Sujet : Henry Miller écrit : « A quoi servent les livres, s'ils ne nous ramènent pas vers la vie...
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Sujet :
Henry Miller écrit : « A quoi servent les livres, s'ils ne nous ramènent pas vers la vie ?...
Notre espoir à tous, en prenant un livre, est de rencontrer un homme selon notre coeur,
de vivre des tragédies et des joies que nous n'avons pas le courage de provoquer nousmêmes, de rêver des rêves qui rendent la vie plus passionnante, peut-être aussi de
découvrir une philosophie de l'existence qui nous rende plus capables d'affronter les
problèmes et les épreuves qui nous assaillent.
» En vous appuyant sur des exemples de
votre choix, vous apprécierez ce jugement.
Texte de la copie
Henry Miller émet ici un jugement catégorique : «A quoi servent les livres, s'ils ne nous
ramènent pas vers la vie ? » En effet, cette interrogation n'est qu'oratoire.
Toutefois, il
est incontestable qu'une partie importante de la littérature n'assume pas ce rôle ; et
nous nous demanderons pour quelles raisons.
D'autre part, si la littérature peut « nous
ramener vers la vie», pour Henry Miller elle le peut à deux niveaux : soit elle peut servir
de substitut à l'homme, lui faire connaître, de façon toute fictive, un vaste univers de
sensations et de sentiments, 10 soit elle peut l'aider réellement à « affronter les
problèmes et les épreuves qui nous assaillent».
Il sera bon, dans les deux cas, de
discerner les conditions qui permettent à la littérature de remplir cette fonction.
Beaucoup d'oeuvres ne répondent pas à l'attente d'Henry Miller, et cela pour diverses
raisons : à cause des caractères trop invraisemblables, des mentalités et de la société
actuelle.
Si l'auteur veut satisfaire un certain public, s'il cède à la facilité, il ne pourra
faire oeuvre sincère et valable.
Dans notre société, le livre pullule.
Il est partout présent.
Lui aussi répond à nos
exigences, à notre désir de consommer.
Mais ce besoin toujours aiguillonné est néfaste.
En effet, le livre doit procurer immédiatement satisfaction, plaisir : il doit donc être de
lecture facile.
Considéré comme moyen de distraction, il ne doit pas solliciter notre
réflexion.
Cela explique le succès d'oeuvres aussi vite lues qu'oubliées, la place de plus
en plus importante d'une «sous-littérature» (les romans-photos par exemple).
L'auteur, plongé dans cette société, la connaît, en fait partie intégrante.
S'il se plie au
conformisme de celle-ci, il écrira pour le satisfaire.
Satisfaire : voilà le mot clé de notre
société.
Matériellement, nous sommes comblés.
Et sur le plan moral, nous trouvons des
livres qui nous confortent dans notre bien-être sécurisant, ou nous permettent l'évasion
facile.
Tel Peter Betchley dans Les chiens de mer : pouvons-nous voir un rapport
quelconque avec notre vie dans cette histoire invraisemblable de drogue ? Pourtant nous
sommes satisfaits : beaucoup d'actions et une division manichéenne du monde qui nous
sécurise : d'un côté les « bons » héros, de l'autre les « méchants » gangsters tués,
naturellement, à la fin du livre.
Cette stylisation abusive n'a aucun rapport avec la réalité, mais elle nous rassure.
De
telles oeuvres n'abordent aucun problème véritablement humain, manquent de toute
vraisemblance et de crédibilité.
Nous pouvons constater l'actuel foisonnement de romans
de science-fiction, fantastiques : cela correspond à la mentalité de la société de
consommation.
Ces livres sont lus, car on sait à l'avance qu'ils « n'engagent à rien » Le
lecteur reste en dehors de l'oeuvre car il a conscience de son aspect irréel.
Nous voyons
donc que l'exagération enlève la possibilité de ressentir le roman.
Mais dans La nuit de
Maupassant, les émotions sont dosées savamment et la peur naît.
Cet exemple montre combien l'auteur peut guider, faire surgir de nous diverses
émotions.
Pour cela il faut qu'irréelle, la situation paraisse cependant vraisemblable.
Le
lecteur aura alors la possibilité d'enrichir sa connaissance de l'homme, des moeurs.
Nous
nous interrogerons sur les raisons qui permettent au livre de passionner, de faire rêver.
Giraudoux dans Ondine dit : « C'est le grand avantage du théâtre sur la vie : il ne sent
pas le rance.
» Car il a été longtemps soumis à la règle de temps.
En une journée avaient
lieu un grand nombre d'actions.
Aucun temps mort n'existait.
Dans Phèdre, par exemple,
Racine fait tout d'abord croire à la mort de Thésée puis à son retour.
Nous assistons,
dans cette pièce, à deux déclarations amoureuses, à l'annonce de la mort d'Hippolyte et
au suicide de Phèdre.
Dans quelle vie normale arrive-t-il, en si peu de temps, des choses
aussi importantes ? Toute l'habileté de l'auteur réside dans le fait de parvenir à nous
faire croire que cela est possible.
Dans Hernani, le foisonnement des personnages et des
situations est tel qu'il nuit à la profondeur et à la réalité psychologique des personnages.
Hugo ne parvient pas à nous faire ressentir, c'est-à-dire croire, le drame intérieur qui
agite Hernani.
Celui-ci apparaît plutôt comme le jouet des événements.
Le livre nous présente donc une action resserrée par rapport à la vie ou des actions
choisies, car écrire c'est éliminer tout ce qui pourrait nuire au but recherché : émouvoir,
faire rêver.
Flaubert, dans Madame Bovary, ne nous montre pas ses sentiments sur....
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