L'HISTOIRE Pourquoi revenir sur le passé ? COUP DE POUCE ■ Analyse du sujet - « Revenir sur le passé»...
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L'HISTOIRE
Pourquoi revenir sur le passé ?
COUP DE POUCE
■ Analyse du sujet
- « Revenir sur le passé» n'est pas synonyme de connaître ou étudier
le passé : cela peut répondre à différents projets ou intentions, liés éven
tuellement à la connaissance, mais aussi à la morale, à la compréhension
du présent ou à l'angoisse du futur.
- Le sujet est donc vaste, et permet de développer différents points de
vue : on essaiera de les ordonner.
- Le « pourquoi» peut aussi signifier « à quoi bon» : on doit donc
évoquer des attitudes qui considèrent que tout retour sur le passé est
inutile ou stérile.
■
Pièges à éviter
- Ne pas se contenter d'oppositions schématiques entre un passé enfui
et un présent qui seul mériterait quelque intérêt, puisqu'il est là.
- Ne pas oublier ce que peuvent être les liens entre le passé et le pré
sent.
- Si des exemples peuvent être utiles, on prendra garde de ne les utili
ser que pour illustrer des analyses préalables : leur énumération ne peut
suffire à traiter un sujet quel qu'il soit.
CORRIGÉ
[Introduction]
Par définition, le passé n'est plus, ou du moins plus intégralement, car
sans doute faut-il admettre que quelque chose s'en prolonge ou s'en main
tient dans le présent.
Cela suffit-il pour que l'on ait le besoin, le désir ou
même le devoir de revenir sur ce qu'il fut? Y a-t-il quelque nécessité ou
quelque raison sérieuse qui nous invite ou nous pousse à revenir sur le
passé? Pourquoi, périodiquement, pouvons-nous en ressentir l'urgence ou
l'utilité? Cette question ne concerne pas le seul individu, puisque les
sociétés dans leur ensemble se montrent également soucieuses d'un tel
retour.
Le souci autobiographique et la recherche historique ne sont peut
être que les formes les plus fréquentes, et donc les plus aisément accep
tées, ou les moins surprenantes, tant elles semblent devenues habituelles,
d'une tendance plus générale à considérer que du passé, il ne s'agit pas
de « faire table rase», et qu'il convient au contraire, lorsqu'on est re
venu vers ce qu'il fut ou nous semble avoir été, d'en rapporter quelque
chose.
[I.
La présence du passé]
Cette interrogation sur le sens ou la nécessité du fait de revenir sur le
passé ne peut sans doute se manifester que pour une conscience dans
laquelle la notion d'histoire et d'un passé en tant que révolu apparaît
comme fondatrice de l'existence elle-même - tant individuelle que collec
tive.
Dans les sociétés à conscience plus orientée par un temps mythique
que par la temporalité historique à strictement parler, le passé est toujours
sous-jacent à l'actuel : il le justifie, en formule les valeurs et le fonde
authentiquement.
Aussi ne revient pas sur ou vers lui : bien plutôt lui
redonne-t-on périodiquement une actualité ou une présence pleine par des
cérémonies collectives rappelant comment le monde fut ordonné « au
début».
La société y réactive ses principes et confirme leur durée, c'est
à-dire leur façon d'échapper au temps.
Lorsque le temps est pensé selon une orientation (c'est notamment
l'effet du dogme chrétien de la création divine), l'histoire trouve un
rythme, une scansion, qui fait du passé une réalité en constant éloigne
ment, et dont la signification peut devenir énigmatique.
Pour les Gre_cs,
l'histoire ne présente guère de sens global : elle est une suite d'événe
ments entre lesquels il est à peu près impossible de repérer un ordre
rationnel.
Ce n'est qu'avec les historiens marqués par la christianisation
que se manifeste la possibilité d'un sens de l'histoire, qui soit à la fois une
orientation linéaire et une signification.
Il n'empêche que le passé, tout en étant aboli, reste d'une certaine
façon présent, ne serait-ce que parce que ses conséquences peuvent venir
influencer le présent.
Saint Augustin évoque ainsi un triple mode du pré
sent ou de la présence : il y a le présent du passé, le présent du présent et
le présent de l'avenir, puisque la conscience s'ouvre sur ces trois aspects,
et se montre capable d'être préoccupée de manière égale par leurs apports.
Si, pour l'individu, le présent du passé renvoie à la mémoire, la société
doit se composer une sorte de mémoire collective : l'histoire en tant que
récit explicatif.
[Il.
Les attentes à l'égard de l'histoire]
On peut ainsi considérer que la raison la plus élémentaire pour revenir
sur le passé réside dans le souci de mieux comprendre l'origine du pré
sent.
Ce qui renvoie à tout autre chose qu'une simple série d'anecdotes si
l'on admet, de manière un peu hégélienne, que « être c'est avoir été»:
c'est alors très radicalement que le passé nous constitue, puisque c'est sur
ce que nous fûmes que repose notre être actuel, et le connaître, c'est
savoir non seulement d'où l'on vient, mais aussi ce que l'on est.
De ce point de vue, l'histoire peut révéler aussi bien la grandeur que la
médiocrité du passé : si elle autorise une appréciation du chemin accom
pli, elle peut légitimer la fierté, mais aussi la mauvaise conscience.
Les
débats qui agitent périodiquement l'actualité dans les médias montrent
qu'une société ne connaît jamais assez son passé, et notamment le plus
proche, et qu'elle peut dès lors se faire quelques illusions, tant sur ce
qu'elle a accompli que sur les qualités qu'elle se reconnaît ordinairement.
On constate aisément que les actions les moins honorables cherchent à ne
pas être publiquement étalées: ce qui est vrai pour un individu l'est peut
être encore davantage pour une collectivité.
Et si les Français par exemple
ont pendant longtemps méconnu (préféré méconnaître ?) la réalité des
événements concernant la Résistance et la Collaboration pendant la
Seconde Guerre mondiale, on peut admettre que cette « tache aveugle»
de leur mémoire collective a eu quelques conséquences, non seulement
sur leur connaissance des événements en question (ce qui pourrait ne pas
être dramatique: nul n'est sensé tout savoir), mais aussi sur leurs opinions
politiques.
Ce qui est sans doute plus grave, si l'on conçoit que peut alors
se produire l'équivalent d'un« retour du refoulé»: des débats non clari
fiés risquent de produire des effets névrotiques faussant la perception....
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