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NODIER Charles 1780-1 844 Conteur et romancier, né à Besançon. Son enfance est marquée par la Révolution, et surtout par...

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« NODIER Charles 1780-1 844 Conteur et romancier, né à Besançon.

Son enfance est marquée par la Révolution, et surtout par la période de la Terreur: le tribunal criminel de la ville est présidé par son père.

(Plus tard, dans un de ses contes, Histoire d'Hélène Gillet, l'héroïne tuera le bourreau.) Timide, rêveur, Nodier se réfugie très vite dans les livres: à dix-huit ans, il est biblio­thécaire en province; à trente ans, à l'étranger (en lllyrie car il aime aussi les voyages, qui sont pour lui une autre « fuite ») ; à quarante ans à la bibliothèque de !'Arsenal.

Toute sa vie, Nodier se livrera à de bizarres travaux de linguistique et d'érudition, comme son charmant Dictionnaire des onomatopées, rédigé au cours d'une retraite forcée dans le Jura, alors qu'il est poursuivi pour un pamphlet antibonapartiste.

C'est par peur de la vie, peut-être, qu'il imagine un genre nouveau de conte (Smarra ou les Démons de la nuit, Trilby, etc.), que les critiques qualifient de « fantastique ►► ; et il proteste contre cette épithète dans plusieurs de ses préfaces.

En vain, d'ailleurs, mais à juste titre : il est, pour sa part, onirique, et c'est bien pis.

Ce qu'il décrit, il y croit.

Il l'a vu, comme dans ce premier conte, intitulé Une heure ou La Vision; de même il a vécu ces cauchemars de Smarra, où le héros voit sa tête, fraî­chement coupée, rouler sur l'estrade de l'échafaud. Tels portraits ou caricatures que l'on conserve de lui le montrent enfoui dans une sorte de rêve diurne ; son regard se faufile de justesse sous des paupières lourdes.

Il a passé le plus clair de sa jeunesse, et plus encore de son âge mûr, dans cet espace indécis entre le repos et le réveil (dont il nous parle dans Trilby), dans un no man's land qui est sa patrie d'élection, sa terre d'exil volontaire.

Un instant, toutefois, au lendemain du succès de Smarra (1821) et de Trilby (1822), à quarante-deux ans, une bouffée de vie«sociale» - si ce n'est«mondaine» -va lui battre le visage, et c'est bien la pire mésaventure qui ait pu survenir dans la des­ tinée de ce timide.

Les salons de sa bibliothèque de !'Arsenal vont se remplir le soir d'amis bruyants, qui sont les futurs grands noms du romantisme.

Il doit écrire, avec Hugo et Lamartine, un livre de «voyages» (qui, d'ailleurs, ne paraîtra jamais).

Il donne des conseils; il indique des voies; ouvre des portes à la littérature romantique, mais, pour sa part, il ne sait pas occuper le terrain conquis.

Il se ruine à donner ces réceptions hebdomadaires (il n'a jamais su compter), mais il en retire une sorte de griserie : tout se passe comme s'il était traité par ses jeunes et déjà illustres amis en chef d'école.

Hé, non; comme leur aîné, sans plus.

On le charge de rédiger des préfaces.

Hugo s'en va fon­ der un autre cénacle chez lui, rue Notre-Dame-des-Champs.

Toute l'équipe l'y suit aussitôt. Endetté, Nodier doit vendre une partie de sa chère bibliothèque per­ sonnelle.

Du moins est-il rendu à ses rêves.

Il n'avait pratiquement rien produit durant la période glorieuse des«soirées de !'Arsenal» (18231830).

Coup sur coup, il va donner Histoire du roi de Bohême et de ses sept châteaux, où il n'est question ni des sept châteaux ni du roi de Bohême; la plus extravagante de ses œuvres (1830; nouvellement rééditée par les soins du nervalien Jean Richer), puis, en 1832, un roman, Mademoiselle de Marsan, puis (la même année) Le Songe d'or et Jean-François les bas bleus, histoire d'un«innocent», enfin La Fée aux miettes, une des plus étranges (et inquiétantes) créatures sorties de son esprit.

Le chef-d'œuvre de Nodier? De toute façon, le plus connu de ses ouvrages; c'est le récit des aventures du lunatique Michel, chaste amoureux d'une naine au verbe surprenant, experte en métamorphoses (n'est-elle pas entre autres, certaines nuits, Balkis, la reine de Saba?). Toutes les œuvres de ce génie tardif nous surprennent par leur fraîcheur de ton, et, plus encore, par la fraîcheur d'âme de l'auteur. Pendant les quelque dix années qui lui restent à vivre, de nouveaux contes - assez ironiques, cette fois - vont alterner avec des essais désa­ busés, eux aussi, sinon franchement hostiles à un monde qu'il tient pour vil et risible.

Les contes Hurlubleu ou Leviathan le long, par exemple, entendent bafouer cette vie de dérision, tandis qu'il prend à partie les fauteurs de progrès et brandisseurs de lumières dans l'essai De l'utilité morale de l'instruction (On vous le demande à genoux, laissez­ nous nos prolétaires ignorants).

Mais déjà il reprend goût à la vie -c'est- à-dire à la vie subjective, dit-il, la seule sur laquelle il ait jamais eu quelque.... »

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