Sujet : Balzac, Le Lys dans la vallée. « Je regardai ma voisine, et fus plus ébloui par elle que...

« Sujet : Balzac, Le Lys dans la vallée. « Je regardai ma voisine, et fus plus ébloui par elle que je ne l'avais été par la fête; elle devint toute ma fête.

Si vous avez bien compris ma vie antérieure, vous devinerez les sentiments qui s'ourdirent en mon coeur.

Mes yeux furent tout à coup frappés par de blanches épaules rebondies sur lesquelles j'aurais voulu pouvoir me rouler, des épaules légèrement rosées qui semblaient rougir comme si elles se trouvaient nues pour la première fois, de pudiques épaules qui avaient une âme, et dont la peau satinée éclatait à la lumière comme un tissu de soie.

[...] Après m'être assuré que personne ne me voyait, je me plongeai dans ce dos comme un enfant qui se jette dans le sein de sa mère, et je baisai toutes ces épaules en y roulant ma tête.

Cette femme poussa un cri perçant, que la musique empêcha d'entendre; elle se retourna, me vit et me dit: "Monsieur?" Ah! si elle avait dit: "Mon petit bonhomme, qu'est-ce qui vous prend donc?" je l'aurais tuée peut-être mais à ce monsieur! des larmes chaudes jaillirent de mes yeux.

Je fus pétrifié par un regard animé d'une sainte colère, par une tête sublime couronnée d'un diadème de cheveux cendrés, en harmonie avec ce dos d'amour.

Le pourpre de la pudeur offensée étincela sur son visage que désarmait déjà le pardon de la femme qui comprend une frénésie quand elle en est le principe, et devine des adorations infinies dans les larmes du repentir.

Elle s'en alla par un mouvement de reine.

» Rappel : Le Lys dans la vallée est paru en 1836 dans la Comédie Humaine, dans la section des Études des mœurs et dans le deuxième livre Science de la vie de Province. Il s’agit d’une histoire d’amour passionnée, bien que platonique, entre Félix de Vandenesse et la comtesse Blanche-Henriette de Mortsauf, épouse du comte de Mortsauf, un homme sombre et violent. Roman « poétique », Le Lys occupe une place à part dans l’œuvre de Balzac, car c’est également la transposition d’une relation vécue aussi pure que passionnée. Résumé de l’œuvre : Félix narre sa rencontre avec une « céleste créature » qui devint pour lui une amante inatteignable, une maîtresse pure.

Bien des années plus tard, à Paris, ce dernier rencontre Lady Dudley, aristocrate anglaise qui lui fait découvrir les joies et les passions charnelles.

Henriette vient à l’apprendre et se laisse alors mourir. Résumé du passage : À la veille de la Restauration (mai 1814), Félix assiste, las, à un bal et croise le regard d’une éblouissante inconnue qui le fait immédiatement se révéler à lui-même : déposant un baiser sur son épaule, l’inconnue s’éloigne offensée. Problématique : Par quels procédés Balzac parvient-il à dresser un portrait ambivalent de cette inconnue et à restituer la passion qui s’empare finalement de ces deux individus? Développement : I/ Naissance d’une passion intense : La première phrase de ce passage fonctionne comme une indication sur l’état d’esprit du jeune homme.

À travers le pronom personnel « je », il exprime son état d’esprit et son état émotif.

En somme, il s’agit d’une attirance intense envers la jeune femme qu’il observe un peu comme si tout l’univers habitait cet être majestueux. La phrase suivante ne fait que renforcer l’idée dominante que le narrateur est tombé en émoi devant pareille vision.

L’écriture est peuplée de signes, qui oriente le lecteur vers l’intérêt de cette rencontre.

D’autant qu’il en appelle à la mémoire de son interlocutrice (et donc du lecteur) afin de faire prendre pleinement conscience de l’explosion de joie qui prend naissance dans son cœur : « les sentiments qui s’ourdirent dans mon cœur ». Cette atmosphère intense est soutenue par un champ lexical du coup de foudre : « fus (…) ébloui », « elle devint toute ma fête », « sentiment qui s’ourdirent dans mon cœur », « mes yeux furent frappés », « je me plongeais dans son dos ».

À cette passion intense s’oppose l’image pure et chaste de la jeune femme qui ignore tout pour le moment de cette idylle naissante et qui dès lors apparaît sous les traits dominants d’une vierge mais aussi d’une femme avec tous les charmes que.... »