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LES QUATRE ÉCOLES DU BOUDDHISME CHINOIS Avant de nous intéresser un peu plus longuement au chan (zen), il nous faut...

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« LES QUATRE ÉCOLES DU BOUDDHISME CHINOIS Avant de nous intéresser un peu plus longuement au chan (zen), il nous faut dire quelques mots de trois autres Ecoles qui furent fondées à l'époque de la dynastie des Tang (618-907), ère pendant laquelle le bouddhisme connut son apogée et la poésie son âge d'or, époque aussi pendant laquelle il y eut un retour aux sources anciennes et quête du sens «oublié» des Classiques confucéens, prélude en quelque sorte au néo-confucianisme des XJ e-xne S. L'Ecole Hua Van (« Ecole de l'ornementation flèurie », « Ecole de la guirlande des fleurs») Cette école fut florissante entre le milieu du vue s. et le milieu du IXe s.

Elle connut cinq patriarches.

Le plus célèbre et son fondateur officiel fut le moine Fazang (643-712).

Quant au cinquième et dernier, Zongni (780-841), il fut à la fois un patriarche du Hua yan et un maître du chan (zen), les deux écoles étant, par certains traits, fort proches.

Dès le milieu du Vine s., cette Ecole fut introduite au Japon où elle est connue sous le nom de Kegon. Le sûtra qui est au fondement de cette Ecole est le « Sûtra de la guirlande des fleurs» ou « Sûtra de la Guirlande de Bouddha».

L'original en sanskrit n'existe plus, seules se sont conservées les traductions en chi­ nois et en tibétain. La doctrine de l'Ecole est complexe et ne peut nous retenir longuement.

Mais, puisque Fazang qui est l'au­ teur du« Traité du Lion d'Or» s'est servi de l'image du«lion d'or» pour introduire l'impératrice à la com­ préhension du fondement de l'Ecole, nous ne pour­ rions mieux faire que d'emprunter l'exemple dont il se sert. Voici un lion d'or, tel qu'on en peut voir dans la cour du palais impérial.

Il est clair que l'or n'a pas de forme propre par lui-même, mais qu'il revêtira telle ou · telle forme que lui donnera }'habilité de l'artisan.

C'est dire de façon imagée que l'or est au principe (li) du lion mais qu'il n'est pas le lion qu'on voit (phénomène). C'est dire aussi que toute partie du lion qu'on voit par­ ticipe au principe (li) en tant qu'or.

C'est comprendre que toute partie est présente dans le tout (le tout du lion comme le tout du Principe) et inversement. C'est dire beaucoup de choses, mais qui, réduites à l'essentiel, montrent d'une part, que tant le lion (comme phénomène) que l'or (comme principe «nouménal>>) sont vides de substance prnpre.

Le phénomène, parce qu'il est conditionné, le Principe, parce qu'il est, quoique statiquement inconditionné, mais dynamique­ ment utilisé, tout aussi vide de nature propre. Saisir que la Totalité, quoique vide de substance propre, conjoint le Principe (li) et tous les phénomènes, c'est comprendre que tout·est en tout, comme la mer dans les vagues et les vagues dans la mer, c'est s'éveiller à la bouddhéité universelle. C'est au fond tout inclure dans une sorte d'harmo­ nie supérieure. Tous les phénomènes forment un monde parfait où tout est inclus et rien n'est exclu et dont toutes les hié­ rarchies, tant doctrinales que phénoménales, sont en fin de compte «égalisées» parce que, à sa place pro­ visoire et changeante, chaque être ou chose participe au Tout. Autre façon, à la chinoise peut-être, de dire que samsâra et nirvâna ne sont pas différents. l'Ecole Tian Tai (cc Ecole de la Terrasse céleste», « Ecole de la plate-forme céleste))) ou Ecole du Lotus Fondée par le moine érudit Zhiyi (538-597), elle reconnaît en Nâgârjuna son premier patriarche.

Son sûtra de base est le Sûtra du Lotus, d'où le nom par lequel elle est aussi connue, l'Ecole du Lotus. Le Sûtra du Lotus I de la Bonne Loi (titre complet) aurait, d'après la tradition légendaire, été prononcé par Bouddha sur le Pic du Vautour, montagne où il aimait séjourner. Dans ce sûtra est développée la thèse de la multipli1.

Le lotus, cette fleur aux nombreuses variétés et aux nom­ breux noms dans les langues d'Asie, est le symbole de pureté par excellence.

Sa beauté immaculée, surgissant de la fange, symbolise là pureté irréfragable de l'esprit et du cœur, même dans les pires conditions matérielles.

Il représente aussi pour les bouddhistes la «nature de Bouddha», son Eveil, sa pureté dans le monde du sam­ sâra, etc. Dans les représentations iconographiques, le lotus est souvent le «trône» des bouddhas et bodhisattvas. cité des voies d'Eveil dont aucun Véhicule n'a le monopole, car au fond il n'en existe qu'un seul à vrai dire, puisque tout être a la «nature» de Bouddha (la bouddhéité) à laquelle il lui suffit de s'éveiller.

Pour ce faire il peut aussi obtenir le secours des bouddhas et bodhisattvas, ainsi que recourir à toutes sortes de pra­ tiques mystico-magiques (gestes (mudrâ), projections géométriques (mandala), paroles dévotionnelles et répé­ titives (mantra)), qui servent d'appui à la méditation. Dans ses commentaires au sûtra, Zhiyi développe et systématise ce canevas doctrinal tout en englobant et hiérarchisant dans son commentaire tous les points de vue doctrinaux selon un ordre chronologique, lar­ gement imaginé et construit, que l'on pourrait résumer comme suit. 1.

Au premier temps de sa prédication, sitôt après son Eveil, trois semaines durant, Bouddha aurait pro­ noncé le Sûtra de la guirlande de Bouddha. 2.

Celui-ci s'étant révélé inaccessible aux audi­ teurs, Bouddha ne prêche plus la vérité tout entière, mais seulement, et cela pendant douze ans, ce qui pou­ vait être compris par des disciples : les Quatre Saintes Vérités, dont fait aussi· partie l 'Octuple Sentier, et la production conditionnée (pratityasamutpâda). 3.

A la troisième étape de sa prédication, d'une durée de huit ans, Bouddha enseigne la supériorité du bodhisattva sur le saint (arhat) qui ne délivre que soi­ même. 4.

Pendant vingt-deux ans, durant la quatrième période de son enseignement, Bouddha enseigna la vacuité (shûnyatâ). 5.

Ce n'est qu'au cours de la cinquième période, qui correspond aux dernières années de sa vie, que Boud­ dha· développa l'enseignement du « Sûtra du Lotus», seul enseignement parfait et parfaitement «rond», au sens de complet et total.

Autrement dit, vacuité et phé­ nomènes ne sont qu'une seule et même chose. Bien sûr, l'Ecole Tian Taï en tant que comprenant le caractère évolutif de l'enseignement de Bouddha, moins personnage historique que«Corps de la Loi», et son achèvement dans ce qui s'appelle l'«Unique Véhi­ cule» (Ekayâna) ou Véhicule de Bouddha, se présente comme le sceau de l'Enseignement bouddhique, réajus­ tant et dépassant les enseignements «incomplets» et temporaires du Hînayâna et du Mahâyâna. Si, comme le disent les commentateurs du Sutra du Lotus, «tout l'univers est contenu dans un grain de moutarde» ou qu'«une pensée renferme les trois mille mondes», c'est que la bouddhéité est en tout et que tout est bouddhéité pour qui perçoit la mutuelle iden­ tité de tous les dharmas (choses, êtres). Quant à son aspect plus religieux, citons ce paragraphe de Chr.

Kontler (op.

cité, p.

133): « Un chapitre du Lotus de la Bonne Loi est entière­ ment consacré au bodhisattva et Seigneur de la com­ passion, Avalokiteshvara devenu Guanyin en chinois. Récité dans les communautés comme texte indépen­ dant, il fait naître un irrésistib(e mouvement de véné­ ration à l'égard du bodhisattva.

Guanyin apporte à tous ceux qui invoquent son nom, sa puissance et son vœu; une indéfectible protection contre les dangers et les vicissitudes de l'existence.

» Au vrne-1xe s., l'Ecole Tian Tai fut introduite au Japon, où elle est connue sous le nom de (Ecole) Ten­ dai (sens et caractères identiques, prononciation très voisine). L'Ecole de la Terre Pure (Jingtu; japonais, Jôdo) On l'appelle aussi parfois I' «Ecole du Lotus» (à ne pas confondre donc avec l'Ecole du Lotus (de la Bonne Loi) ou Ecole Tian Tai que nous venons de voir), car son fondateur et premier patriarche, Hui Yuan (334416), constitua en 402 la Société du Lotus blanc.

Les adeptes de celle-ci, moines et laïcs, faisaient vœu, devant une image ou une statue du bouddha Amitâbha (japonais: Amida) de renaître dans la Terre Pure du Paradis de l'Ouest.

D'où le nom sous lequel cette Ecole est la plus connue: l'Ecole de la Terre Pure. Il faut se rappeler que dans le bouddhisme mahâyâ­ niste il y a une infinité de bouddhas et donc une infi­ nité de mondes, de paradis, de «terres pures» sur lesquels règnent ceux-ci. Non qu'il faille nécessairement « matérialiser» ces mondes, ces paradis, ces «terres pures», pas plus que les monothéistes ne matérialisent «véritablement» le paradis ou l'enfer, mais d'en saisir la nature transcen­ dantale à toute expérience terrestre, le champ mystique qu'ils représentent. Quoi qu'il en soit, il est une Terre Pure (ou Paradis de ! 'Ouest) sur laquelle règne le bouddha Amitâbha («Lumière infinie»), inconnu d'ailleurs du baud- · dhisme ancien.

La tradition fait d'Amitâbha un roi qui devenu moine fit vœu de bodhisattva (devenir boud­ dha au service des hommes) afin d'acquérir par ses mérites un paradis où ceux qui l'ont invoqué puissent renaître pour la dernière fois.

Sachant qu'ils n'auront plus à renaître sur terre, ils y jouiront d'une félicité incomparable qui prélude, en beauté, à leur extinction finale.

Tout se passe comme si le bouddha Amitâbha s'était« gagé» lui-même pour le salut de tous ceux qui l'invoqueront, authentifiant par là même sa puissance salvifique. « Sije dois devenir un Bouddha, mais queje ne puisse venir entouré des bienheureux, au devant de ceux qui auraient manifesté la confiance en leur cœur, qui auraient accompli toutes les vertus et qui auraient émis au moment de leur mort le désir de renaître en ma Terre Pure, .si je ne puis le faire, alors je n 'ac­ cepte pas /'Eveil d'un Bouddha.>) Constitution de la Terre Pure, Sukhâvatîvyuha, in Chr.

Kontler, op.

cité, p.

134 Inutile de dire qu'une telle aide ne se refuse pas et que le succès de l'Ecole de la Terre Pure ne s'est jamais démenti auprès de nombreux fidèles tant en Chine qu'au Japon, où elle est probablement la branche du bouddhisme qui compte le plus d'adhérents. Si, aux yeux de certains, cette voie apparaît comme éminemment «facile», comparée à la voie «difficile» du bouddhisme ancien, si cette voie de salut apparaît comme «extérieure», puisqu'obtenue par la grâce toute-puissante d'Amitâbha, comparée à la voie de. salut «intérieure», dépendant uniquement de l'effort personnel, il n'en reste pas moins qu'elle est plus exi­ geante qu'il n'y paraît. Car il ne suffit pas de répéter la formule incanta­ toire sur le nom d' Amitâbha ou de «visualiser» son paradis pour y accéder avec sûreté.

Il y faut beaucoup de foi et beaucoup d'exercices jusqu'à parvenir, pour les plus exigeants, à ce que la foi en Amitâbha et sa contemplation, la visualisation de sa Terre Pure et l'accomplissement de soi-même en compassion et en moralité; se conjoignent pour ne faire qu'un. Comme le lecteur a pu s'en rendre compte, nous sommes ici en plein territoire religieux où le philoso­ phique est en arrière-plan, si tant est qu'il s'y trouve encore, même si certains patriarches, et notamment Shandao ( 6 I 3-68 I) offrent sur la méditation, la mora­ lité, l'insubstantialité du moi (anâtman, en chinois wuwo = non-moi) et l'absoluité inconnaissable de là bouddhéité, des.... »

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