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LES ENJEUX DU BIOGRAPHIQUE Textes 1. SAINT-SIMON, Mémoires pour l'année 1718 2. CASANOVA, Histoire de ma vie, tome IV, chapitre...

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« LES ENJEUX DU BIOGRAPHIQUE Textes 1.

SAINT-SIMON, Mémoires pour l'année 1718 2.

CASANOVA, Histoire de ma vie, tome IV, chapitre 16 (posth.

1789-1798) 3.

François-René de CHATEAUBRIAND, Vie de Rancé (1844) 4.

Alain ROBBE-GRILLET, Le Miroir qui revient (1985) Objet d'étude : le biographique � QUESTIONS (4 points) 1.

Faites la part du récit et du discours dans le texte de Saint-Simon. 2.

Reformulez en une phrase le problème posé par Alain Robbe-Grillet. TRAVAIL D'ÉCRITURE (16 points) 1.

Commentaire Vous ferez le commentaire du texte de Chateaubriand. 2.

Dissertation Vous vous interrogerez sur les enjeux du genre biographique en vous fon­ dant aussi bien sur les textes du corpus que sur les œuvres étudiées en classe et sur vos lectures personnelles. 3.

Écriture d'invention L'écrivain dont vous avez lu l'autobiographie cette année écrit à un ami en lui envoyant son livre dédicacé.

Il lui explique son dessin, ses difficultés, ses motivations secrètes.

Ces indications ne sont nullement contraignantes. Vous avez toute latitude d'organiser votre lettre à votre guise. CORPUS ■ Texte 1 : s 10 1s 20 2s SAINT-SIMON, Mémoires pour l'année 1718 La destitution du duc de Maine Enfin le Garde des sceaux ouvrit la bouche, et dès la première période Il annonça la chute d'un des frères 1 et la conservation de l'autre2 • L'effet de cette période sur tous les visages est inexprimable.

Quelque occupé que je fusse à contenir le mien, je n'en perdis pourtant aucune chose.

L'étonnement prévalut aux autres passions.

Beaucoup parurent aises, soit équité, soit haine pour le duc de Maine, soit affection pour le comte de Toulouse; plusieurs consternés.

Le premier président perdit toute contenance; son visage, si suffisant et si audacieux, fut saisi d'un mouvement convulsif; l'excès seul de sa rage le préserva de l'évanouissement.

Ce fut bien pis à la lecture de la déclaration.

Chaque mot était législatif et portait une chute nouvelle.

L'attention était générale, tenait chacun immobile pour n'en pas perdre un mot, et les yeux sur le greffier qui lisait.

Vers le tiers de cette lec­ ture, le premier président, grinçant le peu de dents qui lui restaient, se laissa tomber le front sur son bâton, qu'il tenait à deux mains, et, en cette singulière posture et si marquée, acheva d'entendre cette lecture si acca� blante pour lui, si résurrective3 pour nous.

Moi cependant je me mourais de joie; j'en étais à craindre la défaillance; mon cœur, dilaté à l'excès, ne trou­ vait plus d'espace à s'étendre.

La violence que je me faisais pour ne rien laisser échapper était infinie, et néanmoins ce tourment était délicieux. [.•.] 4.

Je triomphais, je me vengeais, je nageais dans ma vengeance; je jouissais du plein accomplissement des désirs les plus véhéments et les plus continus de toute ma vie.

J'étais tenté de ne me plus soucier de rien. Toutefois je ne laissais pas d'entendre cette vivifiante lecture, dont tous les mots résonnaient sur mon cœur comme l'archet sur un instrument, et d'examiner en même temps les impressions différentes qu'elle faisait sur chacun. 1. 2. 3. 4. Le duc de Maine, bâtard de Louis XIV, qui perd ses prérogatives de prince du sang. Le comte de Toulouse, autre bâtard du roi. Mot forgé par Saint-Simon. Dans le passage supprimé l'auteur rappelle les motifs de son ressentiment. ■ Texte 2 : Histoire de ma vie, tome IV, chapitre 16 (posth.

1789-1798) CASANOVA, Casanova a réussi à s'évader des Plombs, avec le moine Balbi.

Ils se retrouvent sur /es toits du palais des Doges: comment descendre? Pensif, triste et confus, je ne savais que faire, lorsqu'un événement très naturel fit sur mon âme étonnée l'effet d'un véritable prodige.

J'espère que ma sincère confession ne me dégradera pas dans l'esprit de mon lecteur bon philosophe, s'il réfléchit que l'homme en état d'inquiétude et de 5 détresse n'est que la moitié de ce qu'il peut être en état de tranquillité.

La cloche de Saint-Marc qui sonna minuit dans ce moment-là fut le phéno­ mène qui frappa mon esprit, et qui par une violente secousse le fit sortir de la dangereuse ambiguïté qui l'accablait.

Cette cloche me rappela que le jour qui allait commencer dans ce moment là était celui de la Toussaint, où 10 mon patron si j'en avais un devait se trouver; mais ce qui éleva avec beau­ coup plus de force mon courage, et augmenta positivement mes facultés physiques fut l'oracle profane que j'avais reçu de mon cher Arioste : Tra il fin d'Ottobre, et il capo di Novembre.

Si un grand malheur fait qu'un esprit fort devienne dévot, il est presque impossible que la superstition ne se 15 mette de la partie.

Le son de cette cloche me parla, me dit d'agir, et me promit la victoire.

Étenrlu sur mon ventre jusqu'au cou, la tête penchée vers la petite grille, j'ai poussé mon verrou dans le châssis qui l'entourait, et je me suis déterminé à le briser pour l'enlever tout entière.

Je n'ai employé qu'un quart d'heure à mettre en morceaux tout le bois qui composait les 20 quatre coulisses.

La grille était restée tout entière entre mes mains, je l'ai placée à côté de la lucarne.

Je n'ai eu non plus aucune difficulté à rompre toute la fenêtre vitrée en méprisant le sang qui sortait de ma main gauche légèrement blessée par une vitre que j'ai arrachée. À l'aide de mon verrou, j'ai suivi ma première méthode pour retourner à 25 monter à cheval du sommet pyramidal du toit, et je me suis acheminé à l'endroit où j'avais laissé mon compagnon.

Je l'ai trouvé désespéré, furieux, atroce; il me dit des injures, parce que je l'avais laissé là tout seul deux grandes heures. ■ Texte 3 : François-René de CHATEAUBRIAND, Vie de Rancé, livre 1 er (1844) Rancé (1625-1700) renonça au monde après la mort brutale de sa mai­ tresse, la duchesse de Montbazon (1657), et devint le réformateur de l'ordre monastique de la Trappe.

Chateaubriand a 76 ans quand il publie sa bio­ graphie.

Il évoque la société brillante qui fréquentait l'hôtel de Rambouillet: madame de Sévigné, madame des Ursins... 5 Hélas! une des plus belles renommées commencées à l'hôtel de Ram­ bouillet s'ensevelit à Grignan, à la source de son immortalité.

Madame de Sévigné ne s'était pas fait illusion sur sa jeunesse, comme madame de Montausier1 • Elle écrivait à sa fille : « Je vois le temps accourir et m'apporter en passant l'affreuse vieillesse.

» Elle écrivait encore à ses enfants : « Vous voilà donc à nos pauvres Rochers2 • » Et c'était là q�•avait habité longtemps ma�ame de Sévigné elle-même.

La lettre datée de Grignan, du 29 mars 1696, quatre ans avant la mort de Rancé, regarde le jeune Blan­ chefort, " disparu comme une fleur que le vent emporte ».

Cette lettre est 10 une des dernières de !'épistolière; plainte du vent qui passe sur un tom­ beau.

« Je mérite, dit-elle, d'être mise dans la hotte où vous mettez ceux qui vous aiment, mais je crains que vous n'ayez point de hottes pour ces derniers.

» Ces hottes ne pèsent guère; elles ne portent que des songes. On se plaît mélancoliquement à voir dans quel cercle roulaient les idées 15 dernières de madame de Sévigné.

On ne dit pas quelle fut sa parole fati­ dique : on aimerait à avoir un recueil des derniers mots prononcés par les personnes célèbres; ils feraient le voculaire de ces régions énigmatiques3 des sphinx par qui en Égypte l'on communique du monde au désert. À Rome, qu'avait habitée madame des Ursins, alliée de madame de 20 Rambouillet, madame des Ursins ne se pouvait résoudre à retourner pros­ crite et vieille : « Occupée du monde, dit Saint-Simon, de ce qu'elle avait été et de ce qu'elle n'était plus, elle eut le plaisir de voir Madame de Main­ tenon,.... »

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