Devoir de Philosophie

Rapports de forces et institutions ■ LA VIOLENCE. REPÈRES CONTRE LA VIOLENCE. L'HUMANITÉ. • Aveugle, la force des éléments naturels...

Extrait du document

« Rapports de forces et institutions ■ LA VIOLENCE. REPÈRES CONTRE LA VIOLENCE.

L'HUMANITÉ. • Aveugle, la force des éléments naturels qui blesse ou tue est l'image même de la violence pure, sur laquelle l'homme qui en est victime ne peut porter aucun jugement de valeur.

Mais qu'un homme lui-même agisse comme ces éléments naturels et semble n'être plus rien d'autre que violence non contrôlée, voilà qui est difficilement supportable.

C'est que l'humanité commence là où cesse le règne exclusif de la violence.

Calliclès, dans le Gorgias de Platon, fait l'apologie de la force nue - et se demande pourquoi « les plus forts » devraient s'embarrasser de conventions.

La « nature » est pour lui le domaine exemplaire où la violence n'est contrariée par aucun autre principe.

Peut-on prétendre régler la société, sans en nier l'essence propre, comme le déterminisme de lois intangibles rè­ gle la nature ? Le refus d'une telle prétention équivaut à poser, contre la violence, l'exigence proprement humaine d'une commu­ nauté dotée d'un sens original.

Communauté d'êtres rationnels, ca­ pables de dialoguer, ou du moins de tendre vers l'idéal d'une communauté rationnelle, en renonçant, justement, à la violence. • Que la violence n'ait pas disparu des sociétés humaines n'invalide pas un tel idéal.

L'homme libre n'est pas seulement celui qui refuse de céder à la violence; c'est aussi celui qui refuse d'en faire un « principe » interne de conduite, bref qui vise la maîtrise de soi.

Agir conformément à une représentation autonome (Kant) ou avec « la libre disposition de ses volontés » (Descartes, Les Passions de l'âme, Article 153) : tel est peut-être le critère décisif, qui situe l'homme aux antipodes de la violence. • Contre la violence donc, les exigences propres au discours ration­ nel, qui doivent triompher des préjugés et des blocages qu'ils déter­ minent, de la mauvaise foi et de la courte vue, etc.

Contre la vio­ lence, l'affirmation irréductible des droits de l'homme, conçus comme référence intangible et rappel de ce qui fonde l'humanité dans sa spécificité.

La justice sociale, la paix sont, entre autres, les enjeux d'une philosophie critique assignant le statut réel de la violence.

Le « réalisme » vulgaire s'en prend très souvent aux exigences éthiques, qu'il prétend disqualifier au nom de ce qui ne serait qu'un « constat » : la prégnance multiforme de la violence dans les rap­ ports sociaux.

Mais un tel « réalisme » {ou prétendu tel) ne fait qu'in­ terpréter, lui aussi, ce qui se donne comme fait brut et irréductible. Rien n'interdit de penser, comme Kant dans La Philosophie de /'his­ toire, la valeur propre des idéaux de justice et de paix dans un monde qui ne leur semble guère favorable.

Encore faut-il créditer l'homme d'une faculté de progrès et de dépassement et, dans l'hy­ pothèse même où il serait naturellement enclin à la violence, d'une capacité de « résistance » à cette violence.

C'est ici que la Raison se découvre des intérêts propres, pratiques et pas seulement théori­ ques. [LILLE B) Dégagez l'intérêt philosophique de ce texte en procédant à son étude ordonnée. Il ne doit y avoir aucune guerre; ni celle entre toi et moi dans l'état de nature, ni celle entre nous en tant qu'États, qui bien qu'ils se trouvent intérieurement dans un état légal, sont cependant extérieurement (dans leur rapport réciproque) dans un état dépourvu de lois - car ce n'est pas ainsi que chacun doit chercher son droit.

Aussi la question n'est plus de savoir si la paix perpétuelle est quelque chose de réel ou si ce n'est qu'une chimère et si nous ne nous trompons pas dans notre jugement théorique, quand nous admettons le premier cas, mais nous devons agir comme si la chose qui peut-être ne sera pas devait être, et en vue de sa fondation établir la constitution qui nous semble la plus capable d'y me­ ner et de mettre fin à la conduite de la guerre dépourvue de salut, vers laquelle tous les États sans exception ont jusqu'à maintenant dirigé leurs préparatifs intérieurs, comme vers leur fin suprême.

Et si notre fin, en ce qui concerne sa réalisation, demeure toujours un vœu pieux, nous ne nous trompons certainement pas en admettant la maxime d'y travailler sans relâche, puisqu'elle est un devoir. KANT CORRIGÉ ÉTUDE DE TEXTE ENTIÈREMENT RÉDIGÉE • Introduction. La guerre n'a cessé d'ensanglanter l'histoire humaine, et de renaître malgré les traités de paix successifs.

Le vingtième siècle a connu deux guerres mondiales, et la faillite notoire de la Société des Nations (S.D.N.), destinée pourtant, après les horreurs de la première guerre, à empêcher la seconde. L'idée d'une paix perpétuelle serait-elle pure chimère ? Il n'y a pas loin du constat à l'interprétation fataliste, qui voit dans les faits passés et présents la nécessaire conséquence de la méchanceté naturelle de l'homme, donnée comme évidente. Ce « diagnostic » apparemment lucide n'annonce rien de bon pour l'avenir, si les mêmes causes produisent les mêmes ef­ fets.

La disqualification d'une espérance, lorsqu'elle conduit l'homme à renoncer à son devoir, et justifie son cynisme en le donnant comme réalisme, relève d'une approche critique rigoureuse, car elle atteste une certaine confusion.

Le doute quant à l'existence future d'un monde sans guerre justifie-t-il ce qui, sous prétexte de réalisme politique, maintient entre les États une logique de rapports de force ? Le paradoxe habituel - « si tu veux la paix prépare la guerre » - est-il aussi évident qu'on le prétend ? L'idée d'un droit internatio­ nal permettant de s'acheminer vers la paix entre les États est-elle si chimérique ? L'étude d'un texte de Kant va nous permettre de prendre en charge ces questions, dont l'enjeu est décisif pour définir le sens de l'idéal de paix. • Étude ordonnée du texte. Aucun homme, lorsqu'il dispose de sa raison, et prend lucidement la mesure de ce qu'est une guerre, ne peut réel le­ ment la vouloir.

Certes, il croit devoir s'y résoudre dans des cas où elle lui semble nécessaire pour recouvrer une liberté, pour résister à une agression.

Mais alors il ne la saisit que comme moyen, et veut bien sûr en limiter la réalité au strict nécessaire pour atteindre la fin visée.

C'est dire qu'aucun homme ne peut_, lorsqu'il se comprend lui-même comme sujet rationnel et partie prenante de l'humanité, vouloir la guerre pour elle-même.

La guerre ne peut jamais être une fin en soi, sauf peut-être pour ceux qui la valorisent en tant qu'aven­ ture, et ne la valorisent ainsi que tant qu'ils n'en sont pas les victimes.

En fait, la guerre n'est tout au plus que le substitut déplorable d'une autre façon de faire de la politique (cf.

la célèbre affirmation de Clausewitz : « la guerre est la conti­ nuation de la politique par d'autres moyens »).

Le sens qu'il faut donner à la maxime qui ouvre le texte est très clair : « il ne doit y avoir aucune guerre ».

Le thème du texte est ici dessiné : il s'agit de la paix comme fin idéale.

La maxime évoquée par Kant est envisagée dans son application paral­ lèle aux relations entre individus, et aux relations entre États. Le caractère · très personnalisé de la formulation mérite ici l'attention : « entre toi et moi dans l'état de nature, entre nous en tant qu'États » - Kant n'écrit pas « entre les hom­ mes », qui seraient alors entendus de façon anonyme.

S'il envisage tour à tour les hommes dans l'état de nature et les hommes dans l'exercice de la citoyenneté, comme partie pre­ nante des États, ne cherche-t-il pas à faire éprouver, par sa formulation, que chaque personne est une fin, en tant qu'elle est comprise comme humanité, et, inversement, que l'huma­ nité est en jeu dans chaque personne? C'est toujours une personne qui meurt, et non un homme abstrait : et c'est justement pour cela que toute mort me touche, car elle pour­ rait être celle d'un proche.

Le point de vue de l'universel est d'emblée en jeu dans la prise en considération de la personne en tant que telle.

Ceux qui envisagent sans cas de conscience une guerre n'appréhendent le plus souvent que la figure la plus impersonnelle de la mort des autres.

L'admet­ traient-ils aussi facilement si la perspective de la mort de leurs proches se présentait à leur esprit? La pensée de ta mort (la mort en « deuxième personne », selon Jankélévitch cf.

La mort, Édition Champs-Flammarion), lorsqu'elle me sert à saisir ce que peut être la mort de tout homme, me la rend insupportable : les morts anonymes des guerres (en « troi­ sième personne » dirait Jankélévitch), reconsidérées à tra­ vers cette pensée, constituent un scandale permanent, trop souvent banalisé, et auquel on ne peut ni ne doit s'habituer. Kant évoque donc très fortement le refus de la guerre, comme refus d'un état de nature, c'est-à-dire d'un état où règne le seul rapport de forces, où le droit n'existe pas.

Mais c'est pour souligner aussitôt une sorte d'anomalie : pour mettre fin à l'état de nature et à ce qui pourrait bien être, selon la formule de Hobbes, un « état de guerre de tous contre tous », les hommes se sont donné un état légal « in­ térieurement », mais ils ont négligé de le faire « extérieure­ ment ».

La thématisation kantienne se précise ici dans une réflexion sur le rapport qui pourrait bien exister entre la paix civile et la « paix extérieure », c'est-à-dire à l'échelle cosmo­ politique.

Si, selon la formule proposée, « chacun doit cher­ cher son droit », ce ne peut être, pour Kant, que dans l'insti­ tution de lois, afin de régler les rapports entre les États comme se règlent, dans la constitution républicaine, les rap­ ports entre les individus.

La thèse du texte est déjà large­ ment suggérée par le parallélisme de Kant : si la fin idéale est la paix; il faut la rechercher sur le plan international par une constitution, permettant de régler les rapports entre les États, de telle sorte que le faible et le fort soient soumis à une loi commune, et que le faible ne soit pas assujetti au fort.

Bref, s'il convient de s'éloigner de l'état de nature pour que la vie civile d'un pays soit possible, il convient également de le faire pour que la paix dans le monde le soit aussi. Est-ce possible ? Les relations entre États peuvent-elles échapper à la violence et à la loi du plus fort? D'emblée Kant envisage les objections qu'on peut lui adresser, au nom du réalisme (ce qui ne veut pas forcément dire conformément au réalisme).

Si la paix perpétuelle (c'est-à-dire assez forte pour ne plus être compromise) est difficile à atteindre, doit­ elle cesser pour autant d'être un objectif visé? Autant dire qu'on ne cherchera pas à soigner une maladie réputée aujour­ d'hui incurable...

L'argumentation que développe Kant à par­ tir de la seconde phrase mérite d'être analysée de près.

Pre­ nons l'objectif que constitue la paix perpétuelle.

Qu'est-ce qui permet de dire qu'il s'agit d'une chimère? Les arguments invoqués en la matière sont-ils de véritables preuves? Se référer à la multiplicité des guerres passées ou présentes, c'est s'en tenir à l'expérience connue.

Expliquer ces guerres par la « méchanceté naturelle de l'homme», c'est faire une hypothèse, qui n'a rien d'évident.

A supposer qu'elle existe, cette méchanceté produit-elle nécessairement de tels effets ? Par ailleurs, ne peut-on pas tout aussi bien expliquer les ac­ tes de dévouement, d'entraide, par la bonté naturelle de l'homme ? La méchanceté est donc une des potentialités de l'homme, mais la bonté aussi.

Ni l'une ni l'autre ne peuvent constituer une explication suffisante, car on peut se deman­ der ce qui fait qu'une potentialité passe à l'acte plutôt qu'une autre.

La fatalisation de la guerre à partir d'une théo­ rie de la nature humaine inférée d'une expérience limitée n'est donc pas recevable, car sur deux points la théorie qui la sous-tend est défaillante : la généralisation abusive qui institue une expérience étendue, mais toujours limitée, en preuve d'une nature permanente, dépourvue de toute liberté, et partant susceptible de produire indéfiniment ses effets ; et l'explication causale unilatérale qui confond potentialité et disposition immédiate à agir.

Il n'est donc pas possible d'af­ firmer que la guerre existera toujours sous prétexte qu'elle s'est produite souvent.

De l'avenir, nous ne pouvons juger à partir du passé ; nous pouvons tout au plus faire des conjec­ tures, raisonner en termes de probabilités.

On ne peut donc pas plus affirmer avec certitude que la guerre est perpétuelle, ou que la paix perpétuelle existera effectivement.

L'expé­ rience humaine déborde, par.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓