Devoir de Philosophie

Victor Hugo (Les Contemplations, 1855) « Elle était déchaussée, elle était décoiffée» Elle était déchaussée, elle était décoiffée, Assise, les...

Extrait du document

« Victor Hugo (Les Contemplations, 1855) « Elle était déchaussée, elle était décoiffée» Elle était déchaussée, elle était décoiffée, Assise, les pieds nus, parmi les joncs penchants ; Moi qui passais par là, je crus voir une fée, Et je lui dis : Veux-tu t'en venir dans les champs ? s 10 15 Elle me regarda de ce regard suprême Qgi reste à la beauté quand nous en triomphons, Et je lui dis : Veux-tu, c'est le mois où l'on aime, Veux-tu nous en aller sous les arbres profonds ? Elle essuya ses pieds à l'herbe de la rive ; Elle me regarda pour la seconde fois, Et la belle folâtre alors devint pensive... Oh ! comme les oiseaux chantaient au fond des bois ! Comme l'eau caressait doucement le rivage ! Je vis venir à moi, dans les grands roseaux verts, La belle fille heureuse, effarée et sauvage, Ses cheveux dans les yeux, et riant au travers. INTRODUCTION 1Situer le passage Chef de file de l'école romantique, Victor Hugo a rythmé de ses créations poétiques le x1xe siècle.

Les Odes et Ballades, Les Feuilles d'automne, Les Orientales sont des recueils romantiques de jeu- nesse.

Après le coup d'État de Louis Napoléon Bonaparte, Victor Hugo entre dans l'opposition et s'exile.

Les Châtiments sont le grand recueil poétique d'opposition politique.

Les Contemplations ont un statut différent, plus privé.

Œuvre à la rédaction longue, elle se divise en deux parties : « Autrefois » et « Aujourd'hui ». La mort de Léopoldine, fille de Victor Hugo, trace la frontière entre ces deux mondes.

Dans la première partie,« Autrefois», des poèmes chantent la joie de vivre, l'amour et la nature. 1Dégager des axes de lecture Ce poème de couture très romantique par ses thèmes comme par sa forme décrit le bonheur de la rencontre amoureuse.

Dans un premier axe, nous nous attarderons sur le lyrisme des sentiments et de l'amour.

Le deuxième axe montrera l'accord de cette scène avec la nature environnante ; enfin nous étudierons, dans un troisième temps, la forme non conformiste de ce poème, très proche de la chanson. PREMIER AXE DE LECTURE L'INVITATION LYRIQUE À L'AMOUR Le romantisme prône de privilégier l'expression des sentiments et des sensations.

Ce poème décrit de manière très sensuelle le plaisir de la rencontre amoureuse dans un univers non codé, loin des contraintes de la société.

Nous étudierons d'abord les deux personnages en présence, puis nous montrerons que l'échange est d'abord visuel avant d'insister sur l'invitation très épicurienne* à l'amour. LECTURES ANALYTIQUES 133 1Du masculin et du féminin Le thème du texte est la rencontre entre deux personnages, un « elle » qui représente la féminité et un « je » qui est le poète. Le personnage féminin est assez mystérieux.

Il n'est pas nommé, elle ».

« Elle » est à peine décrite.

Deux traits la caractérisent : la beauté (« elle » rime simplement désigné par le pronom personnel, « d'ailleurs avec « belle ») et la nudité (déchaussée, les pieds nus).

Le poème insiste sur ses pieds nus qui permettent d'érotiser la scène. Le personnage masculin est d'abord évoqué par le pronom personnel tonique de la première personne, « moi ».

II s'agit du poète.

II est, comme souvent dans les poèmes de Hugo, un passant, un promeneur.

Il est surtout celui qui maîtrise le regard et la parole.

Il va être le seul à parler dans le texte. Les rôles sont nettement délimités : la beauté est féminine, la parole masculine. 1L'échange des regards L'échange des regards est toujours essentiel dans la scène de rencontre.

On constate que ici le regard est réciproque : « je crus voir une fée », « elle me regarda », « elle me regarda pour la seconde fois », « je vis venir ».

L'insistance sur le regard comme vecteur de la rencontre passe par la répétition du verbe regarder « » et le polyp- tote* sur le verbe« voir» (v.

3; v.

14).

La même allitération en -v- unit le verbe« voir» (regard), le verbe « vouloir» (désir) et le verbe« venir» 0'accord) et montre la rapidité de la séduction amoureuse. ILa scène d'amour La rencontre entraîne l'invitation : « Veux-tu t'en venir dans les champs ? » Cette invitation ambiguë est éclairée par la périphrase (« le mois où l'on aime »), l'allusion (« les arbres profonds ») et le tutoiement amoureux (v.

4 ; v.

7 ; v.

8).

Le verbe « triompher» au vers 6 ne laisse aucun doute sur l'issue de la scène. Le jeu sur les pronoms éclaire le scénario du poème.

Dans la première et la deuxième strophe, le 134 « je » LECTURES ANALYTIQUES et le « elle » se répartissent équitablement les vers, deux vers pour« je», deux vers pour« elle ». La troisième strophe, qui est.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓