Significations de Germinal La signification de Germinal peut se lire sur trois niveaux, historique, épique et symbolique. UN TÉMOIGNAGE SOCIAL...
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Significations
de Germinal
La signification de Germinal peut se lire sur trois
niveaux, historique, épique et symbolique.
UN TÉMOIGNAGE
SOCIAL ET HISTORIQUE
Politiquement, Germinal veut être un acte d'accusation
contre le Second Empire; mais Zola ne convainc pas.
En
revanche, le roman fixe un moment de l'histoire sociale,
une étape du mouvement ouvrier: l'époque où les syn
dicats se constituent, où des grèves spontanées éclatent,
où naît la conscience de classe.
Un monde est ébranlé, un autre est en germe.
Le récit
impose le sentiment du pouvoir créateur de l'histoire.
L'évolution dépasse la volonté et le pouvoir des hommes.
Les individus assument un rôle qu'ils n'ont pas choisi.
L'histoire s'inscrit dans un univers où s'affirment et
s'affrontent des forces antithétiques.
Toute réalité naît de
son contraire: l'espoir, du malheur; le rêve de justice, de
la misère; l'écrasement de la grève change la résignation
en révolte; I' «extermination» voulue par Souvarine promet
à Étienne «une société régénérée»; il faut «le bagne
souterrain» pour donner un sens au «chant de l'alouette»
(p.
584).
UN ROMAN ÉPIQUE
Germinal est, en outre, un roman à caractère épique
où s'affrontent des forces violentes et où les choses et
les éléments semblent avoir une âme.
Un affrontement de forces
• Forces cosmiques
La lutte des mineurs est, bien sûr, celle des travailleurs
contre la bourgeoisie, mais aussi celle de l'humanité
contre l'univers hostile.
Le ciel et la terre, le feu et l'eau
s'acharnent sur les hommes; l'accident du travail, le
sabotage sont vécus commme un cataclysme qui prend,
sous la plume de Zola, une dimension cosmique, presque
surnaturelle; la fosse agonise sous un ciel tourmenté,
comme si les conditions météorologiques avaient part au
désastre : « des nuées couleur de rouille» voilent le soleil
en plein midi (p.
532); une « nuée sombre, grandie à
l'horizon, hâtait le crépuscule» (p.
534).
• Forces animales
Des forces animales s'affrontent ; la machine est une
bête mauvaise : « Et le Voreux, au fond de son trou, avec
son tassement de bête méchante, respirait d'une haleine
plus grosse et plus longue [...
]» (p.
60); « Devant lui, le
Voreux s'accroupissait de son air de bête mauvaise»
(p.
183).
Lorsque Souvarine sabote le cuvelage , on assiste
à un affrontement entre un homme et une créature
vivante.
« Il s'acharna au hasard contre le cuvelage, tapant
où il pouvait [...], pris du besoin de l'éventrer tout de
suite sur sa tête» (p.
515).
Souvarine lui-même se com
porte comme un animal : ses outils sont assimilés à une
mâchoire, son dos à une échine : « On entendait la
morsure de ses outils, son échine s'allongeait, il rampait
[...
] » (p.
515).
Il finit par infliger à la bête une « blessure
au ventre» (p.
515).
De la même façon, la foule des émeutiers est dépeinte
comme un bétail affolé : les hommes, tels des « bêtes
fauves» continuaient à galoper dans une « débandade
enragée» (p.
406), tandis que les mineurs, au fond de la
veine, sont des insectes menacés d'écrasement: Maheu
semble « un puceron pris entre deux feuillets d'un livre,
sous la menace d'un aplatissement complet» (p.
86) ; les
haveurs « entièrement nus comme des bêtes [ont].des
échines de singes» (p.
361); Catherine, derrière sa berline,
nue elle aussi, « besognait, la croupe barbouillée de suie,
avec de la crotte jusqu'au ventre, ainsi qu'une jument de
fiacre.
À quatre pattes, elle poussait» (p.
363).
Vision d'un
monde aveugle, de forces inconscientes et hostiles, écra-
sement des faibles par les forts; ce n'est plus la lutte
des classes, c'est la concurrence vitale.
• Forces religieuses
Le conflit social est en outre présenté comme une
guerre de religions: les divinités maléfiques d'un vieux
culte - le culte du Capital et du Voreux- sont renversés
par les propagateurs d'une foi nouvelle: des hommes,
des travailleurs, se révoltent contre les sacrifices humains,
contre la barbarie de ce dieu carnivore, le Voreux, tapi
dans les ténèbres, accroupi « comme une idole, dans
l'inconnu de son tabernacle» (p.
436), et se nourrissant
du travail et de la vie des ouvriers.
Mais le renversement des idoles suscite la véngeance
des anciens dieux par le déluge et par le feu.
À la fin
du roman, l'eau, telle une «cataracte», se déverse dans
la fosse en «une nappe bouillonnante» (p.
536), tandis
que le feu éclate en un «torrent de flammes» (p.
544) et
envahit les galeries.
Dans ce conflit, Étienne apparaît comme l'apôtre de la
religion naissante; il parle « d'une humanité jeune, purgée
de ses crimes» (p.
220); « et les Maheu avaient l'air de
comprendre, approuvaient, acceptaient les solutions miraculeuses, avec la foi aveugle des nouveaux croyants,
pareils à ces chrétiens des premiers temps de l'Eglise»
(p.
221 ).
Lorsqu'Étienne s'adresse aux mineurs dans la
forêt, ceux-ci « ne sentaient plus le froid, ces ardentes
paroles les avaient chauffés aux entrailles» (p.
340); ce
n'est plus le syndicaliste qui parle; au cœur de la grève,
« il rendait des oracles» (p.
340); et quand il quitte la
mine, c'est dans la «gloire» d'un soleil nouveau qui
illumine une terre rajeunie: « Un flot d'or roulait de l'orient
à l'occident» (p.
583).
Personnification épique
Zola aime prêter vie aux éléments et aux choses.
Tout
au long du roman, le puits du Voreux est comparé à une
créature vivante qui se nourrit de chair humaine (cf.
p.
72).
Le nom seul du Voreux est un symbole (racine : dévorer,
vorace); le premier chapitre en donne· une description
technique, le troisième une vision mythique : Étienne,
embauché par Dansaert, sent naître l'angoisse; la machine
devient une bête nocturne («devant lui, brusquement,
deux yeux jaunes, énormes, trouèrent les ténèbres»,
p.
70) et une bête malfaisante (« le puits avalait les
hommes par bouchées de vingt ou trente», p.
73); il
imagine des « boyaux géants capables de digérer un
peuple.
Cela s'emplissait, s'emplissait encore, et les
ténèbres restaient mortes» (p.
74).
La pompe d'épui
sement figure « la respiration» du monstre; nuit et jour,
Étienne l'entend « soufflant toujours de la même haleine
grosse et longue, l'haleine d'un ogre dont il distinguait la
buée grise [...] et que rien ne pouvait repaître» (p.
120).
Pendant la grève, le monstre vit au ralenti; à la fin du
roman, « il meurt» : « on vit la machine, disloquée sur son
massif, les membres écartelés, lutter contre la mort; elle
marcha, elle détendit sa bielle, son genou de géante,
comme pour se lever; mais elle expirait, broyée, engloutie
[...].
C'était fini, la bête mauvaise, accroupie dans ce creux,
gorgée de chair humaine, ne soufflait plus de son haleine
grosse et longue» (p.
535).
UNE VISION MYTHIQUE
Le caractère épique du roman tient aussi à la présence
en filigrane d'un réseau de mythes, mythes de l'enfer,
mythe du Minotaure.
L'enfer
La mine est un véritable enfer.
Les hommes travaillent
sous terre, à 554 mètres de profondeur, sous une tem
pérature qui peut monter à 35 degrés.
« L'air ne circulait
(Jas, l'étouffement à la longue devenait mortel» (p.....
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