Royaume-Uni (1982-1983): La guerre au secours des conservateurs En 1982, la vie politique britannique a été dominée par la récession...
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Royaume-Uni (1982-1983):
La guerre au secours des conservateurs
En 1982, la vie politique britannique a été dominée par la récession et la
guerre, les effets négatifs de la crise sur la popularité du gouvernement ayant
été largement compensés par le soutien populaire à son militarisme victorieux.
Au début de l'année, tous les sondages donnaient en effet le gouvernement
Thatcher comme l'un des plus impopulaires depuis la guerre, résultat du chômage
persistant et de la stagnation économique.
En décembre 1982, la production industrielle n'a atteint que 82% du niveau de
mai 1979 et, en dépit d'une reprise légère (0,2%) et passagère au cours du
troisième trimestre, elle a stagné à son niveau le plus bas depuis seize ans.
Selon les statistiques gouvernementales, le taux de chômage restait élevé: 3 063
025 chômeurs en décembre 1982, soit 13,8% de la population active.
Et selon
d'autres estimations, ce chiffre se situerait en fait entre 3,8 millions
(chiffres du Parti social-démocrate, SPD) et 5 millions.
Le pourcentage de
faillites a augmenté de 35% par rapport à 1981 qui avait pourtant été une année
"record", et quelque 1 750 000 personnes de plus qu'en 1979 ont dû recevoir des
allocations complémentaires, c'est-à-dire au total 6 500 000 personnes.
Enfin,
malgré un excédent commercial important dû au pétrole (4 milliards), la livre
sterling a continué à s'affaiblir sur les marchés des changes pour tomber pour
la première fois au-dessous de 1,50 dollar en mars 1983.
Le chancelier de l'échiquier a libéré en juillet 1982 les contrôles sur les
ventes à crédit, assoupli les taux d'intérêt et a relevé, à l'automne 1982, les
autorisations de dépenses publiques et les charges sociales.
Cette politique de
relance très prudente s'est accompagnée d'une légère augmentation du pouvoir
d'achat des salariés au cours du dernier trimestre 1982, grâce au ralentissement
de l'inflation (à 5,4%, au niveau le plus bas depuis treize ans).
Mais les
attaques contre la livre en novembre et décembre 1982 ont empêché une nouvelle
baisse des taux d'intérêt et les perspectives pour l'emploi et la production en
1983 restaient sombres.
Le "facteur Falklands"
Mais, pour une fois, le gouvernement n'a pas eu à subir les conséquences
électorales habituelles de la stagnation, du chômage et de la pauvreté.
L'opinion publique, s'est au contraire retournée en sa faveur, grâce à l'action
engagée pour reprendre les Malouines à l'Argentine, le 2 avril.
Au début,
l'invasion argentine a pourtant discrédité encore plus le gouvernement, qui
n'avait su ni prévoir, ni prévenir cette initiative d'une dictature aux abois.
Mais l'envoi d'une force d'intervention pour reprendre les îles s'est révélé
extrêmement populaire, popularité qui a été renforcée par une incroyable
campagne des médias et par la reddition argentine le 15 juin.
Pendant les
combats, des communiqués de presse soigneusement contrôlés ont maintenu
l'intérêt du public à son plus haut niveau.
Le chauvinisme de la presse a battu
des records, et on a accueilli comme des héros les soldats et marins de retour
au pays.
La position du gouvernement a encore été renforcée par une parade
militaire triomphale à travers Londres, une visite aux îles de Madame Thatcher,
et un rapport des "privy Councillors" (le rapport Franks) qui dégageait le
gouvernement de toute responsabilité dans la débâcle initiale.
Le "facteur Falklands" a renforcé l'autorité de Madame Thatcher dans le
gouvernement et la position du Parti conservateur dans le pays.
L'alliance entre
le Parti social-démocrate (SPD) et les libéraux - qui avait jusque-là progressé
de façon spectaculaire -, en a été la première victime.
La popularité de
l'alliance - qui avait atteint jusqu'à 50% dans certains sondages et dans des
élections locales partielles à la fin de 1981 - avait déjà commencé à baisser
avant le 2 avril, quand le SPD a remporté de justesse une élection partielle à
la veille de l'invasion argentine.
Mais l'alliance a essuyé ensuite d'autres
défaites, directement liées au "facteur Falklands", l'opinion s'étant détournée
du SPD au profit des conservateurs lors des élections locales de mai 1982 et,
plus tard, lors d'une série d'élections partielles.
Le SPD a réagi en élisant Roy Jenkins à sa tête, en proposant un train de
mesures marquées à droite (réformes syndicales, "démocratie industrielle",
expansion économique, éducation, représentation proportionnelle et défense), et
en "relançant" l'alliance par une nouvelle campagne d'information en janvier
1983.
La victoire du candidat de l'alliance SPD-libéraux à l'élection partielle
de Bermondsay, dans le sud de Londres, a prouvé alors qu'elle était capable
d'attirer les votes des électeurs travaillistes déçus.
Le Parti travailliste en effet a été la seconde victime du "facteur Falklands".
Sa cote est restée basse (35% seulement de la population le soutenaient encore
en janvier 1983), en dépit d'une campagne extrêmement active de son aile droite
pour reprendre les positions gagnées par son aile gauche depuis 1979.
Pour
tenter de consolider l'unité du Parti avant les élections générales, la gauche a
décidé d'abandonner la lutte pour la nomination d'un vice-président.
Cela n'a
pourtant pas suffi à démobiliser l'aile droite.
Au Congrès du Parti en septembre
1982, cette dernière a repris le contrôle du NEC (National Executive Council) et
a entrepris, comme première étape d'une vaste opération pour chasser les
"gauchistes" du parti, une grande campagne d'expulsion des trotskystes des
organisations locales.
Le Congrès a établi un registre des groupes approuvés par
le NEC, ce qui visait directement le courant Militant, groupe trotskyste bien
implanté dans le Parti.
La menace de ce courant de faire appel à la justice, a
amené le NEC à tempérer ses attaques.
Reste que la crédibilité de Michael Foot
comme candidat potentiel au poste de Premier ministre, s'est vue affaiblie et
que le Parti travailliste devait aborder les élections générales anticipées de
juin 1983 en proie à des divisions internes acharnées et sur des positions
politiques proches de celles de son aile gauche (à propos de l'emploi, de
l'Europe, du désarmement nucléaire unilatéral).
Or, toutes ces positions étaient
rejetées par une partie importante des parlementaires travaillistes.
Une opposition affaiblie
L'orientation de la politique gouvernementale vers un État plus autoritaire et
moins "social" s'est donc poursuivie sans trop de résistances.
De nouveaux
secteurs industriels ont été dénationalisés en 1982 (l'Amersham International et
la National Freight Corporation, par exemple), et le gouvernement prévoyant de
poursuivre ce processus en 1983 et au-delà (avec British Telecom, British
Shipbuilding et le monopole public de la production d'électricité).
Les
prestations sociales ont continué à diminuer fortement à la suite des réductions
des dépenses publiques.
Les recommandations d'un groupe de travail favorable à
une privatisation plus importante des services de santé n'ont cependant pas pu
être adoptées, ayant provoqué un tollé général dans l'opinion et des dissensions
à l'intérieur même du gouvernement.
Des plans de restructuration radicale de
l'enseignement supérieur (et d'introduction d'un système de prêts aux étudiants)
étaient néanmoins prévus si les Conservateurs retournaient aux affaires.
Des mesures accordant de nouveaux pouvoirs à la police en matière
d'arrestations, d'enquêtes et de détention ont été prises à la fin de 1982,....
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