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Russie (1991-1992): De l'URSS à la Russie Encadré : La Russie, un État multinational L'URSS disparaît le 25 décembre 1991,...

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« Russie (1991-1992): De l'URSS à la Russie Encadré : La Russie, un État multinational L'URSS disparaît le 25 décembre 1991, avec ses derniers symboles: le président Mikhaïl Gorbatchev démissionne ce jour-là et le drapeau rouge frappé de la faucille et du marteau est enlevé des toits du Kremlin.

Leur succèdent le président russe Boris Eltsine, élu le 12 juin précédent au suffrage universel, et le drapeau blanc-bleu-rouge, qui fut jusqu'en 1917 l'emblème de la Russie tsariste.

Certes, une Communauté d'États indépendants (CEI) est formée, en décembre 1991, par onze ex-républiques soviétiques.

Mais ce n'est pas un nouvel État, plutôt une gérance plus ou moins coordonnée de la liquidation de l'Union, au mieux un rêve de future communauté.

De fait, la Russie est l'héritière de l'URSS.

Une Russie qui se veut nouvelle, animée d'un projet politique radical: l'économie de marché et la démocratie à l'occidentale.

Dissociée du communisme et de l'idéologie messianique de son rôle mondial ("phare de l'humanité progressiste"), la Russie doit se forger une nouvelle identité.

Se tournant vers l'Ouest, mais aussi vers son passé pré-révolutionnaire.

Et ne pouvant ignorer, quoiqu'en disent ses dirigeants, qu'elle sort des flancs de l'URSS.

D'ailleurs, le système soviétique, l'Union, leurs couches dirigeantes ont-ils réellement quitté la scène? Au printemps 1991, l'URSS et la Russie, encore confondues, se trouvent au seuil de choix décisifs.

Aucune fatalité ne leur dicte la voie à suivre, l'Histoire offre une série restreinte de possibilités.

Sur quatre fronts, la perestroïka de Mikhaïl Gorbatchev a franchi le Rubicon: le pouvoir, le système social, l'Union, le rapport au monde extérieur.

Et ni le pouvoir communiste post-stalinien, ni le système collectiviste administratif, ni l'Union soviétique centralisée, ni la puissance de contrepoids à l'"impérialisme américain" ne survivront aux bouleversements de l'ère Gorbatchev. La désagrégation du Parti Sur le front du pouvoir, le Parti communiste d'Union soviétique (PCUS) a perdu son hégémonie idéologique, son monopole de décision, sa prétention même à un tel monopole (il y a renoncé au début de 1991) et, finalement, son idéologie marxiste-léniniste: au dernier plénum du comité central en juillet, M. Gorbatchev, encore secrétaire général, a fait accepter au PCUS sa transformation en parti de type parlementaire et d'idéologie social-démocrate.

Le parti se désagrège.

Après la dissidence de Boris Eltsine en juillet 1990 (création de la Plate-forme démocratique) surviennent, au début de l'été 1991, celle de proches de M.

Gorbatchev.

L'inspirateur de la perestroïka, Alexandre Iakovlev, l'ex-ministre des Affaires étrangères Édouard Chevardnadze et le leader du patronat d'État moderniste, Dimitri Volski, fondent en effet le Mouvement démocratique pour la réforme.

Le 2 août, intervient la rupture des "communistes pour la démocratie" d'Alexandre Routskoï, qui rallient le camp démocrate de Boris Eltsine. Dans les autres républiques, le PCUS se fractionne en partis nationaux.

La direction très conservatrice du PC de Russie (Ivan Poloskov) est donc très isolée.

Même ses amis du groupe parlementaire Soyouz (Union), qui soutient depuis novembre 1990 un projet de dictature militaire, évitent désormais toute référence "communiste", pour mieux se rapprocher des autres opposants au libéralisme: les patriotes russophiles, anticommunistes, religieux.

Le PCUS est donc moribond avant l'été 1991, et la bataille fait rage pour le partage des biens du parti. Voilà pour la surface des événements.

Quant à leur réalité profonde, il semble que les couches dirigeantes, les "nomenklaturistes" aient fait leur deuil du parti, se tournant, qui vers les affaires, qui vers les nouveaux appareils d'États en formation, à Moscou comme à Kiev ou à Alma-Ata. Sur le deuxième front, celui du régime social, le "système administratif de commandement" est en plein démantèlement.

Il n'y a pas de système de remplacement.

La bureaucratie résiste au changement.

Mikhaïl Gorbatchev lui-même, partisan du marché, cherche une "troisième voie" entre socialisme d'État et capitalisme, sans réussir à la concrétiser.

Or, la victoire idéologique et politique de l'"économie de marché" est acquise.

Y compris les privatisations dont (sauf pour la terre) presque tout l'éventail politique russe, des communistes aux ultralibéraux, reconnaît la nécessité.

De facto, certaines grandes entreprises sont transformées en sociétés par actions.

La lutte pour la propriété et le pouvoir (pour obtenir les sympathies de l'Occident aussi) est engagée entre la nomenklatura réformatrice et une nouvelle bourgeoisie.

Celle-ci, formée de commerçants et d'intellectuels, mais de très peu d'entrepreneurs, occupe des positions influentes au sein des médias, de la distribution, des activités spéculatives et des joints ventures (contrats avec les firmes étrangères), mais elle reste très marginale dans le capital bancaire et l'industrie. L'"Union" à bout de souffle Sur le troisième front - l'Union des républiques - l'avenir apparaît encore plus incertain au seuil de la "révolution" d'août 1991.

Sans doute, les séparatismes ont-ils gagné la partie dans les républiques baltes, en Moldavie, dans les républiques transcaucasiennes.

Mais il ne s'agit que des "marches" de l'empire et - à l'exception du Caucase - de régions de soviétisation récente (les pays Baltes, en 1940, les Moldaves d'outre-Dniestr après 1945), et ils totalisent moins de 10% de la population de l'URSS.

Le nationalisme en Ukraine est localisé (à l'ouest surtout, dans une région incorporée en 1945), ou encore peu enclin au séparatisme.

L'Asie centrale et le Kazakhstan restent attachés à l'Union.

Les réformateurs de Moscou et leurs conseillers occidentaux sont pour la plupart déterminés à établir l'économie et l'État de droit dans l'espace économique, l'ensemble politico-culturel formés par l'URSS.

Au début de l'été 1991, c'est un plan de "transformation de l'URSS" que proposent, aux présidents G.

Bush et M. Gorbatchev, le nouveau penseur du libéralisme radical Grigori Iavlinski et ses conseillers de l'université de Harvard.

Les institutions financières internationales comme le FMI, la CEE sont favorables au maintien de l'Union. Le 17 mars 1991, 76% des Soviétiques avaient voté en faveur d'une Union renouvelée, non pas dans le sens de l'unitarisme, mais dans celui de la quasi-confédération, qui sera mise en chantier lors des accords de Novo-Ogarevo. Le projet confédéral soutenu par M.

Gorbatchev et le président du Kazakhstan, Noursultan Nazarbaiev, va même se concrétiser dans les accords de l'automne 1991, créant une "communauté économique" de onze ex-républiques dont l'Ukraine, et un préaccord d'"Union" politique entre sept États. La nouvelle Union devait prendre place dans un "ordre mondial" où l'URSS avait renoncé à toute prétention idéologique ou même "contestataire" à l'égard des États-Unis et de l'Occident.

Les accords de désarmement, l'acceptation de la réunification allemande, le soutien apporté par Moscou à la guerre contre l'Irak, la demande d'adhésion au FMI, le "lâchage" de Cuba et d'autres anciens alliés de l'URSS, l'abandon des relations privilégiées avec les partis communistes et mouvements révolutionnaires du tiers monde illustraient à suffisance cette volonté soviétique de "rentrer dans le rang" ou, pour reprendre une expression courante à Moscou, de "devenir un pays normal et civilisé". La Russie de Boris Eltsine poursuit sur la lancée de l'URSS gorbatchévienne, elle s'inscrit dans le chemin tracé par la perestroïka.

Mais elle le détourne, en corrige la trajectoire par des choix, des ruptures, qui s'opèrent fin 1991-début 1992 dans un torrent d'actions-réactions plus ou moins réfléchies.

Ce qui permet le tournant, c'est bien sûr le putsch raté d'août 1991.

Le coup de force d'une poignée de dirigeants effrayés par la "perte de l'empire" a lieu la veille de la signature du nouveau traité de l'Union, prévue pour le 20 août 1991.

Parmi les instigateurs se trouvent le Premier ministre, Valentin Pavlov, le ministre de la Défense, Dimitri Iazov, le président du KGB, Vladimir Krioutchkov, le minitre de l'Intérieur, Boris Pougo.

Le soutien du président du Soviet suprême, Anatoli Loukianov, est supposé.

L'objectif poursuivi n'est pas de "sauver le communisme", mais de conserver ce qui peut encore l'être d'un pouvoir central. Le putsch manqué et la fin de l'URSS La tentative irréaliste, improvisée, rapidement maîtrisée, ouvre la voie à la prise du pouvoir par Boris Eltsine et son équipe.

Le pouvoir russe s'empare très rapidement de la plupart des leviers de commande politiques, financiers, bientôt militaires et diplomatiques.

La mise à l'écart de M.

Gorbatchev et la liquidation de ses projets de nouvelle Union s'inscrivent dans une logique où le pouvoir russe veut être seul à décider, à mettre en oeuvre une réforme libérale qui ne tiendra plus compte ni des hésitations d'un président attaché au "choix socialiste", ni des objections des autres républiques. Un procès contre le Parti communiste (interdit en Russie le 6 novembre 1991) commencera le 7 juillet 1992.

Le procès des putschistes, en revanche, n'a pas eu lieu comme beaucoup l'espéraient. Le séparatisme-pilote de la Russie ne peut qu'encourager les autres.

Le pouvoir ukrainien, le président Léonid Kravtchouk, en particulier, seront les principaux alliés de Boris Eltsine dans cette opération liquidatrice.

La création de la CEI par les trois républiques slaves (Russie, Ukraine, Biélorussie), le 8 décembre 1991, consacre la mort de l'URSS comme "sujet de droit international".

Bien que non consultées dans ce processus, les républiques du Kazakhstan et d'Asie centrale n'auront d'autre choix que de s'y joindre, lors de la rencontre d'Alma-Ata, le 21 décembre.

Le pouvoir russe s'empare de l'héritage soviétique dans toute la mesure du possible, avec l'aval très rapide des puissances occidentales.

Ce qui ne manquera pas d'éveiller chez les non-Russes, et particulièrement chez les alliés ukrainiens, le soupçon de "chauvinisme impérial grand-russe". La destruction de l'URSS n'a pas été le fruit d'une volonté populaire - les plébiscites indépendantistes organisés dans les républiques après le putsch manqué ne feront que consacrer le nouvel état de fait - ni même d'une volonté unanime des démocrates russes: certains d'entre eux.... »

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