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MALEBRANCHE ou Les raisons de l'ordre par Patrice Henriot Malebranche ... l'un des plus profonds méditatifs qui aient jamais écrit....

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« MALEBRANCHE ou Les raisons de l'ordre par Patrice Henriot Malebranche ...

l'un des plus profonds méditatifs qui aient jamais écrit. Voltaire, Le Siècle de Louis XIV. Malebranche intempestif Ce n'est pas sauver un penseur que de le rattacher à notre temps, comme si ce temps jouissait de titres incontestables pour s'ériger en juge et comme si toute pensée formulée dans le passé se trouvait en situation d'accusée.

Par sa vie, par la lettre de son œuvre, Malebranche est pour nous profondément inactuel ; nul, aujourd'hui, ne verra son parti renforcé par le malebranchisme.

Quant à l'esprit de cette œuvre, il est vain de le cacher : c'est !'Esprit. - Prêtre, oratorien, ses œuvres sont mises à !'Index 1• - Sa Vie, rédigée par le père André, est refusée par la censure. - Il entend chercher une Vérité dont les roués, puis les austères maîtres du soupçon, nous invitent à nous défier. - Il nous propose de nous détourner du monde et de consulter la Raison, mais sans ostentation ni drame : tirer 1.

Index librorum prohibitorum : liste officielle, établie d'abord par la Congrégation de l'index, puis par le Saint-Office, des livres dont la lecture et la possession étaient interdites aux catholiques, en raison des dangers qu'elles présentaient pour la foi ou les mœurs. Le premier Index parut en 1559.

Il y eut'trente-deux éditions, la dernière en 1948.

Au total, six mille ouvrages environ furent « mis à l'index». L'institution elle-même fut abolie par le concile Vatican Il, en 1966. 326 Malebranche les rideaux, mais sans produire les ténèbres où l'imagination se plaît. - II se réfère à I' Ordre, terme qu' abus et _contrefaçons rendent - à juste titre - odieux à notre époque où toutes notions, subverties, se trouvent hors de leur sens.

Si l'ordre «règne» en quelques contrées, et si l'on invoque la raison pour justifier l'injustifiable, cet ordre n'est-il point désordre, et cette raison, folie ? Dans son originalité inclassable, ce philosophe, comme les plus grands, nous conduit à mesurer notre dénaturation et à trouver en nous-mêmes l'élan pour une régénération. La philosophie de Nicolas Malebranche est parfaitement caractérisée par le titre du premier ouvrage où elle s'effectue : c'est une recherche de la Vérité, écho d'un dialogue inachevé de Descartes, La, recherche de la vérité par la lumière naturelle.

Ce projet dénote-t-il quelque ingénuité ? « La plupart des hommes regardent la vérité( ...

) comme un meuble fort embarrassant et fort incommode » (Entretiens sur la métaphysique, XIII" Entretien, § VIII). Ceux-là mêmes qui prétendent s'en soucier y sont fermés par esprit de parti ou préfèrent, à la vraie connaissance, la vanité de passer pour savants dans le monde.

Telle une boutique d'antiquaire, ils encombrent leur mémoire d'une vaine érudition, à moins qu' astronomes ou chimistes, « pendus à une lunette ou attachés à un fourneau», ils n'oublient le but ultime du savoir (De la recherche de la Vérité, Préface). L'obscurité Prisonniers de la caverne décrite par Platon, nous jugeons des choses matérielles par les impressions que nous éprouvons à leur rencontre et, comme des enfants, nous croyons, parce que nous y sentons plus de résistance, qu'il y a plus de matière dans un certain volume d'or que dans le même volume d'air.

Plus grave encore : nous sommes tout autant asservis aux sens et à l'imagination lorsqu'il s'agit de juger ce que dit un autre homme; l'agrément que nous prenons à son éloquence, sa réputation, et même sa contenance et son vêtement nous disposent en sa faveur. j Malebranche 327 « Il n'y aura pas.jusqu'à son collet et à ses manchettes, quÎ ne prouvent quelque chose » De la recherche de la Vérité, Livre I, ch.

XVIII, Il).

Qu'au contraire l'orateur ait piètre apparence mais raisonne bien, on ne l'écoutera pas.

Nous sommes prévenus.

Quant à nous-mêmes, nous nous constatons sans parvenir à nous connaître, par une conscience, un sentiment intérieur, qui ne nous fait pas connaître ce que nous sommes, mais simplement que nous sommes.

Notre esprit, notre âme, est si aveugle qu'il se méconnaît luiniême et qu'il ne voit pas que ses sensations lui appartiennent, ne lui faisant pas davantage connaître c~ qu'il est, que cè que sont les choses extérieures.

Il faut distinguer trois manières d'apercevoir les choses: par les sens se manifeste le rapport qu'e11es-ont à notre corps; nous· nous emportons à,juger comme s'ils nous présentaient les choses e11esmêmes.

Ainsi dans la passion, qui consiste à projeter nos propres dispositions, agréables ou pénibles, sur les objéts dont la présence semble les causer.

L'imagination fohne comme la figure des êtres matériels absents.

L'entendement seul saisit l'essence-des choses''matérielles; l'idée géométrique donne ce que- nullè figure ne peut fournir, les raisons du cercle.

Loi d'intelligibilité; l'idée, que ne saurait former un esprit obscur à lui-mêmè, est l'archétype de tous les objets possibles.

Universelle, ellè renvoie à sa source.

C'est · pourquoi nous-n'avons-pas d'idée-claire· de·notre âme, mais seulement de l'étendue géométrique qu'avec tout homme; si étranger nous soit-il, nous pouvons contempler.

Si les discours n'éclairent pas, si les opinions d'autrui ajoutent à la confusion où nous sommes, l'Homme n'instruit pas l'Homme.

Nous devons connaître par idée, rentrant en nous-mêmes, consultant cette Raison que nul ne peut dire sienne, le Verbe universel qui parle aux Chinois et aux Tartares comme aux Français et aux Espagnols.

Consultant la Raison, nous pouvons apercevoir les mêmes vérités.

Ainsi des ·vérités mathématiques: nombres et propriétés de l'éten- · due sont connus par des idées claires, communes à .tous les hommes.

Le nombre est la loi des choses dénombrées ; 1'étendue inte11igible, eri laquellè nous concevons une· infinité de parties, est la mesure de tous les rapports.

L' arithmétique exprime les rapports de toutes les grandeurs, les lignes 328 Malebranche et les figures représentent ces rapports à l'imagination. Indépendamment de ces sciences où l'on n'éprouve rien, nous.ne pouvons rien.

connaître.

Elles ne nous découvrent pas !'.étendue matérielle, mais l'universel, « lieu des esprits».

C'est vers lui que Socrate dirige le petit esclave de Ménon, l'avertissant, délivrant des sens le jugement. « Toute ma méthode se réduit à une attention sérieuse à ce qui m'éclaire et me conduit·», dit le philosophe (Théodore, . dans le ;x:1v0 Entretien sur la métaphysique, § IV). La lumière intérieure : vision en Dieu Ce « lieu » intelligible des esprits, Malebranche, reprenant à son compte la méditation de saint· Augustin et celle de Descartes, l'appelle« Dieu »..

L'être fini que nous sommes ne peut, de l'infini, avoir nulle idée représentative.

Il n'en doit pas tenter la «démonstration», car il n'est de démonstration légitime que lorsque.

notre esprit s'applique aux rapports de grandeurs, comme dans.

la mathématiqu.e et la physique· mathématique.

Or les essences des choses matérielles nous manifestent à l'évidence que .nous ne sommes pas à nous-mêmes notre propre lumière ; capables d'une telle connaissancé vraie, nous la voyons dans Ja natu.re immua9le et.infinie de Dieu, nous·.participons en quelque manière à sa Raison.

Bien que nous n'en comprenions pas !'.essence, nous sommes assurés de son existence.;. rien de fini ne pouvant représenter l'infini, « il suffit de penser à Dieu pour savoir qu'il est » (De· la recherche de la Vérité, Livre IV, ch.

XI, III).

Encore faut-il toujours distinguer entre l'étendue intelligible qui n'est pas infinie en tous sens et !'.immensité divine.

La philosophie redécouvre sans cesse, nous invitant à la modestie, que connaître n'est pas créer, que la connaissance, comme l'enseigne Platon, est re-connaissance.

A l'idée qu'elle aperçoit, l'âme est comme le fini à l'infini. , Voilà qui ne va pas sans difficulté.

Par attachement.aux sens, nous .croyons le plancher plus réel que nos idées, parce que le plancher résiste lorsque nous le frappons du. pied.

Mais les idées ne.

nous résistent-elles pas .? Pouvons~ Malebranche 329 nous trouver dans un cercle deux diamètres inégaux, dans une ellipse trois diamètres égaux ? Permanence, solidité, réalité semblent le propre du sensible.

Mais en percevant un corps particulier, nous ne le distinguons des autres corps que par la couleur, impression dont nous n'avons nulle idée claire et telle qu'avant de l'avoir éprouvée, nous ne savons ni ce qu'elle est, ni même si nous sommes capables de l'éprouver. L'idée universelle n'est pas «générale» au sens où, par l'assemblage de multiples idées particulières, no~s composerions un être qui les résumerait toutes, ou encore nous prélèverions sur chaque idée particulière une abstraction dont nous tiendrions l'idée infinie.

Ne confondons pas l'étendue créée où nous voyons briller le Soleil et l'étendue intelligible où nous concevons cercles et sphères.

Si nous ne connaissions de Ill matière que vingt ou trente figures dont elle serait modifiée, nous n'en connaîtrions presque rien en comparaison de ce que nous en connaissons par l'idée qui la représente ; l'assemblage de mille modifications de notre esprit ne produit que confusion : si je mêle dix couleurs ensemble, je n'obtiens pas l'idée de couleur, mais une couleur particulière tendant vers le brun.

Je ne puis tirer de mon fonds l'idée universelle, il faut que l'infini me la fournisse. L'intelligible, objet immédiat de notre esprit, ne lui est donc pas immanent et nous ne devons pas prendre nos sentiments pour des idées.

Mais, ce n'est pas, comme le conclurait trop vite l'enthousiasme, un autre monde et Théodore, le philosophe, détrompe Ariste lorsque celui-ci, curieux, croit que la métaphysique va le promener en quelques régions enchantées : « Non, je ne vous conduirai point dans une terre étrangère ; mais je vous apprendrai peut-être que vous êtes étranger vous-même dans votre propre pays. Je vous apprendrai que ce monde que vous habitez n'est point tel que vous le croyez ...

» (Entretiens sur la métaphysique...

, I"' Entretien, début).

Ce « monde » intelligible ne se réduit pas aux modifications_ de notre esprit, par lui Dieu nous fait apercevoir un aspect de sa propre réalité. Cependant, si les sciences comme l'arithmétique, la géométrie, l'algèbre nous font connaître les idées d'une infinité de mondes possibles, ne dépendons-nous pas d'expériences 330 Malebranche incertaines dès lors qu'il s'agit de connaître le monde des corps, monde familier auquel nous attachent sensations, histoire et imagination, caverne qui est pour nous comme un « il y a» préalable? S'il reconnaît l'opacité de notre expérience, le philosophe ne saurait toutefois s'en accommoder ni traiter un semblable donné comme un inexplicable « en soi ».

Il ne se résigne pas à déplorer que le sens nous demeure irrémédiablement brouillé, mais cherche la raison de notre propension, presque invincible, à attribuer aux choses matérielles le double pouvoir d'agir les unes sur les autres et.d'agir sur nous.

Sous peine de retomber dans la magie dès qu'il s'agit de physique, la pensée conséquente découvre la véritable source d'être et de puissance.

Comme Descartes, Malebranche remonte à la création divine pour fonder le monde des corps et, comme lui, il n'accepte pas de se représenter une création initiale qui laisserait le monde, une fois créé, subsister par sa propre efficace, Si le monde ne s'anéantit pas, c'est que Dieu le conserve car il ne faut pas moins de puissance pour maintenir dans l'être que pour amener à l'être. Critique de la causalité Les sciences de la nature n'atteignent aucune cause· nécessaire et véritablement efficiente, elles ne connaissent que des conditions, causes secondes, et leur enchaînement légal.

Ces causes naturelles, seulement occasionnelles, doivent être destituées de leur ancienne dignité.

Seul, cause et puissance, Dieu a établi les lois générales qui déterminent d'une manière immuable la communication des mouvements et les rapports des corps.

La lumière, les couleurs, les odeurs, les saveurs se laissent réduire, selon l'intuition cartésienne, à des mouvements.

Mais les corps ne sont causes qu'occasionnelles.

Le soleil occasionne la fécondité de la terre et la vie des animaux, mais n'a par lui-même aucune vertu.

Ainsi toute causalité doit-elle être refusée aux choses matérielles, simples effets enchaînés.

Hume, qui écrit avec les ouvrages de Malebranche sous les yeux, lui, emprunte cette critique de la causalité et rattache une telle' croyance à l'habitude et à l'attente.

Nous croyons qu'une .

boule de billard en heurtant une autre lui communique son mouvement.

La relatio.n extérieure à ses termes, par laquelle nous inférons, repose sur le rassemblement, par l'imagination, des cas semblables et des impressions suc­ cessives.

Mais l'essayiste sceptique n'a cure de remonter à quelque cause première.

Malebranche poursuit cette criti­ que jusqu'à mettre en question le sentiment d'un comman­ dement que ma «volonté» exercerait sur mon corps. «L'esprit même n'agit pas autant qu'on se l'imagine» (XV e Eclaircissement, Réponse à la VIe Preuve).

Puisqu'il n'y a aucune puissance, pourquoi serions-nous, par notre volonté, cause de nos propres mouvements? L'esprit n'est pas cause de nos idées.

Savons-noùs seulement ce qui inter­ vient dans une opération aussi banale et apparemment aussi simple que celle de remuer un doigt ou de prononcer Je nom de notre meilleur ami? Certes, la conscience d'un effort accompagne le plus souvent nos actions, mais ce sentiment, loin de traduire un véritable pouvoir, trahit bien plutôt l'im­ puissance et la stérilité.

De même que la connaissance par les idées claires me rappelle que je ne suis pas à moi-même ma propre lumière, de même l'effort me révèle que l'esprit ne peut pas plus agir sur le corps que les corps ne peuvent agir entre eux.

« Volonté» et «entendement», loin de constituer deux entités indépendantes, sont l'âme elle­ même en tant qu'elle aperçoit et en tant qu'elle aime. L'Ordre .Capable d'aimer différents biens, l'âme, en tant que volonté, est, selon Malebranche, comme portée vers Je bien en général par un «mouvement» naturel.

Il ne s'agit pas là d'une inéluctable nécessité.

La volonté rencontre en effet des biens particuliers auxquels elle peut s'arrêter sans, du reste, en demeurer irrémédiablement captive.

Les causes , naturelles ne sont pas de véritables causes.

Nous méconnaî­ trions entièrement notre réalité morale si nous croyions invincible l'attrait des biens particuliers.

Nous avons «du mouvement pour aller plus loin».

A supposer que nous aimions quelque bien particulier, sachant que nous sommes voués à l'amour du bien infini, nous pouvons, par notre union immédiate avec l'Etre universel, trouver la force de ne pas nous arrêter, penser à d'autres choses et aimer d'au­ tres biens.

La même union au Verbe qui nous révèle les vérités mathématiques (l'ordre des grandeurs) nous décou­ vre libres de suspendre nos jugements et de comparer tous les biens dans l'Ordre des perfections.

Voyant en Dieu les cas d'égalité des triangles, j'y vois aussi qu'iHaut préférer son cocher à son chien et qu'il n'est pas juste de faire à autrui ce qu'on· ne veut pas qu'on nous fasse à nous-mêmes: Principe rationnel, l'amour de l'Ordre authentifie foutes les vertus qui, sans lui, se dégradent en vertus apparentes.

Bien des conduites, semblables à la vertu, ne reposent en réalité que sur la disposition particulière de nos sentiments.

Ainsi, le vin donne-t-il aux soldats une ardeur imitant le courage et la vanité porte-t-elle à secourir les pauvres, sans charité, tandis qu'aimer !'Ordre et .s'y soumettre peut conduire, le cas échéant, à subir le mépris des autres hommes.

Kant, à son tour, ·distinguera, dans les Fondements de la métaphysi­ que des mœurs, la conduite· conforme au devoir de la con­ .

duite ayant le devoir pour principe.

Mais la spécificité de l'analyse malebranchiste ëonsiste à discerner en l'être fini un irrésistible mouvement vers l'infini.

Ce que Kant formu­ lera-avec.Je célèbre « tu dois, donc tu peux »; Malebranche, après avoir montré qué nous n'avons en propre nul pouvoir, l'appréhende comme un pouvoir qui nous vient de !'Etre infini.

Présent en un être sujet aux passions, donc toujours sollicité par les biens particuliers, cet amour de l'Ordre n'exclut pas l'amour de soi, ni le plaisir, sorte d'amour naturel que Dieu met en moi pour moi.

C'est tout un que d'aspirer au bonheur et d'aimer Dieu.

Par le mouvement que Dieu· imprime en nous pour le bien en général, notre âme est rendue capable d''aimer tout ce qui lui paraît bien. En tout amour, même fourvoyé, il y a l'indéracinable sens de l'amour.

La philosophie arbitre le conflit qui opposera Voltaire à la misanthropie pascalienne.

Au mystique s'écriant que s'il y a un Dieu, il faut n'aimer que lui et non les créàtures, l'humaniste rétorque : « Il faut aimer, et très tendrement, les créatures >>.

(Voltaire, Remarques· sur les Malebranche 333 Pensées de M.

Pascal).

Loin de dévaluer l'amour des créatures, ou d'exclure l'amour de Dieu, la philosophie distingue leur sens véritable.

Notre volonté, « toujours altérée d'une soif ardente » (De la recherche ...

, Livre ID, I"' Partie, ch.

IV, § Il), se porte successivement à tout ce qui présente la marque de l'infini, mais elle ne s'en satisfait pas.

Cette inquiétude, signe de notre aspiration à l'infini, anime la parole de saint Augustin : « Vous nous avez faits pour vous. et notre cœur est inquiet» (Confessions, I, I, 1).

Temporairement, la fascination des biens particuliers, vrais ou faux, retient ce mouvement; l'insatisfaction ne tarde pas à renaître.

Malebranche, pour en rendre compte, recourt à un modèle explicatif que lui fournit la physique mathématique : le principe d'inertie permet de penser la rectitude de la volonté : « De même que tous les mouvements se font en ligne droite, s'ils ne trouvent quelques causes étrangères et particulières qui les déterminent » (De la recherche ... Livre 1, ch.

1), de même Je mouvement initialement imprimé par Dieu est-il dévié par les objets-obstacles particuliers que rencontre notre volonté et devient-il courbe. La philosophie, par la méditation de notre union avec !'Etre infini, découvre un rigoureux parallélisme entre la connaissance et la conduite humaine : on ne peut connaître authentiquement que la Vérité et l'on ne peut aimer que le Bien ; Vérité et Bien ne se trouvent qu'en cet être dont la lumière, seule, nous éclaire et que nous ne pouvons entièrement comprendre ; du moins devons-nous l'aimer, car il est seul cause et objet d'amour.

L'amour des biens sensibles ne s'arrête pas à des causes, mais à des occasions de plaisir; on croit y aimer ce que réellement on n'aime pas.

Malebranche interprète l'inexplicable vice non comme une volonté du mal, mais coinme une illusion relative à l'objet du plaisir.

Nous transformons en un rapport de causalité la simple liaison d'un sentiment avec le corps extérieur à l'occasion duquel nous éprouvons ce sentiment.

Les ivrognes, qui prétendent aimer le vin, ne savent pas le sens de ce plaisir; que le vin leur paraisse amer, ils s'en dégoûtent. Ce qui nous plaît, c'est de goûter, à l'occasion de divers objets sensibles, le plaisir dont nous pensons qu'il nous rendra heureux.

Comment prétendre sans absurdité qu'un 334 Malebranche homme qui ruine sa santé s'aime vraiment? N'étant ni un bien ni un mal par lui-même, le plaisir.... »

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