Mondialisation pôles et espaces majeurs, territoires et sociétés en marge Fruits des échanges générés par la mondialisation, les flux dessinent...
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Mondialisation
pôles et espaces majeurs,
territoires et sociétés en marge
Fruits des échanges générés par la mondialisation, les flux dessinent une géogra
phie très particulière de notre monde.
En effet, loin d'unifier ou de rapprocher les
territoires et les hommes, ces flux les sélectionnent, les hiérarchisent, en un mot
les différencient.
Ces flux ont ainsi tissé des réseaux autour des 3 pôles majeurs de la planète qui
constituent le cœur du processus de la mondialisation, tandis que d'autres gra
vitent en périphérie ou semblent, malgré leur proximité géographique, totalement
étrangers à ces mouvements frénétiques.
Enfin, cette hiérarchisation se produit à toutes les échelles : à celle du monde
comme à celle des États ou au sein même des métropoles*.
En quoi la mondialisation transforme-t-elle et hiérarchise-t-elle les territoires ?
• Un monde polarisé et métropolisé autour de la Triade
En tissant des réseaux très sélectifs, qui ont contribué à renforcer la concentration
des flux, la mondialisation a promu des pôles et des espaces majeurs.
Au sein de
ces territoires, majoritairement concentrés au Nord, les métropoles représentent le
cœur du réseau, alors que les façades maritimes en constituent l'espace logistique,
de mise en relation.
■ La Triade: espace d'impulsion de la mondialisation
Actuellement, près de 80 % des flux marchands et 90 % des transactions fman
cières transitent entre les 3 pôles de ce que les géographes et économistes, tel
Kenichi Ohmae en 1985, ont nommé« la Triade», qui regroupe l'Amérique du
Nord (États-Unis et Canada), l'Europe occidentale et le Japon.
Ces 3 espaces sont
à l'origine de plus de 80 % de la richesse produite dans le monde, alors qu'ils
n'abritent que 20 % de la population mondiale.
Au sein de cette Triade dominent les États-Unis grâce à leurs puissances techno
logique, démographique et financière (le dollar reste la monnaie des échanges), et
leur capacité d'intervention militaire.
Pour sa part, l'Union européenne représente
la zone la plus active du commerce international, avec près de 30 % des échanges
mondiaux, et compte en son sein la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne,
3 États parmi les plus puissants de la planète : puissances économiques (puis
sance exportatrice allemande), financières (City de Londres), nucléaires (France
et Royaume-Uni) et politiques (France et Royaume-Uni sont des membres per
manents du Conseil de sécurité de l'ONU).
Enfm, le Japon a fondé sa puissance
sur sa maîtrise et son innovation technologiques, mais est pour l'instant peu pré
sent sur la scène politique et militaire internationale, du fait de son passé récent
(cf chap.
14).
Cette polarisation à l'extrême de l'économie mondiale s'explique essentiellement
par l'histoire et l'économie (industrialisation et colonisation) qui ont donné à ces
territoires une avance et une maîtrise des savoirs et des technologies considérables
par rapport au reste du monde.
Cette Triade forme ainsi une sorte d'oligopole géographique et économique
mondiale caractérisée par la concentration des fonctions de commandement
tant économique que financière, politique ou militaire.
Cependant, on observe depuis peu que cette polarisation tend à perdre de son
attractivité du fait de la montée de pôles autrefois périphériques et qui ont connu
une croissance rapide depuis la fin des années 1990.
■ Les métropoles* mondiales :
lieux de commandement de la mondialisation
Au sein de cette Triade, ce sont les métropoles qui constituent les centres* névral
giques des flux mondiaux.
Par la concentration de ces flux sur des territoires
sélectionnés, la mondialisation a ainsi contribué à l'urbanisation du globe, et ce
même dans les pays en développement.
Aujourd'hui, plus de la moitié de la
population mondiale vit en ville: selon les chiffres de l'ONU, 2,5 % de celle-ci
vit dans les 4 métropoles globales (New York, Tokyo, Londres et Paris), 4 % dans
les grandes métropoles mondiales, 9,4 % dans des mégapoles* et 52 % dans des
villes de moins de 500 000 habitants.
En effet, c'est en concentrant les fonctions stratégiques émettrices des flux que
sont nées ce que les géographes ont appelé « les métropoles mondiales » ou « glo
bales », appellation davantage liée à leur rayonnement économique, financier,
politique et culturel d'envergure mondiale qu'à leur poids démographique.
Ces métropoles* se caractérisent par leur capacité de commandement qu'elles
exercent sur le monde mais également sur leur territoire proche.
Ce commande
ment se déploie au travers des réseaux mondiaux (de transports et commu
nications) qu'elles tissent avec d'autres métropoles mondiales, créant ainsi ce
que l'on nomme« un archipel métropolitain mondial».
Cet archipel regroupe
toutes les villes mondiales qui, par la nature des fonctions qu'elles hébergent,
contribuent à la direction du monde et créent, grâce à leur complémentarité, un
effet de synergie.
Ces fonctions spécifiques et recherchées des métropoles mondiales concernent
essentiellement le secteur tertiaire (dit « supérieur ») que sont la recherche,
l'innovation, les services aux entreprises (consulting, marketing, finances,
assurances ...
), lesquelles bénéficient de la proximité et de l'appui des fonctions
politiques de dimensions nationale et mondiale.
En effet, aux côtés de ces acti
vités de services, les villes mondiales exercent des fonctions de commandement
économique et financier, par le biais des Bourses, des sièges sociaux d'entreprises
ou de grandes instances internationales (FMI, OMC, Banque mondiale ou BCE,
par exemple), mais également politique, par le biais des sièges de gouvernements
ou d'organisations internationales- (l'ONU, la Commission européenne, par
exemple).
La puissance mondiale de ces « villes globales » se traduit également par un
paysage urbain caractéristique, d'inspiration américaine: celui des hyper-centres
(CBD : Central Business District), signe d'une intégration en cours de certaines
métropoles, notamment du Sud, à la mondialisation, comme en témoignent
Singapour dans les années 1980 et Dubaï dans les années 2000, illustrant leur
place grandissante dans les échanges financiers mondiaux.
Une vingtaine de métropoles dans le monde répondent à ces critères, mais seu
lement quatre apparaissent comme des villes mondiales complètes : New York,
Tokyo, Londres et Paris.
Ces villes mondiales complètes sont toutes des villes
littorales et portuaires (même Paris, grâce à Gennevilliers qui est un des premiers
ports fluviaux d'Europe et une plate-forme multimodale très complète) et sont
donc intégrées à l'hinterland* d'une façade maritime qui leur permet de renforcer
leur domination sur une économie de plus en plus maritimisée.
■ Les façades maritimes : lieux de connexion de la mondialisation
En effet, l'essor des échanges par voie maritime a entraîné le développement des
façades maritimes que les géographes nomment « interfaces ».
Ces interfaces
maritimes sont des frontières ouvertes qui mettent en contact des espaces
économiquement différents ou semblables.
Ces espaces sont puissamment
équipés en ports modernes, standardisés, voire automatisés, comme celui de
Rotterdam, afin d'accueillir tous types de navires et de flux marchands (produits
manufacturés, produits agricoles, hydrocarbures, vrac minéralier, etc.).
De plus,
ils sont reliés à un vaste territoire, l'hinterland*, par de denses réseaux de trans
ports qui en font de véritables hubs* maritimes (points d'interconnexion).
Ainsi,
la Northem Range, façade maritime s'étendant du Havre à Hambourg sur près
de 1 000 km, constitue la véritable porte d'entrée de l'Union européenne,
à travers ses réseaux routier, fluvial (Rhin), ferré et aérien qui desservent toute
l'Europe.
Il en va de même à l'Est comme à l'Ouest des États-Unis avec les ports
de New York ou de Long Beach, au Japon avec Osaka et désormais en Chine
avec le port de Yangshan à Shanghai.
Quant à la Méditerranée, elle reste une
interface maritime de seconde zone au regard des volumes échangés : tous trafics
confondus, Marseille, le 1 er port de la Méditerranée, ne fait même pas partie des
30 premiers ports mondiaux.
De plus, l'émission de flux économiques, fman
ciers et humains y est dissymétrique (c'est-à-dire déséquilibré, comme les flux
migratoires presque exclusivement Sud-Nord et les flux fmanciers Nord-Sud) et
le différentiel de développement entre les deux rives reste encore trop important
pour permettre des échanges à haute valeur ajoutée, synonymes de développement
pour les pays de la rive sud.
À noter que ces interfaces possèdent leurs homologues terrestres.
Ces der
nières permettent de nouer des liens d'interdépendance, voire de complémenta
rité encore plus importants que les interfaces maritimes du fait de la continuité
physique, comme en témoigne la frontière américano-mexicaine, archétype de
l'interface terrestre.
Cette frontière illustre les contradictions de la mondialisation,
qui s'est développée sur la discontinuité économique entre les États-Unis et le
Mexique en favorisant des échanges, dans le cadre de l'ALENA, fondés sur la
division internationale du travail.
Se sont ainsi installées sur le territoire mexicain,
le long de la frontière, des usines de sous-traitance des FTN américaines (les
maquiladoras), afm de profiter de la main-d'œuvre bon marché et des avantages
fiscaux.
Cette sous-traitance engendre des flux économiques circulant librement
de part et d'autre de la frontière: pièces détachées et matières premières à desti
nation du Mexique, produits fmis vers les États-Unis.
Dans le même temps, les
flux humains (migrants clandestins mexicains) sont sévèrement contrôlés par des
patrouilles et entravés par l'érection d'un mur le long de la frontière.
Cette fron
tière « paradoxale » (Frédérick Douzet) rend compte, à une échelle régionale, des
contradictions de la mondialisation.
• Un monde inégalement intégré
Si la mondialisation est impulsée par les pôles de la Triade, nombre d'autres
territoires (pays ou régions continentales) gravitent en périphérie, cherchant à
s'intégrer au mieux dans les réseaux et le système d'échanges.
Cependant, encore
aujourd'hui, des régions continentales entières demeurent à l'écart de tout réseau.
■
Des espaces en voie d'intégration
Autour des 3 pôles de la Triade s'organisent donc des périphéries* plus ou moins
bien intégrées dans le système d'échanges grâce à la division internationale du
travail.
Certains pays ont ré�i à intégrer les circuits d'échanges mondiaux en
valorisant un ou plusieurs de leurs atouts que sont les ressources naturelles,
humaines, fiscales et financières.
Il en va ainsi des pays du golfe Persique,
exportateurs de pétrole, des nouveaux pays industrialisés de l'Asie orientale ou
des paradis fiscaux des mers chaudes (Caraïbes, entre autres) ...
D'autres ont pro
fité d'une position géographique privilégiée, comme la cité-État de Singapour ou
l'État du Panama, situés sur....
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