Nécessité d'une pédagogie nouvelle I. Société traditionnelle et pédagogie traditionnelle La société traditionnelle est une société parfaitement intégrée. Les hommes...
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Nécessité d'une pédagogie nouvelle
I.
Société traditionnelle et pédagogie traditionnelle
La société traditionnelle est une société parfaitement intégrée.
Les hommes
sont adaptés à la finalité et à l'organisation de la société.
C'est le cas des
sociétés primitives, mais aussi des sociétés figées à un stade de leur évolution,
ou encore de celles dans lesquelles les forces de stabilité l'emportent nette
ment sur les forces de mouvement.
[...] Ce qui fait la société traditionnelle,
c'est la sclérose et le souci de l'ordre.
Au maintien de cet ordre, tout concourt; dans cette société, il faut
respecter l'autorité : l'autorité des parents, l'autorité des professeurs,
l'autorité des patrons, l'autorité des notables religieux et civils.
Il faut
penser bien.
L'art doit respecter certaines normes.
Il faut être discipliné et
savoir se tenir à sa place.
Pour que les hommes soient heureux dans une
telle société, il faut qu'ils en acceptent le principe, qu'ils soient convaincus
d(? sa nécessité.
C'est la pédagogie qui accomplira cette tâche, c'est elle qui
intégrera les hommes à la société.
Tout le monde a recours à elle : les parents
pour se faire respecter, l'État pour avoir des sujets fidèles, les dirigeants
pour avoir de bons collaborateurs, les patrons pour avoir de bons ouvriers,
les institutions pour sauver les valeurs traditionnelles.
La pédagogie sera conservatrice.
Son objectif sera de former les enfants
et les hommes en fonction de ce qu'on attend d'eux pour assurer la perma
nence des institutions, des pouvoirs et des valeurs.
Ce qui domine la péda
gogie traditionnelle, c'est la notion de modèle, c'est-à-dire d'un type d'homme
servant de référence.
Ce sera 11 l'honnête homme », 11 l'homme de goût, ,i
« l'homme cultivé».
Mais l'honnêteté, le goût, la culture sont entendus dans
le sens que leur donnent les dirigeants de la société, la classe dominante, la
bourgeoisie par exemple.
L'élément moteur de cette pédagogie n'est pas le
développement de la personne, ce qui impliquerait une référence continuelle
à sa liberté, à sa responsabilité, mais l'acquisition maximum de connais
sances reçues; ce qui explique le caractère dévorant des programmes et les
lamentations des éducateurs qui se désolent de ne pouvoir former l'esprit
des élèves.
Pourtant cette pédagogie vise à développer l'intelligence, mais
c'est en fonction d'une certaine bienséance, d'un certain ordre social.
De là
l'importance de la discipline pour rendre l'élève réceptif à cet endoctrine
ment.
Plus la réticence de l'élève est grande, plus forte se fait la contrainte,
contrainte scolaire et contrainte morale.
D'ailleurs tant bien que mal, l'élève
s'adapte, s'ajuste à cet état de choses.
Il accepte de jouer le jeu, le jeu du
bon élève, sage et bien élevé, le jeu aussi de la concurrence effrénée, au
besoin par le copiage, qui le prépare à la concurrence sociale et économique
au sein de la société libérale.
Si maintenant on considère la pédagogie traditionnelle proprement
dite, on constate qu'elle vise à la transmission d'un connu défini en fonction
d'une conception totalitaire du savoir et constituant le contenu de l'ensei
gnement.
Elle cherche à créer un contexte favorable à cette acquisition par
les moyens suivants : des méthodes pédagogiques autoritaires à dominante
didactique; des relations entre le maître et les élèves caractérisées par
l'autorité d'un côté et la déférence de l'autre; des institutions de formation
caractérisées par la discipline, les règlements austères, les sanctions (puni
tions et récompenses).
II.
Société nouvelle et pédagogie no ..velle
Par société nouvelle on peut �ntendre une société en mouvement, quelles
que soient les causes et les modalités de ce mouvement.
On peut entendre
aussi, plus précisément, une société qui est animée par un projet de trans
formation ou d'évolution, que ce projet soit soutenu par un accord national
ou une minorité d'hommes et de groupes.
Ce sont ces dernières hypothèses
que nous envisageons; lorsque nous parlons de société nouvelle, nous
voulons signifier le cas où le projet se définit par une finalité explicite
(démocratie politique, économique, socialisme etc.) et par rappor"i: à des
objectifs précis sur le plan politique et sur le plan économique (par exemple
la participation des travailleurs à h.
vie économique).
Précisons même
qu'il est intéressant de ne se référer qu'à certains types de projets pour la
société nouvelle, à ceux qui sont animés d'une philosophie progressiste et
humaniste de promotion de la liberté et de la responsabilité des hommes,
donc sur le plan social, de leur participation à toute formP.
d'action collec
tive.
En conséquence, les objectifs de la pédagogie nouvelle consistent à
préparer les hommes à prendre en charge le futur, c'est-à-dire à prendre en
charge le changement de la société actuelle selon le projet progressiste ayant
pour but de développer la personnalité de chacun et de lui permettre de
conquérir sa liberté et sa vérité.
Sur le plan des moyens, cette pédagogie fera appel à la participation
car, dans une optique philosophique centrée sur la personne, la formation
s'acquiert, mais ne se reçoit pas.
Chaque personne, enfant ou adulte, a la
possibilité de progresser, de participer, d'être responsable.
Ces méthodes
pédagogiques doivent être d'abord et surtout actives, basées sur une expé
rience personnelle que vient renforcer l'apport des relations sociales (classe,
équipe de travail); le contenu de l'enseignement n'est plus alors qu'un
support pour le travail de formation de l'intelligence et de la personnalité
qui est le but de l'éducation.
Les aptitudes à traiter une information, à s'adap
ter à des situations nouvelles sont essentielles, beaucoup plus importantes
que l'aptitude à répondre aux colles d'un examinateur et à acquérir sans·
coup férir les divers diplômes qui donnent....
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