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Pour une réflexion sur la mutation de l'Université La rigidité du système français d'enseignement, son ultra-centralisation et son adaptation à...

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« Pour une réflexion sur la mutation de l'Université La rigidité du système français d'enseignement, son ultra-centralisation et son adaptation à la société ancienne lui ont permis de résister pendant plus de cent cinquante ans à toute tentative de réforme pro­ fonde. Il s'est écroulé d'un seul coup sous la poussée du mouvement des étudiants et des travailleurs.

Ensemble, étudiants et enseignants recherchent maintenant les principes des structures futures.

Celles-ci doivent per­ mettre un renouvellement et une contestation qui revêtiront un caractère permanent. Trois principes fondamentaux, d'emblée, se sont imposés : contesta­ tion, autogestion, autonomie. Contestation L'Université est un centre de réflexion permanente qui permet la contes­ tation du savoir, de la société et d'elle-même. La transmission du savoir ne peut être celle d'un savoir sclérosé : la recherche, par vocation, remet en cause tout savoir pour le renouveler. Elle ne peut qu'être critique des connaissances acquises et par conséquent des finalités de la vie économique et sociale, nécessairement liées aux formes du savoir. Cette contestation doit déboucher sur une action concrète.

Les conflits entre les conceptions que la recherche met en question et celles qu'elle élabore sont inévitables. L'Université ne peut accepter d'être l'entreprise moderne qui fabrique­ rait les cadres que lui demanderait la société : il lui faut apprécier elle-même les besoins qu'elle satisfait, les orienter et les créer, choisir librement ses activités d'enseignement, de recherche et de formation. D'autre part, elle se doit de contribuer à la définition de l'avenir de la collectivité nationale.

L'enseignement supérieur doit, par des représen­ tants élus dans toutes les instances d'élaboration du plan de développement économique et social, apporter son concours à la prospective et à la prévi­ sion selon ses critères qui ne sont pas nécessairement ceux de la rentabilité économique. Un nouveau type de rapport doit ainsi s'établir entre l'Université et la société et donner progressivement son sens au devoir de contestation de l'Université. A l'égard d'elle-même ce devoir de contestation implique que les étudiants et les enseignants puissent remettre en cause régulièrement et en toute liberté le contenu et les formes de l'enseignement. La liberté d'information politique, l'information et les débats librement organisés dans l'Université entre étudiants, enseignants et travailleurs sont indispensables à cette contestation.

Un ensemble de règles intérieures à chaque établissement d'enseignement supérieur doit garantir ces principes ainsi que la présence et la libre expression des minorités. Autogestion Cette contestation permanente ne peut être le fait des seuls enseignants ou des seuls étudiants.

Elle provient de l'ensemble.

Un nouveau rapport entre étudiants et enseignants, déjà pressenti dans les commencements actuels, doit se définir progressivement à cette fin. Ce rapport doit notamment se traduire dans la conjonction systéma­ tique de l'enseignement et de la recherche, dans l'association des étudiants avancés à cette double activité et dans l'autogestion des établissements d'enseignement, cette autogestion confiant à tous les échelons le pouvoir de conception et de décision aux étudiants et à tous les enseignants. Autonomie Le pouvoir de conception et de décision des étudiants et des enseignants serait illusoire si l'enseignement en général et ses établissements n'étaient autonomes, ce qui implique que soit laissée à chacun la responsabilité de ses affaires propres. Cette responsabilité ne peut se concevoir sans l'institution d'organismes capables de neutraliser les forces extérieures qui avec la complicité de certains universitaires conservateurs et technocrates pourraient déposséder en fait étudiants et enseignants du pouvoir de conception et de décision en tout ce qui concerne le fonctionnement de l'Université. D'autre part, la révolte légitime contre une centralisation de type napoléonien ne doit pas faire oublier que l'autonomie ne peut commencer que par l'instauration d'un pouvoir proprement universitaire capable de s'imposer ses propres règles et d'en assurer le respect.

L'existence d'une autorité centrale, émanation directe du pouvoir politique, étant récusée, ce pouvoir suppose une organisation allant de la base au sommet, une coopéra­ tion entre établissements se complétant mutuellement, coordonnant leurs vocations et leur fonctionnement, et se fédérant au sein d'instances de niveaux de plus en plus élevés. (Docummt élaboré par la Commission nationale inter-disciplines qui a réuni pendant plusieurs semaines des étudiants, des enseignants et d'anciens étudiants venant d'horizons intellectuels et géographiques différents.

Elle comprenait aussi des ingénieun.) COMPR�HENSION DU TEXTE l.

En quoi le système traditionnel français d'enseignement est�il «rigide»? 2.

Quels faits peuvent inciter les auteurs à affirmer que ce système(,( s'est écroulé d'un seul coup »? Les auteurs emploient Je terme « mutation » de l'Université ; pourquoi n'utilisent-ils pas « évolution », « révolution »? . 3.

Comment « les finalités de la vie économique et sociale » peuvent-elles être « liées aux formes du savoir »? 4.

Quels critères différents de ceux de « la rentabilité économique » peuvent être pris en considération par l'Université? 5.

Comment comprenez-vous l'expression : « universitaires technocrates »? 6.

Dans l'esprit des réformateurs les trois principes (contestation, autogestion, autonomie) sont liés.

Quelles sont les liaisons? 7.

La date de rédaction du document (6 juin 1968) est importante.

Que permet-elle de mieux comprendre? EXPLOITATION DU TEXTE l.

Ce texte a été souv3nt considéré comme particulièrement caractéristique des tendances du mouvement de Mai 68.

Qu'en pensez-vous? 2.

Pensez-vous que le syst\:!me français d'enseignement se soit complètement«écroulé»? N 'y-a-t-il pas des valeurs et des méthodes qui subsistent? Quels sont les éléments qui vous semblent s'être écroulés, ceux qui vous paraissent ébranlés, ceux que vous croyez solides? 3.

Les auteurs affirment que la recherche met en conflit les anciennes conceptions et les nouvelles.

Trouvez dans l 'histo.ire des sciences et des techniques des exemples de ruptures, de luttes, d'incompréhensions.

N'y-a-t-il pas aussi des exemples de perma­ nences, de développements, de filiations, de continua.tiens dans certaines directions? 4.

Résumez les arguments montrant la fécondité scientifique de la contestation, puis montrez les dangers possibles du dénigrement systématique. 5.

L'enseignement doit-il préparer efficacement à la société environnante ou s'efforcer de la changer? Cette question n'est-elle pas particulièrement grave dans une école de techniciens ou d'ingénieurs? 6.

Comment voyez-vous les rapports entre l'enseignement technique et l'industrie? Contestations? Intégrations? Silences sur les problèmes? 7.

Sous quelles formes concevez-vous les diaÎogues entre enseignants et enseignés? 8.

Précisez les avantages de l' autonomie.

Cherchez aussi les limites del'autonomie (risques d'incohérence? de gaspillage? de féodalités? etc.). 9.

Quels nouveaux devoirs vous sembleraient accompagner les nouveaux droits à la · contest�tion, à la cogestion, à l'autonomie? 10.

Essayez de présenter deux synthèses sur les projets de« mutation» de l'Université: l'une regroupant les réserves des « conservateurs», l'autre formulant les critiques des étudi�ts révolutionnaires. Pour faciliter la deuxième synthèse voici un extrait d'une discussion organisée par Paul Bourcier à une table ronde des Nouvelles littéraires (20-6 68) à laquelle participaient Marc Hatzfeld (Président de la commissicn naticnale inter-disciplines) et J.-F.

G.

jeune responsable d'un mouvement révolutionnaire. Paul BOURCIER.

- A votre avis, quels doivent être les principes essentiels de la cc Nouvelle Université»? Marc HATZFELD.

- Il faut parler tout d'abord des structures de l'Université.

L'Uni­ versité doit être autonome.

L'autonomie de l'Université se définit de deux manières. D'une part autonomie vis-à-vis des pouvoirs extérieurs, l'État et les pouvoirs privés et, d'autre part, autonomie à l'intérieur -de l'Université,,c'est-à-dire la plus grande décentralisation possible.

Ensuite, l'Université doit se définir par son objet, c'est-à-dire la critique du monde extérieur et du savoir du monde extérieur, et la critique.... »

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