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Pologne (1988-1989): La "table ronde" Le destin polonais des années quatre-vingt semblait désespérément se heurter à la quadrature du cercle....

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« Pologne (1988-1989): La "table ronde" Le destin polonais des années quatre-vingt semblait désespérément se heurter à la quadrature du cercle.

La normalisation ne parvenait pas à détruire, ni même à endiguer l'opposition sociale et politique.

Et cette dernière ne réussissait pas à tirer profit de son redéploiement pour sortir d'une situation bloquée.

Pour chacune des parties, il manquait quelque chose pour remporter la victoire.

Au pouvoir il manquait la réussite économique qu'il avait promis le 13 décembre 1981 pour justifier son coup de force.

A l'opposition, et notamment à la direction de l'ex-Solidarité, faisait cruellement défaut depuis 1982 le "pistolet" de l'agitation sociale. Un déblocage est venu en 1988 du sentiment partagé par les deux parties qu'il fallait ouvrir une transition s'appuyant sur une stratégie de coopération pour éviter à la Pologne une catastrophe sociale et économique.

Il s'agissait également de profiter du décloisonnement gorbatchévien sur le plan géopolitique pour procéder à une réforme institutionnelle substantielle.

La bienveillance de Moscou semblait acquise dans la mesure où la perestroïka ne pouvait s'offrir le luxe d'une déstabilisation en Pologne qui aurait entraîné une crise géopolitique majeure.

Mikhaïl Gorbatchev a réitéré son soutien au général Wojcieh Jaruzelski lors de son voyage officiel en Pologne en juillet 1988.

Ce sont les Soviétiques qui, en ouvrant à Lech Walesa les colonnes de Temps Nouveaux en février 1989, fait sans précédent, ont encouragé le premier secrétaire du POUP (Parti ouvrier unifié de Pologne), qui est aussi le "général de l'état de siège", à assouplir sa position vis-à-vis de l'opposition et à commencer la "table ronde" prévue avec celle-ci au plus vite. Comment s'explique cette volte-face du pouvoir polonais qui fait fi des attendus du 13 décembre 1981, c'est-à-dire de la dissolution de Solidarité et de la répression contre ses militants? Une économie en régression L'incapacité du pouvoir à enrayer les déséquilibres de l'économie polonaise et une double vague de grèves (avril-mai et août 1988) ont été à l'origine du remplacement du gouvernement de Zbigniew Messner par celui de Mieczyslaw Rakowski (septembre 1988).

En vérité, une poussée inflationniste record a été le point saillant de l'année 1988.

Les prix de détail pour les marchandises et services se sont envolés (+60%). Même si les revenus de la population ont crû plus vite (+83,1%) que les prix de détail, les ménages n'ont pu faire face, dans la mesure où les pénuries ont touché la plupart de produits de consommation.

En 1988 pour 1 000 zlotys, il n'y avait que la valeur de 830 zlotys de marchandises disponibles.

Le gouvernement Messner avait une fâcheuse tendance à pousser à la "roumanisation économique" de la Pologne: "surchauffer" les industries exportatrices au détriment de celles tournées vers le marché intérieur pour montrer aux Occidentaux, au FMI et à la Banque mondiale, moins la capacité réelle du pays qu'une volonté farouche de rembourser la dette (38,9 milliards de dollars en décembre 1988).

Ainsi s'explique le taux record d'accroissement de la production industrielle (+5,4%). Mais, malgré l'activisme commercial, le traitement de la dette ne peut trouver de solution autonome.

Le Vice-Premier ministre Sekuta a lui-même déclaré: "L'endettement nous étouffe ; le seul remboursement des intérêts pour 1989 devrait mobiliser 3 milliards de dollars, pendant que notre solde commercial atteindra 1 milliard de dollars." On comprend que l'objectif du nouveau gouvernement en matière économique est d'attirer en Pologne le plus possible de capitaux étrangers.

C'est le but des nouvelles lois sur la création des entreprises privées, notamment à capital étranger, et du remplacement du Plan directif par une Commission de planification au pouvoir très limité.

Ces évolutions s'opèrent suivant un pastiche de la devise de la Révolution française: "Liberté, Égalité, Concurrence" comme le dit avec délectation le nouveau ministre de l'Industrie M. Wilczek, prototype du nouveau cours "libéral", à la fois chef d'entreprise privée, milliardaire et membre du POUP.

Ces lois prévoient un dispositif fiscal et douanier alléchant.

Mais le nouveau Premier ministre a compris aussi qu'une pression trop brutale sur la population, si celle-ci n'était pas associée aux choix de l'austérité, était facteur de déstabilisation sociale.

L'arrivée du nouveau Premier ministre coïncida avec la volonté de puiser dans les réserves pour s'offrir un délai de grâce.

Ainsi, 280 millions de dollars furent prélevés sur les fonds du ministère de la Coopération économique avec l'étranger pour procéder aux achats des biens de consommation.

Mais cette injection s'est faite sans plan d'ensemble et ses effets n'ont pas convaincu la population. Radicalisation des jeunes ouvriers Avant le mois d'avril 1988, on croyait la Pologne enfoncée dans la torpeur.

Et pourtant, tous les experts redoutaient l'irruption d'un mouvement irrationnel, désespéré, tant était sensible la détérioration du niveau de vie: avec 10 millions de personnes vivant en dessous du minimum social (euphémisme utilisé par les autorités pour parler du seuil de pauvreté), la valse des prix, la pénurie et la crise du logement, on pouvait s'attendre au pire.

En effet, en avril-mai 1988 d'abord, puis en août, a commencé une grève différente, non généralisée à toute la population active comme ce fut le cas en 1980, mais dure et déterminée, menée par une nouvelle génération ouvrière qui, bien que n'ayant pas vécu le temps du syndicat libre, a limité ses revendications à une seule: la relégalisation de Solidarité, comme si cela conditionnait tout le reste, y compris les augmentations salariales.

Certains commentateurs ont mis l'accent sur le fait que ces jeunes gens ont peu.... »

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