SARTRE Jean-Paul 1905-1980 Romancier et auteur dramatique, philosophe et essayiste, né à Paris. De tous les écrivains qui depuis la...
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SARTRE Jean-Paul
1905-1980
Romancier et auteur dramatique, philosophe et essayiste, né à Paris.
De tous les écrivains qui depuis la Seconde Guerre mondiale se sont
révélés des maîtres (au sens le plus fort) de notre littérature, aucun ne
mérite autant ce titre, aucun n'apparaît plus grand, c'est-à-dire plus
pleinement humain, plus inépuisablement inventif, et enfin plus doué
sur le plan de l'écriture que Sartre_ Philosophe avant tout, sans doutece qu'il ne nous appartient pas de juger-, sa biographie nous intéresse
cependant dans son plus intime détail, au contraire de celle des philo
sophes en général: hier encore un Merleau-Ponty, avant-hier un Bou
troux; parce que c'est ici un poète, un créateur de personnages, et
que la particularité de tels hommes fut toujours de nous rendre curieux
de leur propre personnage.
Et, en effet, dans son livre autobiogra
phique, Les Mots (1964), Sartre a montré à ses lecteurs ravis le plus
étonnant des personnages de toute son œuvre:
Issu d'une famille bourgeoise, mi-catholique, mi-protestante, il est
orphelin de père dès l'âge de deux ans ; et il sera élevé dans un douillet
conformisme moral par sa mère et ses grands-parents maternels.
Nor
malien brillant, reçu premier à l'agrégation de philosophie, il enseigne
d'abord en province ; au Havre, en particulier (qui deviendra dans
La Nausée: Bouville).
Puis à Paris, en 1932.
À cette date il a déjà écrit
un roman (La Défaite) et d'autres ouvrages refusés par les éditeurs.
Ce
n'est que six ans plus tard, en 1938, que sort son premier roman,
La Nausée; œuvre qui semble désespérée, au prime abord, et qui feint
(dès son épigraphe) de se ranger dans la lignée de Céline, alors au som
met de sa renommée.
En fait, derrière cette concession superficielle qui
est un piège (ainsi que le passage « surréaliste » du rêve, où intervient le
poète national Déroulède), se cache un jeu de thèmes alors entièrement
neuf.
À quoi s'ajoute une incamouflable, une outrecuidante personna
lité sur le plan proprement littéraire: un timbre de voix, un accent, un
débit, qui renouvellent de fond en comble les modes d'expression alors
connus (Mardi: Rien.
Existé.).
Cette œuvre sombre débouche, d'ailleurs,
sur une issue bien surprenante, une brèche, par quoi notre philosophe
révèle sans vergogne ce qu'il est en réalité, ce qu'il est d'abord: un écri
vain, un artiste (souffrir en mesure).
Le Mur (1939) est, en un style plus
dru, plus charnu encore, une suite de nouvelles, dont se détachent
Erostrate et, surtout, L'Enfance d'un chef (où l'auteur semble avoir pensé
- entre autres - à Drieu, qu'il devait malmener bientôt plus explicite
ment, pendant l'Occupation, dans le n°6 des Lettres françaises clandes
tines).
À la même époque, professeur à Condorcet, il développe sa
propre doctrine philosophique dans L'Être et le néant (1943).
En 1943
encore, Dullin monte devant de maigres demi-salles la tragédie des
Mouches; autre chef-d'œuvre de jeunesse, où, tandis qu'il énonce sur le
mode de l'allégorie traditionnelle (mais en de puissantes cadences
lyriques), le thème de l'engagement qui lui est cher, Sartre envoie des
nargues au pouvoir - secrètement ou du moins très discrètement
saluées, au passage, par les jeunes spectateurs - et pose quelques ban
derilles à tel de ses confrères un peu trop platement collaborateur.
Mais Sartre va sortir brusquement de cette demi-notoriété auprès du
public averti pour accéder, au lendemain de la guerre et de l'occupation
allemande, à une célébrité plénière.
Au point que certains lui feront
grief de cette gloire (d'un type assez rare dans notre littérature, en ce
sens qu'extra-culturel, parfois), qui éclate à la faveur de la liberté sou
dain retrouvée des mœurs : les chanteuses même seront « existentia
listes», et aussi les caves des amateurs de jazz à Saint-Germain
des-Prés.
Gloire fondée pourtant sur la solide réalité d'une œuvre alors en
pleine germination: première de Huis clos (1944, qui reste sans aucun
doute son œuvre la plus réussie au théâtre avec La Putain respectueuse,
1946); fondation de la revue Les Temps modernes (1946); enfin mise en
route, dès 1945, des Chemins de la liberté.
Ce cycle romanesque définit
la seule façon possible d'avancer, le seul sens de la marche dans un
monde....
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