■ L'ÉTAT. REPÈRES LA NOTION ET SES ACCEPTIONS PROBLÉ MATIQUES. • L'étymologie du mot État (écrit avec une majuscule pour...
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L'ÉTAT.
REPÈRES
LA NOTION ET SES ACCEPTIONS PROBLÉ
MATIQUES.
• L'étymologie du mot État (écrit avec une majuscule pour désigner
1' abstraction plus ou moins personnifiée, l'entité, qu'il recouvre) peut
être relativement éclairante.
Stare, en latin, veut dire se tenir dressé,
rester debout avec constance.
« En face » des membres du groupe
(citoyens) qui constituent la société civile, se dresserait une organisa
tion autonome, relativement stable, qui aurait pour fonction de régler
la vie du groupe, ou du moins d'en rendre possible le fonctionnement
harmonieux.
Pour cela, un certain nombre d'institutions, regroupées
dans l'État, correspondraient aux exigences multiples de la société :
institutions juridiques, politiques, économiques, militaires et adminis
tratives diverses.
Référé à l'unité typique du groupe et du territoire
qu'il occupe, l'État aurait par ailleurs une emprise géographique bien
définie (une « cité », une « principauté>>, une « nation », voire une
« union fédérale>>, etc,) [Les variantes ici évoquées ne sont d'ailleurs
pas seulement géographiques, mais aussi politiques et organisation
nelles.].
• L'emploi du conditionnel dans l'esquisse de définition qui précède
tend à souligner son caractère problématique.
Ainsi, par exemple,
l'affirmation de la nécessité d'un État pour régler la vie du groupe ne
présuppose-t-elle pas l'affirmation selon laquelle celui-ci ne peut
spontanément se régler lui-même ? La nécessité, évidente, de mesu
res organisationnelles et administratives implique-t-elle d'emblée celle
d'un État, entendu comme organisme de pouvoir? L'État doit-il être
entendu comme ce par quoi une société se comprend elle-même et
met en œuvre les conditions de possibilité de son existence, ou, de
façon plus restrictive, comme ce complexe d'institutions de pouvoir
envisagé plus haut ? Ne peut-on articuler ces deux acceptions ?
Comment, dans ce cas, rendre compte de l'existence de fait de so
ciétés sans État {cf.
notamment les observations de Lévi-Strauss et
de Godelier) ? Faut-il admettre l'idée que la régulation de la vie
sociale puisse s'effectuer selon d'autres modalités? Ou qu'à un cer
tain niveau de développement le besoin d'État ne se fasse pas sen
tir ? D'un point de vue historique, on distinguera en réfléchissant sur
ces questions, ce qui se passe « en amont » des sociétés à État
I« communauté primitive »l et ce qui pourrait se passer « en aval >>
{projet de sociétés sans État).
Il semble peut-être nécessaire de rete
nir une distinction entre le concept d'un État idéal (cf.
aussi « l'État
de droit ») et le concept construit à partir d'une analyse rigoureuse
du fonctionnement effectif des États.
La question de la nécessité
sociale de l'État, sans cette distinction-clé, comporte des ambiguïtés
insurmontables.
Si l'on rattache à l'État l'idée habituelle que des
hommes en gouvernent d'autres et qu"il y a dans un tel phénomène
une relation de domination, la raison d'être idéale de l'État, son
fondement, se trouvent perdus de vue.
On ne comprendra pas, en
effet, comment l'administration nécessaire de la vie sociale (organisa
tion harmonieuse du groupe) peut sembler impliquer un tel type de
pouvoir-domination.
Si la société civile semble requérir ce pouvoir-do
mination, c· est que la finalité idéale de l'État (gérer l'intérêt général)
s'y trouve a priori niée par la préexistence de rapports de force.
Un
pouvoir qui incarne de façon manifeste l'intérêt général ne « do
mine>> pas; il n'est opposable à l'intérêt particulier que si celui-ci est
conçu selon le monde naturel de la violence individualiste, étrangère
au groupe.
Le concept de « pouvoir(s) public(s)» ainsi compris, exclut
donc la relation de domination.
Le fait que, sous le nom d'Êtat ou de
Pouvoirs publics, s'exerce une domination de certains hommes par
d'autres, devrait donc rester paradoxal.
Il signalerait, comme un
symptôme le fait d'une maladie, l'existence de conflits qui hypothè
quent, dans la Société civile même, le caractère concevable d'un
« intérêt général ».
Ici se trouve l'articulation entre le concept d'État
tiré de l'analyse des sociétés existantes et le concept d'État idéal,
tiré d"une réflexion sur les fondements.
Marx et Platon.
si l'on veut.
Si Marx critique le thème de l'État « représentant de l'intérêt géné
ral».
c'est pour deux raisons à ses yeux décisives : l'une relève de
la nécessaire démystification par....
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