LEXIQUE THÉÂTRAL POUR LIRE DOM JUAN APARTÉ (un) Discours que le personnage adresse à lui-même et non à un tiers....
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LEXIQUE THÉÂTRAL POUR LIRE DOM JUAN
APARTÉ
(un)
Discours que le personnage adresse à lui-même et non à un tiers.
Plus bref que le
monologue, l'aparté se démarque du moment de dialogue entre les personnages et se
destine plus directement au spectateur.
Il livre souvent une pensée intérieure en
décalage par rapport à la situation ou à la parole adressée à l'interlocuteur.
BOUFFON
Le bouffon comme le fou du roi détient une liberté de parole singulière.
Il peut dire
ce qui semble interdit : son statut de marginal lui accorde le droit de commenter les
événements sérieux en en parodiant le sens.
Dans Dom Juan Sganarelle semble, comme
Arlequin dans la commedia dell'arte*, incarner ce pouvoir subversif.
Mais Sganarelle
fait le bouffon sans en revendiquer la fonction.
Il est le valet d'un maître à qui il veut
faire entendre la vérité nue et non sa parodie.
C'est le regard ironique de Don Juan qui
ridiculise ses arguments et ses comportements, qui stigmatise le bon sens à courte-vue
que Sganarelle promène tout au long de la pièce.
Très curieusement, Don Juan
personnifie davant,age la puissance destructrice du rire.
Il exprime d'autres formes de
vérité.
Il dissipe les formes d'obscurantisme superstitieux dont Sganarelle ou le Pauvre
portent encore les traces.
Sa bouffonnerie est diabolique, pl11s acerbe que comique.
Mais
l'échange des habits à la scène 5 de l'acte II souligne peut-être l'inversion des rôles entre_
un valet qui parle sous la dictée de la loi sociale, qui parle comme les forces dominantes
(la religion, les usages sociaux...), et un maître qui, irouie après ironie, fait trembler les
valeurs de son temps et qui les démystifie en iconoclaste pour ne plus croire à rien
d'autre qu'à sa puissance personnelle.
BURLESQUE
Le burlesque appartient au comique.
Il parle de réalités nobles en termes triviaux.
Don Juan est l'essence même du burlesque, rabaissant tout ce qui est élevé, raillant le
Ciel, se moquant de son père et jouant même le vertueux.
Il oblige la divinité à paraître
à lui mais elle vient sous les aspects d'une statue-machine.
On peut voir dans cette
irruption mi-fantastique, mi-ridicule (Dieu ne serait qu'une machine de théâtre) le point
d'orgue du défi burlesque lancé aux valeurs nobles, du duel du rire nihiliste contre les
lois et les interdits d'une époque.
De façon extensive, la notion de burlesque enveloppe toutes les situations de
décalage des mots et des gestes (apologie étonnante du tabac, sermons cafouilleux de
Sganarelle tel celui qui, après avoir démontré l'existence de Dieu, se conclut par une
chute : parodie de la chute du péché originel et symptôme d'un raisonnement qui « se
casse le nez » ! ).
COMÉDIE
Le mot grec kômos désigne la fête et le chant rituel organisés lors du cortège
orchestré en l'honneur de Dionysos.
La comédie s'oppose traditionnellement à la
tragédie de trois manières: 1) les personnages de comédie sont de condition humble (ce
qui n'est pas respecté dans Dom Juan) 2) le dénouement est heureux 3) le but de la
comédie est de provoquer le rire chez le spectateur (et non la crainte et la pitié comme
dans la tragédie).
Les sujets de la comédie peuvent donc être très divers et il est difficile
de les unifier.
L'ambiguïté de Dom Juan réside notamment dans sa non-correspondance
aux critères traditionnels de la comédie.
La pièce est structurée par des moments
comiques assurés en grande partie par Sganarelle; mais aussi par Don Juan qui, face au
faux sérieux du monde, revendique son propre univers parodique et fondamentalement
comique puisqu'il se moque de tout sauf de profiter de la vie aux dépens des autres.
La
pièce pourtant finit mal: Don Juan qui se joue de ce qu'il pense être les défauts des
hommes et qui les satirise meurt; le rire est englouti par la tragédie.
Le destin que la
statue transmet s'abat sur le libertin.
Dom Juan est-il tragique ou comique? Est-il l'exécution du fatum (le destin); ou le
dénouement très théâtral complété par la dernière farce involontaire de Sganarelle
(« Mes gages ...
») favorise-t-il une sorte de dérision générale nuançant la vision sombre
du monde de la Loi divine et souveraine? Édifiante, la fin de Dom Juan est aussi
risible.
Ce rire nous éloigne du conflit violent de la liberté humaine et du Pouvoir divin
et il nous rassure peut-être; à moins que, le rideau tombé, il ne jette sur la condition
humaine et ses croyances un voile d'absurdité et de non-sens, en même temps comique
et tragique.
Molière invente donc avec Dom Juan une comédie qui dépasse le genre de la
comédie.
Il démontre ainsi que la notion de genre cloisonné et étiqueté est arbitraire.
Il
n'existe pas de comédie type et la comédie qui s'étend de la comédie d'intrigue à la farce
italienne peut, grâce à sa forme souple, être parcourue par des moments lyriques,
dramatiques ou tragiques.
La gamme des tons de la comédie, du sourire au rire, de
l'humour à l'ironie, du ridicule à l'absurde exprime la grande plasticité du comique.
Agressif, sympathique, superficiel, profond, méchant, intelligent, le rire dans la comédie
n'est ni constant ni uniforme: il est complexe.
Molière rêve d'une « grande comédie »
qui soit le pendant des tragédies de Corneille et de Racine: il la réalise par la richesse
théâtrale de ses personnages, par les dissonances psychologiques qui les tiraillent sur
une scène où le désespoir le dispute au ridicule.
COMIQUE
On recense différentes sortes de comique:
1.
Comique de geste : fondé sur la gestuelle théâtrale (gestes manqués, imitatifs,
excessifs ...), le comique de geste est largement le ressort de la commedia dell'arte*
(voir, par exemple, Dom Juan, fin Il3).
2.
Comique de situation: né de tout ce qui désordonne la bonne tenue de l'intrigue
(quiproquos, malentendus, renversements de situation ...).
Voir I4.
3.
Comique de mot:
- l'ironie (antiphrase) pratiquée pour dire le contraire de ce que l'on pense
réellement,
- l'esprit consiste à rechercher des formules verbales heureuses,
- l'humour: moins agressif que l'ironie, l'humour note les décalages, les petits
ridicules qui font que la réalité est vue différemment de ce qu'elle est, apparemment
sérieuse.
4.
Comique de caractère: vise à démonter le caractère (comportement, tempérament)
d'un personnage dont l'attitude est jugée outrée.
5.
Comique de mœurs: relève ce qui est condamnable et risible dans le comportement
d'un groupe social.
COMMEDIA DELL'ARTE
Le nom de commedia dell'arte est adopté au xvne siècle.
Il distingue une forme de
théâtre comique très appréciée depuis le XVJe et pratiqué par les comédiens italiens qui,
à partir d'histoires très succinctes, brodent et improvisent à loisir.
Très expressifs et
fantaisistes, les personnages de la commedia (Pantalon, Arlequin, le Docteur...
)
réapparaissent dans le Dom Juan de Molière à travers le valet superstitieux, pleutre et
un peu balourd qu'est Sganarelle et à travers des situations caractéristiques comme
l'échange des costumes, les coups adressés au valet, les fanfaronnades (par exemple
celle de Pierrot) ...
DÉNOUEMENT
Correspond à la fin de la pièce, au moment où tous les fils de l'intrigue
progressivement installée se dénouent, en résolvant les conflits, les tensions et les
obstacles accumulés.
On a beaucoup reproché à Molière d'achever ses pièces de façon invraisemblable et
facile.
Mais en nous présentant des types (Tartuffe, le Misanthrope ...) ou des mythes
(Don Juan), le dramaturge ne peut réellement en finir avec eux.
Les issues artificielles
des pièces de Molière attestent de l'universalité des sujets.
Même anéanti, l'esprit
d'inconstance et de révolte de Don Juan perdure éternellement.
La fin conventionnelle de Dom Juan est rendu nécessaire par la morale à respecter
mais le personnage résiste dans la conscience du spectateur au-delà de son châtiment.
Et
la punition elle-même spectaculaire ancre la pièce dans l'univers de la fiction théâtrale
et dans l'ambiance ludique de la comédie.
DEUS EX MACHINA ( « le dieu descendu d'une machine »)
Le mot renvoie à l'apparition inattendue d'un personnage à la fin de la pièce pour la
terminer.
Le deus ex machina est souvent utilisé par le dramaturge poui finir sa pièce et
résoudre d'un seul coup tous les conflits, quand il se trouve un peu embarrassé de
conclure.
Si la pièce met en scène l'irrationnel, le recours au deus ex machina est
légitime et vraisemblable.
Dans Dom Juan, le deus ex machina représenté par la Statue
relève du climat fantastique qui accompagne Don Juan dans son errance et son combat
contre le Ciel.
Mais il ne se départit pas d'une certaine tonalité artificielle.
Comme si
Molière mettait fin sans illusion et avec un sourire au duel de l'homme et de Dieu ; ou
comme s'il mettait en doute les solutions de la religion en les présentant sous les traits
d'une marionnette (la statue), d'une machine de théâtre mue, en sous-main, par le
Pouvoir contre le hors-la-loi libertin trop indépendant, insuffisamment soumis.
DISDASCALIE
Indication de jeu fournie par l'auteur.
Exemple : « Don Juan, se lève de son siège :
J'ai tort » (N5).
EXPOSITION
Moment de la pièce....
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