URSS (1988-1989): La perestroïka gagne la vie politique Sous l'impulsion de Mikhaïl Gorbatchev, la restructuration (perestroïka) est entrée en 1988...
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URSS (1988-1989): La perestroïka gagne la vie politique
Sous l'impulsion de Mikhaïl Gorbatchev, la restructuration (perestroïka) est
entrée en 1988 dans une nouvelle phase: celle de la rénovation politique.
La
Conférence du Parti communiste de l'Union soviétique (PCUS) convoquée le 28 juin
- pour la première fois depuis 1941 - a accéléré ce processus, reconnu à cette
occasion comme inévitable.
"Si le système politique reste figé", de l'aveu même
du secrétaire général, les difficultés auxquelles se heurte la perestroïka ne
pourront en effet être surmontées.
La restructuration passe par une transformation des comportements qui ne peut se
faire dans un système où l'administration est toute-puissante et où l'arbitraire
est de règle.
Pour que l'individu participe à la vie du pays, la nécessité de
construire un "État socialiste de droit" dans lequel la primauté de la loi
serait garantie, a été affirmée.
Cet État de droit, tel qu'il a été défini par
M.
Gorbatchev, implique de créer une nouvelle base juridique, de redéfinir les
relations entre le Parti et l'État, le premier abandonnant au second la gestion
quotidienne des affaires pour se consacrer aux tâches idéologiques, et de
renforcer le rôle dirigeant du PCUS, qui reste le noyau du système politique.
M.
Gorbatchev s'est attelé à cette triple tâche.
Une réforme juridique et
judiciaire a été engagée.
Une révision de la législation pénale, de la procédure
pénale et pénitentiaire est en préparation au printemps 1989, ainsi que des lois
sur la presse, sur la liberté de conscience...
Réforme des institutions
Délimiter les fonctions du Parti et de l'État exige de renforcer les compétences
des organes de celui-ci.
M.
Gorbatchev a pour cela demandé que les soviets
(conseils) deviennent "les vrais patrons" sur leur territoire et préconisé, le
28 juin, une importante réforme des institutions, laquelle a été menée sans
délai.
Après un mois de discussion nationale, la Constitution a été modifiée le
1er décembre.
Le Soviet suprême, qui n'était qu'une simple chambre
d'enregistrement, a été transformé en un "parlement" plus restreint (542
membres), doté de pouvoirs législatifs, administratifs et de contrôle étendus.
Il est élu au sein d'une nouvelle assemblée, le Congrès des députés du peuple de
l'URSS, organe suprême du pouvoir d'État, composé de 2250 membres, élus (pour
les deux tiers au suffrage universel) pour cinq ans.
A la tête du Soviet suprême
a été créé un poste de président, élu par le Congrès.
Des modifications ont au
même moment été apportées au système électoral.
La loi du 1er décembre prévoit
la possibilité de candidatures multiples et le vote à bulletin secret.
Conformément à ce texte, 2 900 candidats au Congrès se sont disputé 1 500 sièges
le 26 mars 1989.
Pour revitaliser le PCUS et en faire véritablement la force dirigeante de la
société, plusieurs actions ont été entreprises.
Décharger tout d'abord celui-ci
des tâches de gestion courante.
Principale concrétisation de cette volonté, une
simplification des structures du Comité central (CC) - suppression de certains
départements et regroupement des autres en six grandes commissions - a été
annoncée le 30 septembre 1988.
Lutter contre la bureaucratie, démocratiser l'activité du PCUS et en améliorer
la qualité.
Mikhaïl Gorbatchev a proposé, très habilement, qu'à tous les
échelons de l'appareil, les responsables du Parti se portent dorénavant
candidats à la présidence des soviets.
Le scrutin du 26 mars 1989, qui a mis en
déroute un certain nombre de notables locaux, a suggéré que ce procédé pouvait
être un excellent moyen de purger le Parti.
La limitation de la durée d'exercice
des fonctions électives à deux mandats consécutifs, décidée par la XIXe
conférence, après l'avoir été en son temps par Nikita Khrouchtchev, a pour
objectif, elle aussi, de supprimer les positions établies.
Instaurer enfin un pluralisme des opinions afin que l'existence d'un parti
unique, fondement du système politique, ne soit plus source de sclérose et
d'abus de pouvoir.
Pour y parvenir, tout en désamorçant d'éventuelles tentatives
de création de mouvements d'opposition, M.
Gorbatchev a soutenu la formation
spontanée un peu partout dans le pays (malgré l'hostilité dans certains cas des
autorités locales) de "fronts populaires".
Extérieurs au Parti sans en être
concurrents, ceux-ci ont en principe pour tâche d'aider la perestroïka à
progresser.
Ces initiatives ont été prises dans un contexte de transparence et de
déstalinisation accrues: réhabilitations entre autres de Grigori Zinoviev et de
Lev Kamenev, publication pour la première fois depuis très longtemps d'articles
sur Trotski, destruction du mythe du mineur champion de la productivité
Stakhanov, décision sous la pression de Memorial, la plus puissante des
organisations indépendantes, de construire un monument dédié aux victimes du
stalinisme...
Démocratiser sans démocratiser
Cette politique, qui a donné lieu à d'amples débats, a créé une situation
nouvelle à laquelle la société a répondu.
Les manifestations de sentiments
nationaux ont été les premières à suggérer qu'une société civile était en train
de s'organiser.
D'autres faits l'ont confirmé: la création non seulement des
fronts nationaux, mais aussi de très nombreux groupes informels, qui rassemblent
à travers le pays plusieurs milliers de personnes, les discussions lors de la
XIXe conférence, le choix de certains des 5 000 délégués et surtout les
élections du 26 mars 1989...
Les électeurs ont alors écarté de nombreux
responsables du Parti et de l'État pour élire des personnes peu impliquées dans
la vie politique, comme l'infirme Ilya Zaslavski, ou rejetés par l'appareil,
comme Boris Eltsine.
Le jeu politique s'est ainsi nettement élargi.
En sont
devenus acteurs des bureaucrates très conservateurs qui freinent des changements
dont ils font les frais, des intellectuels résolus à aller de l'avant, des
Baltes de plus en plus entreprenants, des "sudistes" pour qui la perestroïka est
une épreuve...
Cette situation, positive par certains côtés pour le pouvoir, a
aussi été très difficile à gérer.
S'il a soutenu le pluralisme des opinions nécessaire à la modernisation du pays,
M.
Gorbatchev a en effet, en même temps, explicitement rejeté le multipartisme,
ce qui l'a amené à limiter strictement la "démocratisation".
Il a condamné la
création, en mai 1988, d'une Union démocratique qui s'était définie comme un
mouvement d'opposition.
En Arménie, il a refusé d'accepter l'existence d'un
pouvoir parallèle: dans les jours qui ont suivi le dramatique tremblement de
terre du 7 décembre, tous les membres du Comité Karabakh ont été emprisonnés.
En
Estonie, il a applaudi à la création (octobre 1988) d'un Front populaire.
Mais
il a vivement condamné cette république lorsqu'elle a, peu après, proclamé sa
souveraineté et la suprématie de ses lois sur son territoire.
La loi du 1er
décembre a autorisé la pluralité, mais non la liberté des candidatures.
Celles-ci ne sont acceptées que dans des conditions bien définies: lors des
élections du 26 mars, plus de 80% des candidats étaient des membres du PCUS.
La
loi a en outre été faite de telle façon que les groupes informels ne peuvent,
sauf exception, avoir des députés au Congrès...
Le refus d'autoriser des publications non officielles, telles que Glasnost, la
décision pendant l'été 1988 d'imposer des quotas sur les abonnements à certaines
revues (mesure finalement levée), l'interdiction donnée à la revue Novyi Mir de
publier Alexandre Soljenitsyne, etc., sont venus rappeler que la transparence
n'était pas une fin.
Les débats historiques ont été nombreux, mais Lénine a
continué à échapper à la critique.
Le droit de manifester a été limité, les
pouvoirs des forces de l'ordre pour disperser les manifestants, augmentés, la
notion de crime contre l'État a été rappelée et élargie le 8 avril 1989...
M.
Gorbatchev a ainsi cherché à la fois à renforcer les compétences des organes de
l'État, à susciter les initiatives de la population et à maintenir le monopole
de l'autorité du Parti.
Ces démarches ont été difficiles à concilier.
Retard économique
Malgré tous les efforts entrepris depuis quatre ans pour moderniser l'économie,
objectif premier de la perestroïka, les résultats de 1988, notamment dans le
secteur agricole, ont été, comme ceux de 1987, très médiocres ; beaucoup ont été
inférieurs aux prévisions.
Le ravitaillement, malgré la priorité dont il a été
l'objet, n'a pas été amélioré.
Et....
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