L'"expérience" Benazir Bhutto aura duré vingt mois. Du 1er décembre 1988, lorsque le chef de l'État, Ghulam Ishaq Khan, l'a...
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L'"expérience" Benazir Bhutto aura duré vingt mois.
Du 1er décembre 1988,
lorsque le chef de l'État, Ghulam Ishaq Khan, l'a officiellement nommée Premier
ministre, au 6 août 1990, lorsque le même homme l'a destituée de ses fonctions,
puis au 25 octobre, lorsqu'il est apparu clairement que le Parti du peuple
pakistanais (PPP) avait perdu les élections parlementaires, B.
Bhutto sera
passée par une succession d'épreuves politiques et personnelles.
Pour une part,
elle a dû à elle-même (et à sa famille), c'est-à-dire à ses erreurs, cette
sanction du suffrage universel, même s'il semble avéré qu'une large fraude a
entaché le déroulement de ce scrutin.
La victoire de l'Alliance démocratique
islamique (IDA) de Mian Nawaz Sharif, la nomination de ce dernier au poste de
Premier ministre a consacré le retour au pouvoir des fidèles de l'ancien
président Zia-Ul-Haq (mort dans l'explosion de son avion, le 17 août 1988).
Alors qu'au début de l'année 1990 une certaine "détente" semblait être
intervenue entre les représentants de la troïka - le Premier ministre, le
président et le chef de l'armée, le général Aslam Beg - qui dirigeait le
Pakistan, en mai, à l'occasion de la reprise de troubles dans la province
méridionale du Sind, une crise grave éclata entre le chef du gouvernement et
l'armée, remettant en cause ce fragile aggiornamento.
Le Sind, province
"volatile" dont la capitale, Karachi, est une sorte de "bouillon de culture"
ethnique, connaît de façon cyclique des affrontements sanglants entre
communautés.
Cette fois, plus de 400 personnes ont été tuées en moins de deux
semaines, et le gouvernement local, dirigé par le PPP de B.
Bhutto, s'est révélé
incapable de rétablir l'ordre.
L'armée comme arbitre
Le Sind est à la fois le fief politique et familial de B.
Bhutto, et son talon
d'Achille: alors que les provinces du Pendjab et du Balouchistan lui étaient
hostiles, elle ne pouvait se permettre de s'aliéner le soutien des "barons"
locaux du PPP, pour la plupart grands propriétaires terriens.
Or, dans ces
troubles qui opposent les Mohajirs (émigrés de l'Inde, de langue ourdou) aux
Sindhis de souche, les militants du PPP ont eu leur part de responsabilité.
Le
président a critiqué de plus en plus nettement le gouvernement de B.
Bhutto et
l'armée a réclamé la mise sur pied de tribunaux militaires pour juger les
auteurs de violences.
Il est vrai que ceux-ci ont souvent été relâchés à la
suite d'interventions politiques,
L'épreuve de force entre un Premier ministre qui savait que le fait de donner
les pleins pouvoirs à l'armée constituerait l'aveu de son impuissance, et
l'establishment militaire s'est prolongée plusieurs semaines, pour culminer le 6
août 1990.
En congédiant brutalement son Premier ministre, le président Ishaq
Khan a invoqué les "troubles provinciaux" mais il a aussi parlé de "corruption"
et de "népotisme".
Un successeur intérimaire a été immédiatement nommé, Ghulam
Mustafa Jatoï, membre éminent de l'IDA (Alliance démocratique islamique).
En
même temps, le Parlement national était dissous, ainsi que les assemblées
provinciales.
A la tête des exécutifs locaux étaient nommés des adversaires du
PPP, chargés d'organiser des élections "libres et impartiales".
B.
Bhutto a parlé de "coup d'État constitutionnel", et a affirmé qu'elle a été
victime des pressions exercées sur le président par les "renseignements
militaires".
L'armée, sans aucun doute, a été à l'origine du limogeage du
Premier ministre.
Outre la question du Sind, elle estimait qu'en plusieurs
occasions, le chef du gouvernement avait "interféré" dans ses affaires
intérieures, notamment s'agissant de promotions et de mutations au sein de la
hiérarchie militaire.
La fille de l'ancien président Ali Bhutto avait oublié
qu'en novembre 1988, l'armée avait accepté la démocratie, moyennant une
condition: que jamais le pouvoir civil ne tente de menacer ses "intérêts
vitaux".
Mais les accusations de népotisme et de corruption proférées par le président
avaient un accent de vérité: à Karachi, la légalité des activités de la famille
Zardari, c'est-à-dire de l'époux du Premier ministre, Asif Ali Zardari, et de
son beau-père, Hakim Ali Zardari, était de notoriété publique sujette à caution.
L'époux de B.
Bhutto sera mis en prison, pour - notamment - extorsion de fonds
et complicité d'enlèvement, et elle sera elle-même inculpée d'abus de pouvoir:
le nouveau régime manifestait là clairement son intention d'en "finir avec l'ère
des Bhutto".
L'ancien Premier ministre a fait, malgré tout, une campagne active,
protestant de son "innocence", et son charisme populaire est apparu alors
intact.
Victoire électorale pour l'IDA
Les élections, qui se sont déroulées le 24 octobre 1990, ont pris la forme d'une
sorte de référendum à propos de la décision du président Ishaq Khan de se
débarrasser de son Premier ministre.
Elles ont eu lieu dans un climat
d'incertitude, chacun redoutant une intervention de l'armée et le retour à la
loi martiale.
Le verdict a été cependant net:....
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