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«
Lettres d'une Péruvienne, XXXIV
i
de Françoise de Graffigny c1s9s-11ss>
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de Rousseau,
emprunte au
philosophe le rêve
d'un monde
«naturel»,
mais qui serait
pour elle incarné
dans la femme.
En féministe
elle dénonce
dans cette lettre
la douloureuse
condition de la
femme à son époque,
assujettie à un
monde régenté et
corrompu par les
hommes.
Les Lettres d'une Péruvienne furent au milieu du xvuf siècle un vrai
succès de librairie.
Elles connurent plus de quarante éditions en cinquante
ans et furent traduites en cinq langues.
Reprenant la veine exotique et le
style épistolaire employés par Montesquieu dans Les Lettres persanes,
( 1721) Madame de Graffigny dénonce les travers de la société sous la
plume fictive de Zilia, jeune Péruvienne exilée en France, qui écrit à son
frère Aza resté au Pérou.
) e ne sais quelles sont les suites de l'éducation qu'un père
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donne à son fils: je ne m'en suis pas informée.
Mais je sais
que du moment que les filles commencent à être capables de
recevoir des instructions, on les enferme dans une maison
religieuse, pour leur apprendre à vivre dans le monde; que
l'on confie le soin d'éclairer leur esprit à des personnes auxquelles
on ferait peut-être un crime d'en avoir, et qui sont incapables de
leur former le cœur qu'elles ne connaissent pas.
Les principes de la religion, si propres à servir de germe à toutes les
vertus, ne sont appris que superficiellement et par mémoire.
Les
devoirs à l'égard de la divinité ne sont pas inspirés avec plus de
méthode.
Ils consistent dans de petites cérémonies d'un culte exté
rieur, exigées avec tant de sévérité, pratiquées avec tant d'ennui,
que c'est le premier joug dont on se défait en entrant dans le
monde, et si l'on en conserve encore quelques usages, à la manière
dont on s'en acquitte, on croirait volontiers que ce n'est qu'une
espèce de politesse que l'on rend par habitude à la divinité.
[...
]
Régler les mouvements du corps, arranger ceux du visage, compo
ser l'extérieur, sont les points essentiels de l'éducation.
C'est sur les
20 attitudes plus ou moins gênantes de leurs filles que les parents se
glorifient de les avoir bien élevées.
[...]
Quand tu sauras qu'ici l'autorité est entièrement du côté des
hommes, tu ne douteras pas, mon cher Aza, qu'ils ne soient res
ponsables de tous les désordres de la société.
Ceux qui, par une
25 lâche indifférence, laissent suivre à leurs femmes le goût qui les
perd, sans être les plus coupables, ne sont pas les moins dignes
d'être méprisés ; mais on ne fait pas assez d'attention à ceux qui,
par l'exemple d'une conduite vicieuse et indécente, entraînent
leurs femmes dans le dérèglement, ou par dépit ou par vengeance.
30 Et en effet, mon cher Aza, comment ne seraient-elles pas révoltées
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U
contre l'injustice des lois qui tolèrent l'impunité des hommes,
poussée au même excès que leur autorité? Un mari, sans craindre
aucune punition, peut avoir pour sa femme les manières les plus
rebutantes, il peut dissiper en prodigalités, aussi criminelles qu'excessives, non seulement son bien, celui des enfants, mais même
celui de la victime qu'il fait gémir presque dans l'indigence, par
une avarice pour les dépenses honnêtes, qui s'allie très communément ici avec la prodigalité.
Il est autorisé à punir rigoureusement
l'apparence d'une légère infidélité, en se livrant sans honte à toutes
celles que le libertinage lui suggère.
Enfin, mon cher Aza, il semble
qu'en France les liens du mariage ne soient réciproques qu'au
moment la célébration, et que dans la suite les femmes seules y
doivent être assujetties.
Je pense et je sens que ce serait les honorer beaucoup de les croire
capables de conserver de l'amour pour leur mari, malgré l'indifférence et les dégoûts dont la plupart sont accablées.
Mais qui peut
résister au mépris ?
F.
de Graffigny, Lettres d'une Péruvienne,
Lettre XXXIV (1747).
.
Lettre d'une Péruvienne de Mme de Graffigny ................
~es .
23-4
Les victimes des hommes
Comment sont éduquées les jeunes filles?
Qui les éduque? De quelle manière? Quels
sont les résultats de cette éducation ? Montrez
l'ironie de leur sort.
Quels sont, selon la jeune Péruvienne, les
gages de la bonne éducation pour les parents?
Qu'est-ce que cela indique sur leur place dans
la société?
Étudiez les caractéristiques de la situation
des femmes et de celle des hommes dans ce
texte.
Qu'observez-vous? À quoi cela incite-t-il
les femmes?
Une virulente dénonciation
• Montrez que ce texte présente deux temps
de la vie d'une femme.
La locutrice conserve-telle le même ton tout au long du texte ? Que
cela nous indique-t-il sur l'état d'esprit de la
jeune correspondante?
Vous montrerez combien les éléments de
l'énonciation construisent tout au long du
texte une dénonciation personnelle et catégorique, non exempte d'une certaine logique.
À quoi sert cette construction ?
• Expliquez la dernière phrase du texte.
Une société inégalitaire
.
,....
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