Poétique du surréalisme La poétique du surréalisme repose sur l'humour noir, le jeu sur les images. En poésie, les surréalistes...

« Poétique du surréalisme La poétique du surréalisme repose sur l'humour noir, le jeu sur les images.

En poésie, les surréalistes approfondissent les recherches symbolistes sur un vers totalement libre.

Pour le récit, ils s'opposent à la poétique du roman réaliste fondée sur la vraisemblance du per­ sonnage et la force de la description. L'HUMOUR L'humour, forme efficace de subversion, est un des principes pre­ miers de l'expression surréaliste.

Breton revendique la création de l'expression « humour noir».

En 1939, il publie une Anthologie de l'humour noir.

L'humour est une façon de préférer le principe de plai­ sir au principe de réalité dans le contact avec des idées désa­ gréables comme dans ce « slogan» surréaliste : « Vous qui avez du plomb dans la tête/fondez-le pour en faire de l'or surréaliste.

» L'humour passe souvent par un travail sur l'image figée pour en faire fuser une création renouvelée. L'IMAGE VERBALE Les surréalistes sont à la recherche d'images qui échappent à la syntaxe, qui transgressent la logique rationnelle, des métaphores motivées au minimum, où le lien entre comparé et comparant est lâche.

La définition théorique de l'image verbale vient de Pierre Reverdy. I.;image est une création pure de l'esprit. Elle ne peut naître d'une comparaison mais du rapprochement de deux réalités plus ou moins éloignées. Plus les rapports des deux réalités rapprochées seront éloignés et justes, plus l'image sera forte - plus elle aura de puissance émotive et de réalité poétique. L'émotion ainsi provoquée est pure, poétiquement, parce qu'elle est née en dehors de toute imitation, de toute évocation, de toute comparaison. Pierre REVERDY,« L'image » dans Nord-Sud, 13 mars 1918. Ce poème d'André Breton accumule ainsi des images dont la beauté vient de leur apparente gratuité. Ma femme à la chevelure de feu de bois Aux pensées d'éclairs de chaleur A la taille de sablier Ma femme à la taille de loutre entre les dents du tigre Ma femme à la bouche de cocarde et de bouquet d'étoiles de dernière grandeur Aux dents d'empreintes de souris blanche sur la terre blanche A la langue d'ambre et de verre frottés Ma femme à la langue d'hostie poignardée. André BRETON, «L'Union libre» dans Clair de terre, Poésie/Gallimard, 1966, p.

93. Les images sont ici d'autant plus fortes qu'elles sont inattendues et que la liaison entre référent et référé est à la charge du lecteur qui participe de la création surréaliste.

Le surréalisme a beaucoup usé de l'image verbale en poésie. LA POÉSIE Les surréalistes préconisent une poésie libérée des règles formelles, jouant sur une combinaison entre les tropes*, les jeux de sonorités et les images de l'ancienne poétique et des rencontres prosodiques ou sémantiques inattendues (➔ LECTURE 3). Plus tard, à partir de 1940, Aragon, Char, Desnos, Éluard reviennent à des formes traditionnelles: l'alexandrin et l'octosyllabe. Finalement, la poétique du récit est peut-être encore plus subversive que celle de la poésie. 104 LE SURRÉALISME LE RÉCIT Depuis !'Antiquité, le récit échappe à la règle de l'art poétique.

Les surréalistes opposent leurs récits à ceux de leurs précurseurs et à l'esthétique du réalisme.

Ils en critiquent l'apparente objectivité, les descriptions, les portraits, la psychologie.

Les romans surréalistes accumulent les indices d'invraisemblance pour mieux rendre compte du vrai.

Il s'agit, selon une formule célèbre d'Aragon, de concevoir le « mentir-vrai ». 1Contre le personnage réaliste Ainsi, le personnage réaliste bien décrit n'est pour les surréalistes qu'un leurre trompeur et lourd.

Aragon au début d'Aurélien {1944) ne livre aucun portrait de l'héroïne ; il préfère insister sur la résonance du nom de la jeune femme; il livre une sorte d'obsession vague chez le personnage éponyme*. La première fois qu'Aurélien vit Bérénice, il la trouva franchement laide.

Elle lui déplut, enfin.

Il n'aima pas comment elle était habillée.

Une étoffe qu'il n'aurait pas choisie.

Il avait des idées sur les étoffes.

Une étoffe qu'il avait vue sur plusieurs femmes.

Cela lui :fit mal augurer de celle-ci qui.... »