Peut-on contredire l'expérience ? COUP DE POUCE ■ Analyse du sujet - « Expérience » est un terme ambigu, qui...
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Peut-on contredire l'expérience ?
COUP DE POUCE
■ Analyse du sujet
- « Expérience » est un terme ambigu, qui renvoie aussi bien à l'expé
rience quotidienne ou acquise au sens habituel, qu'à l'expérience scienti
fique.
La question mérite peut-être d'être posée dans les deux cas.
- L'expérience acquise par un individu peut sans doute être démentie
par une situation nouvelle, mais aussi contredite par celle d'un individu
différent.
C'est qu'elle élabore, non une connaissance, mais des opinions.
- Quelle contradiction est possible? Si une expérience (scientifique)
est bien menée et interprétée, elle ne pourra être « contredite » que dans
un moment ultérieur du savoir, lorsque les instruments et les théories
auront évolué- mais s'agira-t-il alors de sa simple négation?
■
Pièges à éviter
- Malgré l'aspect un peu schématique que risque de prendre la copie,
il n'est pas conseillé de traiter les deux versions de l'expérience en même
temps : il s'agit de domaines hétérogènes.
- On ne se contentera pas d'opposer à l'expérience scientifique la
pseudo-contradiction que lui apporterait la simple ignorance du domaine
concerné.
- Ne pas oublier que, lorsqu'on parle d'expérience scientifique, celle
ci a une histoire complexe, dont on devra tenir compte pour éviter des
généralisations trop rapides.
CORRIGÉ
[Introduction]
« Croyez-en ma vieille expérience...
», « si j'en crois mon expérience
personnelle, je dirai que...
» : de telles expressions semblent indiquer une
relation entre expérience et croyance.
Or cette relation paraît peu compa-
CORRIGÉ
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tible avec les enseignements d'une expérience scientifique, qui ne concernent pas la simple croyance ou adhésion personnelle, mais sont bien plutôt orientés vers l'élaboration d'une vérité universelle.
«Expérience» renvoie ainsi à deux situations différentes, qui doivent être distinguées, ne
serait-ce que parce qu'elles ne résistent sans doute pas de la même façon à
une éventuelle contradiction.
S'il paraît concevable de contredire l'expérience acquise par celui qui s'en vante, la question « Peut-on contredire
l'expérience?» demande une tout autre analyse lorsqu'il y va de l'expérience scientifique.
[I.
Les deux expériences]
Dans le langage ordinaire, l'expérience désigne l'acquisition progressive d'un « savoir» ou savoir-faire diffus, dont on admet ou suppose qu'il
s'accompagne d'une forme de sagesse.
L'homme d'expérience est ainsi
celui qui sait et qui est capable de conseiller (il est « de bon conseil ») en
fonction de ce savoir.
L'acquisition de cette expérience n'implique pas
une méthode rigoureuse: il suffirait d'avoir« vécu» pour qu'elle ait pu se
former jour après jour, par strates successives ayant en général toujours la
même orientation.
Car cette expérience, que l'on pourrait qualifier de simplement « pratique », est sans origine clairement repérable : elle peut être partiellement
transmise, sans qu'il soit possible d'en repérer un responsable initial.
Elle
est ainsi personnelle et presque anonyme, et c'est pourquoi elle s'énonce
aussi sous la forme du « on sait par expérience que» : le« on», comme
l'a souligné Heidegger, permet de se fondre dans un collectif, et de refuser
la responsabilité entière d'une affirmation.
Il y a dans ce «savoir» un
accueil passif, une simple réception de ce qui s'offre, un peu par hasard
ou par chance, comme« bon à apprendre».
Et plus l'expérience s'enrichit
dans le temps ou s'accumule, plus elle se confirme, pour composer finalement un ensemble d'opinions qui prennent volontiers l'apparence de certitudes définitives.
Il est facile d'opposer à ce savoir mal construit les qualités de l' expérience scientifique, telle qu'elle est instaurée au xrx• siècle.
Celle-ci
témoigne d'une véritable activité de l'esprit, qui pose à la nature une
question précise.
L'esprit scientifique n'attend pas que l'enseignement lui
vienne de l'extérieur, il le provoque.
Pour obtenir ce qu'il cherche, c'est-à-dire la connaissance d'une loi
déterminant un phénomène encore inexpliqué, l'expérimentateur doit évidemment connaître l'état actuel du savoir dans le domaine concerné.
Mais
dans la mesure où ce savoir est insuffisant, il doit également être prêt à le
remettre en cause, au moins partiellement.
L'expérience ne sera pas
menée au hasard, et Claude Bernard a montré qu'elle s'inscrit en fait dans
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SUJETS CORRIGÉS
un véritable raisonnement expérimental (ce qui indique à quel point la raison et la théorie sont en jeu dans toute expérimentation), constitué de
quatre moments principaux : l'observation du phénomène, la formulation
d'une hypothèse (ou explication anticipée), le montage expérimental qui
va tester l'hypothèse, et, si la validité de cette dernière est confirmée, la
formulation d'une loi.
En principe ou dans l'absolu, une expérience correctement montée et organisée n'a pas besoin d'être répétée (même si les
expériences dans les sciences contemporaines sont devenues tellement
subtiles qu'on préfère les répéter quand on en a les moyens, à la fois techniques et financiers) : ce qu'elle enseigne peut être considéré comme
acquis.
La rigueur et la complexité de cette démarche n'ont évidemment
rien de commun avec l'acquisition hasardeuse de l'expérience « pratique».
Il est donc vraisemblable que la possibilité de contredire une
expérience ne soit pas la même, n'ait pas la même portée dans les deux
cas.
[Il.
Les conflits d'expérience]
Celui qui prétend contredire l'homme « qui a de l'expérience» risque
bien souvent de provoquer des réactions virulentes, sinon violentes.
Pourquoi? C'est que, dans ce cas, contredire l'expérience acquise semble s'en
prendre au vécu, à l'épaisseur biographique de l'indivi.du, puisque c'est
bien cette dernière qui a permis d'accumuler l'expérience dont il fait étalage.
Aussi peut-on constater que l'homme d'expérience fait volontiers état....
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