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Présence et absence de l'auteur Dans le prologue du Chevalier de la charrette, Chrétien de Troyes a souligné le «travail»...

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« Présence et absence de l'auteur Dans le prologue du Chevalier de la charrette, Chrétien de Troyes a souligné le «travail» et I' «application» (v.

29) qu'il a apportés à la rédaction de son roman.

L'écriture est un art, au sens médiéval du terme: une forme d'artisanat.

Les inter­ ventions de l'auteur à l'intérieur du récit peuvent être com­ parées à la signature que l'artiste appose à son œuvre.

Mais la technique du suspense relève d'un talent plus subtil.

Enfin, le recours à l'ironie trahit la liberté de !'écrivain. LES INTERVENTIONS DE L'AUTEUR Le discours au style direct Si l'on excepte le prologue, Chrétien de Troyes parle rare­ ment en son nom dans Le Chevalier de la charrette.

Seules des raisons explicatives ou la volonté de vanter son travail l'amènent parfois à sortir de son silence. Au moment d'évoquer la charrette d'infamie, Chrétien fait une pause dans son récit pour expliquer l'usage de «ce temps-là» (v.

325), comparé au temps,«présent» (v.

324).

Le caractère didactique, pédagogique, de ce type d'interven­ tion peut être souligné par le recours à un dialogue fictif entre l'auteur et son lecteur.

Dans la scène finale du roman, Chrétien éclaire par ce procédé le déchirement intime de la reine Guenièvre, partagée entre la bienséance sociale et son amour adultère (v.

6820-6841 ). Comme pour authentifier le sérieux et la qualité de son travail, Chrétien de Troyes affirme respecter scrupuleuse­ ment l'ordre des épisodes.

Il s'interdit ainsi d'anticiper sur le rôle final que jouera la sœur de Méléagant : ce serait en effet « rendre difforme» le récit, et l'empêcher de suivre « un droit chemin » (v.

6247-6251).

Mais le romancier déroge habilement à cette règle en confiant à ses personnages la mission d'annoncer la suite de l'histoire. Des annonces discrètes Le premier nain que rencontre Lancelot prédit la scène du cortège de la reine, dont le héros sera témoin : tu pourras savoir d'ici demain ce que la reine est devenue. (V.

358-359). De même, la querelle qui oppose le prétendant orgueilleux à son père dans la prairie des jeux (v.

1673-1814) préfigure le conflit entre Méléagant et Bademagu à la cour du royaume de Gorre. Par ces annonces discrètes et éparses, Chrétien ne livre qu'une révélation fragmentaire et progressive de l'intrigue. Il procède touche par touche, comme le feront, au x,xe siècle, les peintres « pointillistes »1• Mais, bien souvent, des taches d'ombre demeurent dans le roman. LE SUSPENSE L'anonymat du héros Lorsqu'au début du roman, Gauvain rencontre Lancelot dans la forêt, il semble déjà le connaître, puisqu'il ne lui pose aucune question.

Pourquoi Chrétien ne révèle-t-il pas le nom du héros avant le vers 3660? Tout d'abord, l'anonymat permet d'attiser la curiosité du lecteur.

En outre, il permet de différencier « le chevalier de la charrette » et « Lancelot» : le romancier met en scène un personnage en train d'évoluer, et non fixé par la tradition.

Ainsi, tout en réutilisant une 1.

Le pointillisme est un procédé qui consiste à peindre en juxtaposant des points de couleurs différentes. légende antérieure (la libération de Guenièvre par Lancelot), Chrétien ménage sa liberté créatrice.

Il finit par dévoiler l'iden­ tité du héros; en revanche, certaines questions gardent leur mystère jusqu'à la fin du roman. Des questions sans réponse A quel «ami» la reine s'adresse-t-elle «tout bas», au moment d'être emmenée par le sénéchal Keu (v.

207-211)? Les.... »

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