Quel sens et quelle valeur peut-on accorder à l'expérience 7 1. ANALYSE DU SUJET. CONSEILS. REMARQUES DE MÉTHODE . •...
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Quel sens et quelle valeur peut-on accorder
à l'expérience 7
1.
ANALYSE DU SUJET.
CONSEILS.
REMARQUES DE MÉTHODE
.
• Devant l'intitulé de la question, vous vous interrogerez
de prime abord sur le sens des concepts : sens = significa
tion; valeur = caractère qui fait qu'on estime quelque chose
et qu'on admet, sa supériorité.
Mais le concept qui va poser
immédiatement problème est celui d'expérience.
La diffi
culté va tenir pour vous avant tout à la multipliçité .de
significations du mot expérience; en effet, il y a l'expérience
au sens très empirique et tout à fait concret du terme, mais
il y a aussi l'expérience scientifique, conçue comme expéri
mentation et organisation méthodique des phénomènes et,
enfin, en simplifiant encore tieaucoup les choses, il.
y a,
.
au-dessus de ces expériences, celle où s'unissent l'individuel
et l'universel, du type expérience esthétique ou métaphy
sique.
• Dès lors, devant la multiplicité de sens du mot expé
rience, vous avez avantage à adopter le plan progressif.
par
-approfondissement des notions, de manière à établir une
structure logique répondant pleinement à l'intitulé précis du
sujet.
Le plan dialectique, par thèse, antithèse et syntMse
ne paraît pas ici en mesure d'intégrer vos différents élé
ments de connaissance et de ·réflexion.
·
• Quelle que soit la signification du terme expérience,
celle-ci se présente comme l'épreuve relativement subie
d'une réel étranger.
Comment une épreuve extérieure au
sujet peut-elle avoir sens et valeur? Tel est le problème posé
par l'intitulé du sujet.
Il.
BIBLIOGRAPHIE
KA.NI'
Critique .de la raison .
pure (P.U.F.) (Préface de la
seconde édition - Esthétique transcendantale).
Jean WAHL
L'expdrience méthaphysique (Flammarion)•.
Ferdinand ALQUIÉ
L'expérience (P.U.F.) (Coll.
Initiation philosophique).
III.
DISSERTATION
t • Introduction
L'intitulé de la question nous met, tout d'abord, face au
concept de sens, qui est d'une étonnante diversité.
Ici, nous
nous ne retiendrons ni le sens comme fonction psycho
physiologique ni le sens comme jugement, �ais _conserve
rons l'acception courante du mot sens comme signification.
Quant au terme de valeur, définissons-le ici comme un
caractère des choses, consîstant en ce qu'elles méritent plus
ou moins d'estime.
C'est le terme d'expérience qui pose
problème, à cause_ �e la multiplicité de sens de ce mot;
L'expérience désigne ce qui nous est donné s�nsiblement et
empiriquement, mais aussi l'expérimentation, l'action d'ex
périmenter (faire des expériences scientifiques) et, enfin, un
troisième type d'expérience (métaphysique, esih�tique,
etc.), où semble s'incarner /'universel, où vient peut-être à
jour l'absolu.
· ·
Néanmoins, à ces.
trois niveaux et malgré cette diversité,
le terme d'expérience gagne à être·unifié.
Dans tous les cas,
il semble bien qu'il y ait, dans l'expérience, un élément de
passivité et de réceptivité, comme si en elle quelque chose
était donné qui n'est pas entièrement constitué par le sujet.
Parler d'expérience, c'est signifier que nous· faisons
l'épreuve d'un réel étranger.
L'intitulé de la question témoigne de quelque méfiance
vis-à-vis du concept d'expérience, tel que nous venons de le
définir.
Aussi, en mettant l'accent à la fois sur le sens du
terme expérience (élément de passivité présent 4ans toute
connaissance humaine) et sur le verbe pouvoir (quelle
valeur peut-on accorder, est-il légitime d'attribuer...
) nous
dirons que le problème qui surgit est le suivant,: si l'expé
rience désigne le fait d'éprouver (plus ou moins passive
ment) quelque chose, comment cet élément de réceptivité.
peut-il être formateur et signifiant et n'y a-t-il pas quelque
difficulté à valoriser la pure réception d'un donné? En
somme si l'expérience renvoie·éventuellement à quelque
« table rase » où s'inscriraient en nous les choses, comment
peut-elle_ véhiculer réellement signification et valeur?
2• Discussion
A) L'expérience sensible immédiate.
Le sens premier de l'expérience me renvoie, tout d'abord,
aux données concrètes et immédiates de mon existence, aux
• qualités sensibles», au divers tel qu'il m'apparaît concrè
tement.
Ce type d'expérience me semble familier.
Qualités
sensibles et sensations paraissent non seulement immédia
tes, mais claires.
Je sens du chaud, du froid, de l'acide, etc.
L'expérience signifie, ici, la pure qualité.
Je puis apparem
ment accorder à cette notion d'expérience la signification de
« données pures de la sensation », comme si j'étais alors en
f.ace d'un vécu tout à fait évident, ·qui posséderait, du même
coup, la valeur maximale et le plus grand prix, puisque les
qualités sensibles constitueraient alors un élément premier
et originel de connaissance s'imposant à moi.
« Le sensible
est une donnée fondamentale: Io\n qu'on le puisse concevoir
à partir d'autre chose, il semble que ce soit à partir de lui
que tout réel soit conceyablc.
Ne constitue-t-il pas, de fa
sorte, un élément premier� et l'un des principes de notre
savoir?»_ (Alquié, L'expérience., p.
33, P.U.F.).
Dès lors,
l'expérience.
conçue comme « pure sensation », formerait le
premier donné véridique, l'intuition concrète qu'il me.
fau
drait préférer à tout ordre de réalité, l'ordre même des
valeurs.
Mais ce type d'expérience, si évident qu'il paraisse, se
dérobe à moi, insaisissable, quand je tente de l'atteindre, et
parait, en fait, si proche du néant, si dépourvu de sens qu'il
semble difficile d'admettre bien longtemps sa valeur et ses
qualités.
Quand je veux saisir la sensation immédiate, le pur
sentir, ils reculent indéfiniment: ou bien je redécouvre en
eux la perception (incontestable), ou bien je tente d'en
demeurer à la pure immédiateté et cette immédiateté sans
concept se dérobe indéfiniment à ma quête et à ma
recherche.
Ainsi Hegel a-t-il montré, dans la Phénoménolo
gie de /'Esprit, le vide et le néant de toute expérience
purement immédiate, de tout «ici-et-maintenant» vécus
dans le pur instant.
A la rich�se prétendue de l'expérience
immédiate sensible, à son immense valeur naïvement affir
mée, Hegel oppose son néant effectif.
L'expérience sensible
immédiate ne peut dire son objet (puisqu'elle ne peut
introduire aucune médiation).
Elle l'ép�uve donc cQmme
ineffable.
Mais cet ineffable est, en réalité, ce qu'il y a de
plus pauvre! Si l'expérience sensible immédiate s'apparaît à
elle-même comme infiniment profonde et infiniment riche,
en fait, sa réalité est inconsistante, pur néant, pure vacuité,
absence totale de sens �t de valeur.
Quel sens et quelle valeur peut-on accorder à l'expérience
sensible.
immédiate? On ne peut tirer de ce néant nulle
signification vraie puisqu'il se dérobe à nous.
Quant à sa
valeur, elle semble elle aussi se transmuter en non-valeur.
L'immédiat est ce qu'il y a de plus pauvre.
Aussi l'élément
de pure réceptivité et de pure passivité ne saurait être
valorisé.
En vérité, l'expérience sensible ne pourra acquérir
de sens et de dignité que si elle est unifiée par }'Esprit,
organisée par le _moi.
Alors .les données·, fragm�ntaires,
évanescentes et diverses accèdent progressivei:nen.f'à' l'unité.
Nous parvénôns à la perception et à l'unité dè'là"coriscience.
Ainsi l'expérience sensible se ramène-t-èlle finalement au
sujet.
Le sensible n'a de sens et de valeur que.par rapport au
sujet et à l'esprit.
Ainsi les sensations nous renvoient-elles à
un sujet qui est leur fondement.
A ce niveau, il n'y a.
pas
d•expérience pure en tant que teHe, mais un sujet unifiant
une mµltiplicité.
C'est donc le sÙjet qui fonde la vérité et la
valeur de l'expérience prise eri sa première signification,
comme expérience concrète.
B) L'expérience au sens....
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