations que sont les difficultés d'expression, on est plus soi-même, on s'affirme mieux, on vit plus pleine­ ment et sans doute on pense plus nettement. Mais la science du langage nous donne une autre liberté encore, que je crois aujourd'hui précieuse.

Elle nous libère de la fascination qu'exercent, sur ceux qui connaissent mal les pouvoirs des mots, les moyens massifs d'expression que sont les affiches, la télévision, les magazines.

Un déferle­ ment d'images et de mots nous assaille à chaque instant de notre journée, et jusque chez nous, sans possibilité pour nous de répondre.

Enseigner ce que parler veut dire, c'est armer contre le prestige et les pièges du langage, contre ses maîtres-mots, ses clichés et ses slogans; c'est affranchir de leur état d'infériorité ceux qui n'ont pas eux-mêmes un langage exercé. Le «littéraire» doit être celui qui ne se paye pas de mots, mais aussi qu'on ne paye pas de mots.

Pour déjouer les pièges, pour préserver la liberté, le maniement d'un français de base ne suffit évidemment pas.

Pour garder à l'égard d'un langage et de ses séductions le recul nécessaire à un libre jugement, il faut savoir en pratiquer plusieurs, d'aujourd'hui, et d'hier; être en quelque sorte polyglotte en sa propre langue.

On voit com­ bien il importe de reconnaître la diversité des registres de langage, et d'en apprécier l'usage; non pour établir une hiérarchie qui va du vulgaire au dis­ tingué, de la roture à la noblesse; mais pour apprendre à jouer de ces diffé­ rents registres et, en les mettant à la disposition de tous, les arracher peut­ être à leurs particularismes sociaux.

On voit aussi, dans cette même pers­ pective, de quel secours peuvent être l'enseignement, et l'exercice, même modeste, des langues anciennes pour enrichir la science de notre propre langue. Quand d'une part le langage - et l'esprit - risquent d'être conditionnés par les mass-media (dont les intentions peuvent être moins désintéressées que les nôtres); quand d'autre part le langage le plus parlé est celui des « bulles» de la bande dessinée, celui des clichés et des onomatopées, quand toute l'éloquence du doute et de la révolte se réduit à des« bof» et ,des« ralbols », quand la« littérature» se limite pour beaucoup au texte des chansons à la mode, des «tubes»; devant l'indéniable pauvreté d'un lan­ gage qui n'a souvent de relief que celui de la violence; alors les études litté­ raires, à tous les niveaux, doivent remonter le courant de la paresse ver­ bale, enseigner la justesse et la nuance. Apprendre à parler, et ce que parler veut dire, mais surtout apprendre à parler aux autres.

Apprendre que la parole n'est pas destinée au soliloque 1, mais à la communication.

Cette évidence nous est familière.

Mais curieuse­ ment nos élèves l'oublient ou l'ignorent, au moins dès qu'il s'agit des exer­ cices auxquels nous IEl,S soumettons.

La recherche d'une forme les enferme souvent dans un formalisme commode, jeu de mots tout occupé de lui1.

Soliloque : discours de celui qui se parle à lui-même. même, 'et qui ne débouche sur rien.

Nous avons donc à leur rapp�ler ou à leur révéler qu'on parle pour être entendu, et qu'on écrit pour être lu; que c'est la seule règle fondamentale de toute rhétorique.

Je suis étoriné pour ma part de ce que tant parlent sans souci d'être compris, n'écrivent que pour eux; je sais que ce qu'écrivent parfois leurs aînés ne les laisse pas sans excuse. Notre enseignement peut utilement orienter tous ses exercices dans le sens de la communication, je préférerais dire: de la publication.

Parler, écrire, sont toujours des actes publics.

Un exposé apporte aux autres le résultat d'une recherche personnelle; la dissertation est communication d'une opinion; la narration fait partager une aventure, une expérience, un rêve; la description fait pour d'autres l'inventaire d'un tableau, d'un pay­ sage, d'une scène.

On mettra l'accent sur l'importance, pour la communi­ cation, de l'architecture de la pensée; il ne suffit pas d'avoir des idlies et de savoir les dire, il faut trouver un ordre pour les dire, non par simple forma­ lité, mais parce que construire un exposé, un commentaire, une 'disserta­ tion, c'est aider l'autre à vous suivre, c'est lui tracer le chemin et lui tendre la main. S'exprirr,ier pour être compris représente un effort; mais celui qui con­ sent à cet effort reconnaît du même coup en l'autre un interlocuteur, qui a le droit de comprendre, et qui mérite qu'on se tourne vers lùi, qu'on s'adresse à lui. Je ne veux pas insister sur ces évidences.

Mais seulement souligner que notre rôle est d'amener nos élèves à trouver un terrain d'entente.

Et que ce terrain d'entente est, au moins, au départ, celui de la langue.

Il n'est pas question bien sûr d'imposer à' tous une sorte d'esperanto commode et fade, mais de refuser tout ce qui sépare les interlocuteurs et faussé la com­ munication : l'incorrection, le laisser-aller, l'à-peu-près; ou le goût du jar­ gon, du mot qui fait savant, mais entretiént le doute, la méfiance ou le malaise chez l'auditeur.

Cet exercice de la langue ne brise par l'élan person­ nel, le rythme propre, la couleur d'une expression particulière; mais il la " rappelle à sa vocation de publicité. ) Ici encore, aider une expression à prendre forme, c'est former un esprit; c'est favoriser une disposition d'accueil, d'ouverture à autrui, un souci de partage. Je sais qu'une certaine technicité du langage peut aider à la désignation précise de tels phénomènes littéraires; et que le langage de nos élèves s'enrichit légitimement de termes plus savants, philosophiques ou'linguisti­ ques.

Pourtant il importe de se demander si nous avons à former' des spé­ cialistes de l'analyse (ou de la psychanalyse) textuelle, ou de la philosophie de l'écriture, enfermés dans leur recherche et leur langage, ou des indivi­ dus aptes à communiquer avec autrui, avec tous les autres.

Paradoxale­ ment, quand semble diminuer l'obstacle des langues étrangères, !a spécia­ lisation des langages fait de notre monde une Babel 2 où l'on a parfois peine 2.

Babel : allusion à la tour'de Babel que, selon.... »

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