Ockham (1285-1349) · UNE PHILOSOPHIE DE LA SINGULARITÉ F ranciscain anglais, Guillaume d'Ockham fut une sorte de « rebelle »....
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Ockham (1285-1349) ·
UNE PHILOSOPHIE DE LA SINGULARITÉ
F
ranciscain anglais, Guillaume d'Ockham fut une sorte de
« rebelle ».
Il rompit violemment avec la tradition philoso
phique de son ordre en développant des thèses très antiplatoniciennes,
directement dirigées contre celles du grand philosophe franciscain Jean
Duns Scot.
Il fronda également contre l'autorité du pape, en contestant
son pouvoir temporel.
On trouve dans son œuvre tous les linéaments de
l'empirisme anglais : limitation de la connaissance à l'expérience sen
sible, destruction des abstractions logiques, individualisme et pragma
tisme en politique.
Son influence fut grande aussi sur Luther.
1.
Les mots et les choses
■ La pensée d'Ockham s'inscrit dans la grande discussion médiévale sur
le statut des concepts.
Voici le problème : le mot« chien », par exemple,
ne signifie pas un chien particulier, mais me sert à nommer tous les
chiens possibles.
Il renvoie à mon idée universelle de chien, dont je fais
usage pour reconnaître un animal particulier comme étant un chien.
Est
ce à dire qu'il existe, comme corrélat du mot chien, une entité abstraite,
universelle, qui serait la« caninité »? Les espèces (comme la caninité)
ou les genres (comme l'animalité) existent-ils ?
■ Comme Aristote, Ockham répond par la négative : seuls existent réel
lement les individus singuliers -« tel » ou« tel » chien.
Le chien en soi,
universel, n'existe pas, sinon dans notre esprit.
Il est inutile de redoubler
le monde réel, qui est fait d'êtres singuliers, d'une sorte de monde intel
ligible, peuplé d'idées en soi des choses, qui d'ailleurs devraient bien
être elles aussi des choses singulières ! Ockham applique son principe:
« Il ne faut pas multiplier les entités sans nécessité.
»
■ Mais il va plus loin.
Non seulement il n'existe pas de chien en soi, en
dehors des êtres particuliers, mais il n'existe pas non plus de nature com
mune du chien, qui serait à chaque fois présente dans les chiens parti
culiers.
Tandis qu'Aristote admettait la présence d'une même nature ou
essence dans tous les êtres singuliers d'une même espèce (essence qui ne
saurait exister en dehors de sa réalisation dans une matière particulière),
Ockham nie toute communauté réelle entre les êtres qui se ressemblent.
Il n'y a d'essence que singulière.
Chaque être est seul de son espèce.
■ Ockham continue: s'il est vrai que l'idée existe dans l'esprit, ce n'est
pas sous la forme d'une entité réellement universelle, immatérielle.
L'« universel » n'est pas un objet, mais un « signe » : il n'y a pas
d'entité universelle; c'est seulement l'esprit qui, par un acte, confère
une valeur d'universel....
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